Critique : Le Temps de la kermesse est terminé
Chouette, une kermesse ! Un film coloré et chaud comme le désert africain ! Des enfants qui jouent et s'amusent de trois fois rien ! Des femmes à la peau si noire que leur sourire n'en ressort que mieux ! Il y a tout ça dans le premier film de Frédéric Chignac... ou presque. Le temps de la kermesse est terminé est en effet une oeuvre d'une noirceur insoupçonnée, projection métaphorique du rapport entre certains peuples africains et les vilains oppresseurs blancs. Situé dans un pays indéterminé, le film constitue une sorte de huis-clos en extérieur qui plonge l'anti-héros incarné par Stéphane Guillon au coeur d'un village africain très - trop - typique qui va finir par devenir un enfer pour lui.
Tout part d'une simple
panne automobile apparemment surmontable mais qui finit par prendre des
proportions bien plus importantes : apparemment victime de
l'incompétence des ouvriers locaux, voici notre aventurier (?) solitaire
contraint de séjourner dans une case à peine ombragée, avec pour seuls
horizons le frigo à bières du barman local et le popotin de Martina, la
femme canon du coin. Le film trouve réellement son ton lorsqu'il décrit
comment un type a priori sympathique va se transformer de façon pas si
progressive en un colon autoritaire et sans gêne, persuadé que tout lui
est dû et qu'il peut tout acheter. Connu pour son statut d'enfoiré
médiatique, Guillon excelle dans ce rôle mêlant à parts égales bonhommie
et inquiétude. Mielleux, faussement amical, ce type est une enflure
condescendante qui évoque sans détour nos bons vieux dirigeants français
qui traitaient et continuent à traiter le continent africain comme un
terrain de jeu où s'amuser sans conséquence.
Le soleil est réellement
écrasant, ce que la mise en scène ne manque pas de souligner, la
tension grimpe avec la température ambiante, et le film se fait de plus
en plus sombre et de moins en moins métaphorique pour se recentrer de
plus en plus précisément sur l'étrange relation qui unit Alex et
Martina, la jolie fille du village interprétée par une Aïssa Maïga à
l'anxiété communicative. Se crée une relation dominante / dominée moins
simple qu'il n'y paraît, mais qui finit par aboutir à un certain
ramollissement du personnage de Guillon, dont les scrupules soudaines
n'apparaissent que moyennement crédibles. Il faut dire aussi qu'après
cinq tentatives de faire repartir la voiture - et autant d'échecs -, le
spectateur est en droit de trouver les rebondissements légèrement
répétitifs. Reste que Le temps de la
kermesse est terminé parvient à surprendre jusqu'au bout par la
noirceur de son développement, sa conclusion abrupte n'échappant pas à
la règle.
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