Kong : Skull Island - critique à la Kong

Simon Riaux | 7 mai 2023 - MAJ : 09/05/2023 11:40
Simon Riaux | 7 mai 2023 - MAJ : 09/05/2023 11:40

Après un fabuleux Godzilla, quelle ne fut pas la surprise du monde entier d'apprendre qu'un univers étendu allait être créé autour de la bestioles et de... King Kong. En voici donc la première extension, Kong : Skull Island.

PUTAIN KONG

À bien des égards, Skull Island avait toutes les cartes en mains pour faire de son héros, un des monstres matriciels du cinéma, le nouvel empereur d’Hollywood. Poussé par la volonté du studio d’hybrider cet emblème du cinéma fantastique avec Godzilla, le projet avait donné durant sa promotion de nombreux gages tant de sa volonté de respecter le mythe que de lui accoler l’imagerie bienvenue du Vietnam en général, et d’Apocalypse Now en particulier.

De ces nobles intentions, il reste bien deux ou trois éclats dans le film de Jordan Vogt-Roberts, mais à la manière du funeste Suicide Squad, le gouffre entre l’œuvre qu’on nous a vendue et le produit projeté en salles est abyssal. On appréciera la poignée de plans iconiques que recèle le film, autant d’images travaillées avec soin, composées à la perfection, qui tentent régulièrement de nous faire croire au magnétisme quasi divin exercé par Kong sur la nature environnante.

 

King KongFaut vraiment y retourner ?

 

Mais ces instants fugaces, s’ils constituent une collection de fonds d’écran plutôt plaisants, soulignent cruellement l’incompétence générale qui préside au projet, et ce dès son écriture. C’est bien simple : dans Kong : Skull Island, à peu près tout ce qui peut tourner au vinaigre vire à la piquette cramoisie.

 

Photo Tom HiddlestonAttention au scénario hein

 

KONG ME SOFTLY

Le premier élément problématique n’est autre que Kong lui-même, dont le traitement est incompréhensible. On pouvait regretter que Gareth Edwards dissimule son Godzilla dans le blockbuster éponyme, mais cette démarche suivait une logique, qu’épousait toute la mise en scène du métrage. Ici, Kong a beau apparaître régulièrement, il est renvoyé au rang de figurant de luxe et de deus ex machina grossier.

Puisque sa relation romanesque et fatale avec une femme blonde n’est plus l’ancrage émotionnel du récit, on s’attendait à ce que le scénario lui substitue un autre arc narratif. Mais non, Kong : Skull Island se contente de dérouler la trame déjà vue mille fois d’un régiment de bidasses génériques se baladant en milieu hostile, tandis qu’un singe géant rugit de temps à autre. Ce dernier, désormais totalement dépourvu de sentiments, est renvoyé au même rang que ses adversaires, simili-lézards affamés ou araignées-crabes empaleuses.

 

Photo Jason Mitchell, Shea Whigham, Thomas MannAttention au tonnerre sous les tropiques

 

Non pas que la faune de Kong : Skull Island soit totalement ratée – certaines bébêtes vous arracheront sans mal un rire ou un frisson -, mais une fois encore, le rythme de l’aventure progresse selon une logique totalement incohérente. L’ensemble s’étalant sur moins de deux heures, tout est mené au pas de course et si les scènes d’action sont nombreuses, aucune ne dure plus d’une quarantaine de secondes.

À ce titre, le climax mollasson est particulièrement embarrassant. Obligé de singer la version de 2005 pour trouver une poignée d’idées cinégénique, cet affrontement rachitique où les personnages humains sont réduits au rang de spectateurs – Tom Hiddleston y est littéralement humilié par la caméra de Vogt-Roberts – évoque une scène de transition de Peter Jackson, tant il est expédié sans la plus petite once de créativité.

 

Photo John Goodman"Courir ? Ah non les mecs, c'est pas dans mon contrat !"

  

L’ODEUR DU KONG AU PETIT MATIN

Et qu’en est-il de la parenté revendiquée jusque dans les affiches de film avec le cinéma du Vietnam et la référence à Apocalypse Now ? Kong : Skull Island se voulait un hommage appuyé au chef-d’œuvre de Francis Ford Coppola, mais la faute à un script goguenard et des personnages écrits sans queue ni tête, il n’en est qu’une parodie grotesque.

Imaginez Martin Sheen qui, remontant le fleuve à la recherche de Kurtz, tomberait sur un Dennis Hopper pétomane à la tête d’un club de retraités fans du Cirque du Soleil, et vous aurez une idée du je-m’en-foutisme absolu avec lequel Warner a traité King Kong et ses ressorts mythiques. Complètement schizophrène, l’écriture tente de marier un humour bouffon (celui-là même qui a gangréné Marvel ces dernières années) et une pluie de répliques badass complètement artificielles.

 

Photo Samuel L. JacksonSamuel L. Jackson n'arrange rien

 

Car pour que des punchlines aussi rances que « la cavalerie, c’est bibi » soient efficaces, il faut qu’elles sortent de la bouche de personnages forts, incarnés par des comédiens investis. Et de ce côté aussi, Kong tient plus de la Fête de la Saucisse que de l’épopée fondatrice. La faute à Samuel L. Jackson et John Goodman, dont la mise en scène ne parvient pas à dissimuler qu’ils passent tout le film assis, à se chatouiller la couenne, tandis que Tom Hiddleston essaie de faire pire qu’Adrien Brody dans Predators, sous les yeux exorbités de Brie Larson, qui fait son possible pour incarner une reporter anti-guerre.

 

PhotoBeaucoup de bruit

 

KONG : DEBILE WAR

Trop superficiel pour proposer une relecture de son icône, pas assez débile et sincère pour provoquer l'amusement et jamais totalement spectaculaire, Kong : Skull Island souffre paradoxalement de sa réussite. Car après une dizaine de minutes de blagues grasses et d’explosions numériques, il apparaît clairement que le film n’est pas tant une aventure qu’une interminable bande-annonce.

 

Photo Tom HiddlestonTommy s'en va-t-en-guerre

 

Doté d’une administration secrète découverte dans Godzilla qui lorgne désormais clairement du côté du SHIELD, repoussant jusque dans sa séquence post-générique la satisfaction du spectateur, Skull Island n’a aucune envie de bouleverser une nouvelle fois les cinéphiles avec une icône première, mais cherche à fidéliser le public qui se rue encore devant les blockbusters super-héroïques.

Et à ce titre, il accomplit sa mission sans encombre. En à peine plus d’une heure quarante, le récit n’ennuie jamais, et se paie ponctuellement le luxe d’offrir une belle image, voire un ricanement, pour qui n’en demande pas trop niveau blagounette. Sorte de toucher rectal effectué avec un indéniable doigté, le film est aussi détestable pour le cinéphile averti et fan des précédentes versions, que doucement supportable pour qui cherche à se rayer la rétine en se limant l’œsophage au pop-corn.

 

Affiche

Résumé

Vendu comme un shot pulp réhaussé d'une goutte d'Apocalypse Now, Kong : Skull Island n'est finalement qu'une parodie grotesque qui lorgne opportunément vers la recette Marvel.

Autre avis Geoffrey Crété
Hormis quelques amusantes idées et une envie de film d'aventure old school parfois charmante, Kong : Skull Island se résume à un blockbuster sans saveur, sans âme, et sans grande passion.
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Lecteurs

(3.4)

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commentaires
Ecla79
04/01/2022 à 04:50

Très bon film ce Kong skull Island. Loin du ton bobo intello ramollo du Godzilla de Gareth Edward, ce Kong au moins a le mérite d'offrir du grand spectacle et Visuellement c'est une claque. J'ai adoré.

Pat Rick
03/01/2022 à 12:14

Pour ma part ce film, dont je n'attendais rien de particuliers, a été une bonne surprise et il est même plus divertissante qu certains autres films du même genre qui ont plus de succès.

PAGANIZER
02/01/2022 à 22:48

Film fast-food destiné uniquement au grand public !
Si vous faites partie d'une autre catégorie de spectateurs aux attentes plus spécifiques et plus pointues, passez votre chemin..

DjFab
02/01/2022 à 20:53

Je l'ai trouvé très bon, le meilleur film du monsterverse !

bonsoirnon
02/01/2022 à 15:13

L'exemple parfait du downgrade blockbusterien de 2005 à 2015
entre KONG de Jackson et ce vulgaire KONG.
Probablement un dès films que j'aie refusé de voir parce que zéro attrait, ce qui est rare chez moi.
Là où Gareth Edwards avait une approche réaliste de Godzilla (Oui tout le monde voulait faire du Nolan à cette époque) et visuellement intéressant. Jordan Vogt-Roberts est sorti de son école de ciné avec l'idée du fan qu'il est de faire KONG dans Apocalypse Now avec du slow motion.
Dans les deux cas, les personnages sont ridicules. L'un une émotion serieuse qui frôle le grotesque (Binoche, "Let's them Fight") Bryan Cranston est génial tout de même, l'autre une parodie, Samuel L Jackson, John C. Reilly, Brie Larson.
On reproche beaucoup à Colin Trevorrow et son Jurassic World, mais contrairement à ces films, il y'a quand meme toujours une sorte d'ambiance Amblin et coté amusant, en déca certes, mais quand meme regardable, un certain équilibre.

X-or
25/10/2021 à 10:51

C'est assez drôle le niveau d'exigence attendu d'un film dont le seul objectif est de proposer du spectacle.
Vous attendez d'un film de Claude Sautet des dialogues de Judd Apatow ?
Je trouve que le film a bcp de qualités pour un blockbuster de ce type.
Le cadrage, la photographie, les effets spéciaux et les combats notamment.
Il est par ailleurs spectaculaire et rythmé.
À considérer comme un film 100%pop corn, il n'est pas honteux comme vous le prétendez.
Loin de là.

Ash77
22/04/2021 à 07:29

Vu une seconde fois hier. Là malheureusement j'ai bien vu les nombreuses faiblesses du film : film trop décousu, personnages mal dessinés à part la reporter (très déçu part le héros, on le présente au début comme un putain de badass ayant tout vu tout fait, et là arrivé sur l'île il est aussi empoté que les autres ! Alors qu'il aurait fait un sacré personnage). Mais tout n'est pas à jeter dans ce film, loin de là. L'image est très belle, l'action est bien présente, la 3d fait son petit effet, la bande son très bien. Ça aurait pu être un putain de bon film, quel gâchis !

cedman
25/03/2021 à 14:46

J'ai mis très longtemps à voir ce film, car j'avais entendu parler des critiques vraiment pas enthousiaste (c'est un euphémisme !) comme celle-ci, et c'est peut-être du coup à cause de mon manque d'attentes, mais j'ai trouvé le film très bon. Coté sentiments de Kong, j'ai toujours trouvé ça très con de l'humaniser à ce point et de lui donner une attirance pour de jolies blondes, qu'est ce qu'il espère faire avec elles, je veux dire....sérieusement ?! Le traitement comme un animal sauvage, une force/personnification de la nature comme ici me parait plus juste. On l'attaque, il se défend, on le laisse tranquille et ben, il fait pareil. Niveau des personnages humains, rien de nouveau sous le soleil, c'est le syndrome "transformers", bien que je trouve sympa le parallèle entre Kong et Pacard, deux êtres qui ne font finalement que se défendre (même si c'est plus personnel pour le militaire).... Enfin, comment ne pas parler de cette photographie ? Ces plans au soleil couchant, d'où se détache juste la silhouette de kong (largement teasés par la com), on sent bien ici l'influence de garreth edward et de son godzilla, avec d'un coté le coté bleu froid, et de l'autre le coté orange chaud, ça crée une espèce de cohérence entre les deux films, et ça justifierai (presque) le clash entre les deux ! Bref, dsl pour la critique longue, mais je voulais un peu réhabiliter ce film, qui ne mérite, si ce n'est votre admiration, au moins votre attention.

Zoleur
06/03/2021 à 14:21

100% d’accord , gros navet incompréhensible et déjà vu mais j’imagine que cela convient aux dan de marvel

L Pierre
21/01/2020 à 20:21

Arrêtez,critiques négatives...ce film est tout à fait FORMIDABLE avec des effets speciaux tellements minutieux et détaillés,entièrement scénarisés de plein jour, que je pourrais regarder les scènes de notre Kong à tous 100 fois de suite...vive le cinéma!!!???? L Pierre

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