Young Adult : critique
À l'heure où le geek est chic, le tatouage plus commun que l'acné, et Lady Gaga une icône mainstream, le moins que l'on puisse dire, c'est que la subversion est devenu un bien de consommation comme un autre, entendez par là : une denrée particulièrement rare dans sa forme sincère et originelle. Or, il n'est rien de plus agaçant que de surprendre un petit malin jouer au plus provocateur, surtout quand il s'évertue par derrière à composer une œuvre aussi bien pensante que sagement dans les clous. C'est l'arnaque à laquelle vous convie Young Adult, avec à la manœuvre Jason Reitman et Diablo Cody, le duo gagnant de Juno.
Charlize Theron joue avec délectation une ancienne gloire du lycée sur le point de se faner, flétrie par le stupre et l'alcool, soudain obsédée par son amour d'antan, qu'elle entend détourner de son existence fade, et de sa tendre épouse par la même occasion. Ses plans seront contredits par la réalité, et un ancien bouc émissaire devenu pochetron rondouillard. Ce postulat est celui d'une comédie romantique classique, et suivra le développement imposé par ce genre balisé, sans jamais en dévier d'un iota. Pour maquiller le dispositif, la mise en scène et le montage soigné s'efforcent de digérer les tics et usages des restes du cinéma indépendant américain, en y ajoutant le mauvais esprit et l'impertinence d'un Dr. House. La misanthropie ayant récemment prouvé son potentiel télégénique, chaque personnage recèle son lot d'apparentes turpitudes, de gros défauts et autres casseroles, tout en gardant par devers un soi un joker émotionnel systématique, capable de renouer avec l'empathie du spectateur.
Dès lors, ni la mise en scène maniérée de Reitman, ni les dialogues fignolés par Diablo Cody ne peuvent plus nous intéresser. L'amateur d'humour noir prendra très mal la véritable orientation du film, qui sous couvert de célébrer la hargne et la marginalité du personnage principal, n'entend rien d'autre que l'amener à la rédemption. Quant aux fanatiques de comédie romantique, ils seront déstabilisés par les oripeaux glauques de la chose, et ne comprendront pas pourquoi le love interest du film leur évoque plus ce cousin qui les tripotait dans le grenier de tonton Jeannot plutôt que leur prof de yoga.
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