Ils ont précédé Paul Walker

Simon Riaux | 3 décembre 2013
Simon Riaux | 3 décembre 2013
Paul Walker n'est pas le premier à mourir au beau milieu d'un tournage. L'histoire du cinéma nous enseigne qu'il a été précédé de prestigieux artistes au triste panthéon des décès prématurés. Sentier de la gloire ou glas prématuré, la mort rode devant et derrière l'écran, consacrant les uns, balayant les autres.

 

Bruce Lee – Le Jeu de la mort

Nous sommes en 1973 et l'emblème du cinéma d'art martiaux entend être la star d'un film dédié à sa propre pratique des arts martiaux, histoire d'assoir tout à fait sa domination à l'international. Manque de pot, une poignée de combats filmés plus tard, l'athlète meurt sans crier gare (sans crier du tout d'ailleurs). Résultat, le producteur se démène pour sortir une première version rafistolée n'importe comment, avant d'embaucher un sosie pas ressemblant pour un sou afin de boucher les trous. Le résultat est surréaliste et abracadabrantesque, mais imprime les rétines grâce à l'affrontement mémorable entre Lee et Kareem Abdul Jabbar. On ne pourra pas en dire autant de la suite opportuniste qui verra le jour...

 

Brandon Lee – The Crow

Le 31 mars 1993, Brandon n'imagine pas qu'il est sur le point de marcher dans les pas de son père. Il est abattu sur le tournage du film qui doit le consacrer en tant que star montante, un trip glam-romantico-gothique, où revenu d'entre les morts, il venge sa bien aimée et lui-même, massacrés par de sales types. Le revolver qui doit mettre fin aux jours de son personnage a beau être un accessoire, dans la stupeur généralisée, le comédien s'écroule touché par un éclat de balle à blanc. Mal nettoyée après un premier tir, l'arme a dramatiquement rempli son office. Point de corbeau vengeur pour Brandon, mais une doublure numérique très réussie et une aura funèbre qui servira le film et lui servira longtemps d'alibi artistique.

 

River Phoenix – Dark blood

1993 n'est décidément pas une bonne année. Il ne reste que trois semaines de tournage à River, qui va faire la fête au Viper Room boîte branchée de Los Angeles. À ses côtés Johnny Depp (co-propriétaire des lieux), Christina Applegate Joaquin et Rain Phoenix et de la drogue comme s'il en pleuvait. River n'y résistera pas et mourra quelques minutes après son arrivée, d'une overdose qui le laisse convulsant sur le trottoir, dans les bras des siens. Dark Blood ne sortira jamais, source d'un infini imbroglio entre la famille Phoenix, ses producteurs et son réalisateur, jusqu'à ce qu'il soit timidement présenté dans une poignée de festivals au cours de l'année 2013. Vous pouvez lire notre avis très positif de la chose en cliquant ici.

 

Peter Sellers – À la recherche de la Panthère rose

Étrange exploit que ce film dont le rôle principal est décédé bien avant son premier coup de manivelle. Comme tout ceux qui l'ont connu de près, Blake Edwards a été durablement marqué (qui a dit traumatisé) par l'artiste et son talent hors norme, aussi entend-il lui rendre un ultime hommage en rassemblant les chutes de ses précédents films, les scènes inédites de la saga à la panthère afin de créer une toute nouvelle aventure du célèbre inspecteur Clouseau. Dérangeant, arythmique mais fascinant, le métrage est un mausolée bizarre, où le comédien semble s'exprimer par delà le tombeau.

 

Aaliyah – Matrix reloaded & Revolutions

Un rôle dans deux épisodes de la trilogie la plus hype du moment (et de la décade à venir) la Reine des damnés a de quoi se réjouir. Mais l'interprète de Zee ne deviendra jamais une impératrice du grand écran, un accident d'avion mettra fin à sa vie et sa carrière en 2001. Malgré la mise en boîte de plusieurs scènes de Matrix Reloaded, son rôle sera finalement confié à la descendante de Marvin Gaye et les séquences où elle apparaissait intégralement retournées. Les fans de hip hop pleurent, les spectateurs s'inquiètent, tant et si bien qu'on oublierait presque que l'interprète de l'Oracle, elle aussi décédée subira le même sort cinématographique.

 

James Dean – Géant

Le film est quasiment terminé, ne reste plus à enregistrer que quelques images, une poignée de plans à redoubler. Le destin et un étudiant pas très doué pour la conduite en décideront autrement. Sa Porche Spyder pulvérisée, la star éparpillée façon puzzle devient instantanément une icône, un mythe qui restera immaculé de longues décennies. Ange fauché en plein envol, incarnation parfaite d'une jeunesse conquérante, rebelle mais parfaitement miscible dans l'idéal américain, James Dean meurt et renaît simultanément, faisant de Géant une œuvre longtemps surestimée.

 

Oliver Reed – Gladiator

Le grand Oliver succombe à une crise cardiaque en plein tournage. La plupart de ses scènes sont déjà filmées, mais quelques unes et pas des moindres nécessitent encore sa présence. Ni une ni deux, l'imagerie numérique recrée le comédien le temps de brefs plans, mais surtout d'une séquence de rébellion matée par la garde prétorienne. Oliver Reed y est tué lors d'un passage aussi pompier que plaisant, qui achève et consacre ce grand comédien, qui trouve ici un dernier rôle mémorable.


Heath LedgerL'Imaginarium du Dr Parnassus

Si le Dark Knight de Christopher Nolan bénéficiera largement de l'oraison funèbre internationale dédiée à Ledger, parachuté James Dean du XXIè siècle, Terry Gilliam en a gros. Terrassé par le cosmique échec de son Don Quichotte, il ne compte pas se laisser détruire par une schkoumoune qui a tout de la malédiction. Le cocktail mortel de médocs ingéré par feu sa star n'aura pas raison de son film, il transforme le script, puis convie Johnny Depp, Colin Farrell et Jude Law au carnaval. En résulte une œuvre difforme et monstrueuse, d'une poésie funèbre absolument saisissante, sorte de pot pourri de son auteur, où plane tel un songe l'âme d'un comédien auquel est rendu un hommage dissonant quoique total.

 

Clark Gable – Les Désaxés

Le tournage de ce film mythique de Huston s'achève, autour de lui Clark répète à qui veut l'entendre que Marilyn Monroe lui a mené la vie dure, la petite l'a presque tué. Il ne croit pas si bien, puisqu'en cette année 1960, l'immense acteur s'éteint quelques jours après le clap de fin, d'une crise cardiaque. Son décès est un choc, confirme le statut d'œuvre maudite de ce métrage inclassable et désespéré. Mais les Misfits portent tous le poids d'une sinistre augure, Montgomery Clift ne fera plus grand chose, quant à Marilyn, il s'agit ici de son dernier film visible en salle. Les Désaxés n'ont aujourd'hui rien perdu de leur grâce macabre, de leur implacable poésie où la mort rôde, attend son heure, derrière chaque photogramme, chaque plan.

 

Marilyn Monroe – Something's got to give

Comme poursuivie par l'étreinte glacée de la faucheuse, l'actrice succombe peu après l'apocalyptique Misfits, en pleine production du Something's got to give de Cukor. Traumatisme des foules enamourées, théories du complot et ceinture obligée pour un Kennedy qui n'en demandait pas tant, le film invisible et inachevé se voit propulsé aux panthéons des œuvres recherchées, désirées parce qu'introuvables. Au centre de tous les fantasmes, une scène de piscine où l'hyper sexuelle Marilyn apparaît nue. Il faudra patienter jusqu'en 2001 et le documentaire Marilyn : the last days pour découvrir un montage de cette séquence sensuelle en diable.

 


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