Critique : Les Chèvres du Pentagone
Les fans d'Avatar - il y en a - n'en croiront pas leurs yeux : Les chèvres du Pentagone commence par un gros plan sur le visage buriné de Stephen Lang, qui incarne ici... un militaire. Après avoir défié le spectateur du regard, il finit par foncer dans un mur comme s'il était persuadé de pouvoir le traverser. La bonne grosse gamelle que se prend le vieux général n'est que le premier d'une très longue série de gags aussi frappants que surréalistes : Les chèvres du Pentagone n'est vraiment pas une comédie comme les autres. Le premier film de Grant Heslov, ami et collaborateur de George Clooney depuis des lustres, est aussi barré qu'impossible à résumer, mais c'est globalement l'histoire d'un journaliste qui enquête sur un programme militaire dans lequel sont recrutés des soldats aux pouvoirs psychiques rares, genre tuer des hamsters par la pensée. Ou des chèvres. D'où - en gros - le titre.
Inspiré d'un roman, le film joue la carte du
délire jusqu'au boutiste bidouillé entre potes. Sauf que les potes en
question ne sont pas vos collègues de bureau, mais des types nommés
Clooney, McGregor, Bridges ou Spacey. Et que le directeur de la photo se
nomme Robert Elswit, récemment à l'oeuvre sur - entre autres - There will be blood. C'est quasiment
là que le bât blesse, même s'il est assez difficile de reprocher à Grant
Heslov l'étendue de son carnet d'adresses : le film ressemble
régulièrement à la carte de visite d'un réalisateur persuadé de devoir
faire appel à ses nombreuses relations pour arriver à se faire
connaître.
Heslov a pourtant plus d'un tour dans son sac : il fait
preuve de cohérence et d'obstination dans le délire, croyant apparemment
dur comme fer au potentiel de son scénario. Celui-ci réserve en effet
son lot de personnages barrés et de situations surprenantes, le tout au
service d'un propos à peine voilé sur les ravages de la guerre sur ses
participants. Le personnage du grand Jeff Bridges (félicitations pour
ton Oscar, vieux), un vétéran reconverti en gourou, est sans doute le
plus drôle et le plus édifiant du lot. Reste que Les chèvres du pentagone n'ira jamais
vraiment au-delà de la petite folie sans prétention : trop bavard pour
parfois pas grand chose, il n'atteint des sommets comiques qu'à travers
une ribambelle de gags visuels fonctionnant principalement sur la
surprise. Chutes et accidents de voiture sans conséquence constituent la
principale ressource de ce film rigolo, truffé d'acteurs qu'on aime,
mais qui n'est ni M*A*S*H* ni Les rois du désert.
Lecteurs
(3.5)