Critique : Lola

Pierre-Loup Docteur | 13 juin 2010
Pierre-Loup Docteur | 13 juin 2010

Brillante Mendoza sert toujours le même propos (un état des lieux de la société philippine, où les habitants sont dans une situation d'extrême pauvreté), avec une histoire simplifiée à l'extrême filmée dans un style proche du documentaire (caméra à l'épaule, plans séquences donnant une impression de temps réel et conservation des bruits ambiants de la ville, y compris des plus pénibles). Pourtant, il varie systématiquement les figures qu'il met en scène. Dans Kinatay, un étudiant en criminologie était embarqué dans une sordide affaire de viol et de meurtre. Dans Lola, ce sont deux grand-mères (lola en philippin) qui remueront ciel et terre par amour pour leur petit-fils. Lola Sepa cherche de l'argent pour offrir des funérailles décentes à son petit-fils, poignardé. Lola Puring, la grand-mère du meurtrier, met quant à elle tout en œuvre pour le sortir de prison.

Brillante Mendoza s'intéresse alternativement à ces deux femmes se débattant en plein cœur de Manille. Ce n'est pas temps la confrontation inévitable des lolas qui motive le cinéaste, préférant prendre son temps pour décrire leur courage et leur pugnacité. Lorsqu'elles marchandent leur télévision contre quelques billets, dès qu'elles font des heures de voyage pour sortir de la ville ou quand elles luttent contre la pluie et le vent pour allumer une bougie, les deux grands-mères sont terriblement attachantes. Leur rencontre, repoussée à la fin du film, est d'ailleurs très touchante car mise en scène avec beaucoup de retenue et de justesse. Les deux grands-mères y apparaissent comme deux personnages dont la sérénité en de telles circonstances est admirable.

Alors que Kinatay mettait mal à l'aise en nous plongeant dans une ambiance sordide, Lola apparaît comme un film plus calme dans lequel les personnages ont gagné en humanité. Ces portraits croisés émeuvent et Brillante Mendoza confère une certaine poésie à des situations révélant une extrême précarité : il n'y a qu'à voir la scène d'ouverture avec la bougie ou les plans sur les habitations sur l'eau éclairées la nuit pour s'en convaincre. Lola est ainsi un beau film, assez optimiste même s'il dépeint sans concession les failles des institutions et le quotidien difficile de petites gens délaissées.

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