Copland : James Mangold dénonce la mafia des frères Weinstein et des critiques de films

Mathias Penguilly | 13 août 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Mathias Penguilly | 13 août 2020 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Le réalisateur de Logan et du Mans 66 s'est frotté aux puissants frères Weinstein au tout début de sa carrière, une expérience pour le moins intimidante.

En 1995, James Mangold est un jeune trentenaire dont Heavy, le tout premier long-métrage, est récompensé au festival de Sundance. Rapidement, il devient très courtisé et il signe un véritable pacte avec le diable en acceptant de réaliser Copland pour le compte de Bob et Harvey Weinstein, les propriétaires du puissant studio Miramax. Ce dernier est alors au pic de sa gloire et s'est fait un nom en distribuant des films d'auteur ou des films indépendants qui, sur le papier, rebutaient les grands studios. Ils ont ainsi propulsé la carrière d'un certain Quentin Tarantino (avec Reservoir Dogs et Pulp Fiction) ou encore de Steven Soderbergh (Sexe, mensonges et vidéos), entre autres...

Pour Mangold, un jeune réalisateur, le projet Copland est une sacrée carte de visite. Il s'offre un casting de rêve (Sylvester StalloneRobert De NiroHarvey Keitel et Ray Liotta) et travaille pour une société de production aussi subversive que branchée. À l'époque, les frères Weinstein ont déjà leur réputation de rouleaux compresseurs, habitués à démonter et remonter les films qui ne leur plaisent pas, mais qu'à cela ne tienne : Mangold y va et réalise son film. Il est aujourd'hui revenu sur les coulisses de la production et ce n'est pas très reluisant.

 

photo, Sylvester Stallone"Les Weinstein, mafieux ? Non, tu crois ?"

 

Au cours d'un long entretien avec le magazine américain Vulture, le cinéaste a très élégamment décrit Miramax comme une petite mafia en affirmant :

"C'était une clique de voyous avec lesquels on travaillait. L'environnement [de travail] était très particulier à l'époque. C'était cet endroit qui paraissait tout doré aux yeux d'Hollywood et dans l'esprit du temps. Vous vous sentiez honoré d'être inclus, mais vous aviez aussi l'impression d'être un petit rouage dans un système qui était sombre et corrompu. On aurait dit que tout le monde lisait ses propres coupures de journaux et était ravi de faire partie de ce club qui était le petit studio le plus en vogue dans le monde entier."

 

photo, Sylvester Stallone, Annabella SciorraTrop longtemps, Hollywood a préféré regarder ailleurs

 

James Mangold fait ici référence aux critiques cinématographiques qu'il accuse de collusion avec les Weinstein, ces golden boys hollywoodiens. Il va même plus loin en détaillant comment tout ce petit monde travaillait ensemble :

"Ils avaient ces petites manigances où ils montraient rapidement votre film à un critique. Ensuite, le critique offrait ses notes. Ils disaient littéralement à Harvey qu'ils seraient plus sympas avec le film à condition d'opérer quelques changements. C'était un monde incroyablement incestueux dans lequel ils avaient compris comment s'attirer les personnes dont ils avaient besoin - et par la suite gagner leur approbation plus tard, lorsque le film émergeait."

Comme de nombreux films passés entre les mains de Bob et Harvey Weinstein, Copland a subi de nombreux redécoupages en salle de montage. Cela a même poussé James Mangold à sortir une Director's cut en 2004, soit moins de dix ans après la sortie cinéma du film.

 

photo, Sylvester Stallone, Robert De NiroCinema Monsters

 

Au départ, le Festival de Cannes avait sélectionné Copland parmi les nommés de sa cinquantième édition. Le film n'y a finalement pas été présenté parce que les premiers avis sur le film n'étaient pas assez encourageants et que les deux frangins avaient demandé une reprise du tournage. Le choix de Stallone - Rocky Balboale seul, l'unique - était trop populaire pour le public intello alors que la tonalité du film n'était pas assez grand public pour satisfaire les fans de Sly et de Rambo : bilan des courses, Miramax a privé le film de Croisette.

 

photo, Harvey KeitelDans le film, la "mafia", c'est lui

 

Dans Vulture, le cinéaste new-yorkais a décrit une ambiance absolument sombre :

"Je n'avais pas beaucoup de contact avec eux mis à part quand ils venaient en salle de montage pour me dire ce que je devais changer. Imaginez être dans une salle de montage minuscule sur Broadway, avec les deux frères assis sur un canapé, pointant du doigt votre table de montage."

On imagine la scène assez glaçante pour un réalisateur qui débute à Hollywood, face à ces véritables ogres de cinéma. Travailler sur un film qui se concentre sur une bande de flics corrompus n'a pas dû aider quant à l'atmosphère mafieuse de cette production.

 

photo, Ray Liotta, Sylvester StalloneNew Jersey 9-9

 

Au tournant des années 2000, James Mangold s'est essayé à de nombreux genres, de la romcom (Kate & Leopold) au slasher (Identity) en passant par la comédie musicale (Walk the Line) et le western (3h10 pour Yuma). Il passe ensuite au blockbuster, retrouvant Hugh Jackman sur Wolverine : Le combat de l'immortel et bien sûr, le superbe Logan. Il sera bientôt derrière la caméra pour réaliser le cinquième volet de la saga Indiana Jonesdont la sortie est pour l'instant fixée au mois de juillet 2022.

 

Affiche officielle

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commentaires
Pialco
17/08/2020 à 13:57

Tres bon realisateur , sa filmographie est dans l ensemble excellente.

Bubble Ghost
14/08/2020 à 16:42

Depuis quand Walk The Line est une comédie musicale ? ^^

Mando
13/08/2020 à 23:01

Stallone m'a bleufé, excellent!
Excellent réalisateur....
Pas facile lorsqu'on débute.

Numberz
13/08/2020 à 19:40

Pareillement, j'aime beaucoup se réal. Par contre, dommage de tirer sur l'ambulance maintenant, mais je comprends qu'à l'époque ça aurait été se tirer un balle dans le pied.

Son cut du film est d'une beauté. Vraiment beau film.

Wiss
13/08/2020 à 19:06

J'ai juste trouver ce film super. Stallone me filerai presque la larme à l'œil.

alulu
13/08/2020 à 19:03

Bof le film, idem pour Identity par-contre Logan et 3h10 pour Yuma, c'est tout le contraire.

Gregdevil
13/08/2020 à 17:48

super film. Petite pépite passé inaperçu, avec un casting génial, et enfin un rôle de compo pour Stallone.
J'aime aussi bc Mangold, son Identity m'avais régalé à l'époque.

Hank Hulay
13/08/2020 à 17:04

tout pareil

Flash
13/08/2020 à 15:58

J'aime beaucoup ce réalisateur, un solide artisan avec une filmographie dans l'ensemble excellente.