Penchons-nous pour commencer sur Winterbottom (18 films ces 15 dernières années et pas que des bons). L’élégance de sa mise en scène ne fait qu’accentuer le malaise qui habite le film et plutôt que de proposer une série B de plus, il préfère livrer une analyse psychologique en profondeur d’un pervers qui n’en a pas l’air. Très rythmé au début pour aider le spectateur à rentrer dans cet univers qui ne nous est pas familier (le Texas des années 50), The Killer inside me prend ensuite son temps pour étudier son personnage si complexe. Lou Ford est un shériff adjoint qui a tout pour être heureux, ce qui lui donne des envies de meurtres. Lorsqu’il tombe amoureux d’une prostituée, il tombe aussi dans une spirale qui va réveiller des traumatismes d’enfance et qui va l’emmener à tuer.
Sans dégoût malgré l’ultra-violence de ses actes. Avec plaisir, même. Les conséquences ne se font pas attendre et les soupçons qui vont se jeter sur lui appelleront d’autres meurtres ; Winterbottom montre avec un grand sens de la narration l’étau se resserrer autour de Lou. Un mot sur les deux scènes dont vous entendrez forcément parler tant elles sont répugnantes – deux femmes sont battues à mort et à mains nues. Loin d’être gratuites, elles sont essentielles à l’histoire. A partir de là, trouveriez-vous normal que dans un film sur un meurtrier, ses meurtres soient édulcorés ? Certains spectateurs quitteront la salle, comme ils étaient partis pendant la projection d’Irréversible. Il serait pourtant très réducteur pour ne pas dire crétin de réduire les deux heures de The Killer inside me à ces quelques minutes. La violence psychologique est clairement celle qui a le plus intéressé Winterbottom et qui rend son film si grand et riche dans son traitement. Seulement voilà, Lou devient un monstre quand il tue, et il fallait le montrer tel quel. Ce n’est pas beau à voir, du tout.
Dure responsabilité pour son interprète principal qui porte tout le film sur ses épaules. Casey Affleck n’est pas une révélation pour autant. Nominé en meilleur second rôle dans le Jesse James d’Andrew Dominik, il s’était aussi fait remarquer dans Gone baby gone et dans une moindre mesure les Ocean’s 11, 12 et 13. Plus subtil dans le jeu que son frère ainé, Casey Affleck excelle dans le faux-semblant et livre une partition magistrale qui restera dans les mémoires. The Killer inside me étant un terrible échec commercial aux Etat-Unis, on le voit mal récompensé par une nouvelle nomination aux Oscar, mais ce ne serait pourtant que justice. Il est au passage bien entouré par des seconds rôles parfaitement crédibles, de Jessica Alba à Elias Koteas en passant par Kate Hudson et le Mentaliste Simon Baker.