Critique : Rien dans les poches

Sandy Gillet | 15 décembre 2008
Sandy Gillet | 15 décembre 2008

Rien dans les poches est la nouvelle fiction estampillée « création originale Canal + », un département que Fabrice de la Patellière dirige d'une main de maître depuis plus de six ans maintenant et qui peut se targuer d'avoir à son actif des films unitaires tels que le formidable Nuit noire, le dérangeant Opération Turquoise ou le polémique Rainbow Warrior ainsi que des séries (Engrenages, Mafiosa...) reconnues pour leur rigueur d'écriture et leur ton différenciant au sein d'un PAF que l'on sait encore bien trop policé.

 

Pourtant Rien dans les poches détonne non dans sa forme (la chaîne cryptée a déjà produit des fictions en deux parties destinées à son prime time) mais dans le fond. Pas question en effet ici d'aborder un sujet sensible ou tabou de notre histoire récente et nulle envie non plus de copier les recettes qui ont fait la réputation des chaînes du câbles aux Etats-Unis, HBO en tête. Non avec Rien dans les poches on est comme qui dirait en terrain connu soit un biopic fictif traité d'une manière réaliste. Ou l'histoire d'une star éphémère de la chanson devenue une mère digne et indigne dans la France des eighties jusqu'à nos jours. À l'écriture et derrière la caméra, Marion Vernoux dont c'est la première incursion sur le petit écran, et qui a été manifestement attirée par la propension propre à ce medium de pouvoir prendre son temps. En 2x110' elle se l'accapare ce temps pour donner justement corps à son personnage principal (magistralement interprété par une Emma De Caunes lumineuse), sorte de mixte sulfureux entre Caroline Loeb (pour le côté has been et qui en guise de clin d'oeil savoureux fait deux trois apparitions) et Muriel Moreno (la belle du groupe Niagara).

 

Au-delà ces quasi quatre heures sont aussi une sorte de laboratoire pour la réalisatrice qui tourne en caméra Bolex à manivelle, en Super 16, utilise des images d'archive en vidéo et en film, réalise un clip vidéo sur le mode Partenaire particulier pour un résultat façon maelstrom sonore et visuel ébouriffant mais parfois brouillon. Sans doute voulue ainsi à l'image de son héroïne qui nous convie à une sorte de voyage de l'intime rythmé par les épisodes les plus saillants de notre histoire récente. On est en terrain connu puisque la télévision (certes italienne) nous a donné récemment Nos meilleures années dont ce Rien dans les poches n'est autre qu'un ersatz réussi en mode mineure.

 

L'ambition n'y est en effet pas la même mais les intentions sont par contre bien là : nous faire revivre une époque sans nostalgie, donner vie à un personnage agaçant et attachant et rendre compte d'une envie de cinéma traitée différemment. On applaudit et on en redemande !

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