Critique : Jin-Roh, la brigade des loups
Réduire Jin-Roh à une pure réflexion Bergsonienne sur la condition de l'homme reviendrait à ne mettre en lumière que l'un des aspects primordiaux du film de Hiroyuki Okiura. Or, il ne faut pas oublier que si le talent du co-réalisateur de Cowboy Bebop irradie littéralement l'écran, c'est avant tout à Mamoru Oshii (créateur de Ghost in the shell et scénariste de Jin-Roh) que l'on doit la portée philosophico- politique de cette Brigade des Loups. Epuré à l'extrême tant dans son esthétisme que dans son rythme, Jin-Roh dresse le portrait glaçant d'un Japon post-Nagasaki où violences et psychoses y sont admirablement décrites comme les symptômes latents d'un pays au bord de l'implosion. C'est sous couvert d'une métaphore, certes appuyée mais ô combien appropriée, que le duo Oshii/Okiura dresse l'état des lieux glaçants d'une société traumatisée où toute notion du bien et du mal se voit recouverte du voile gris de l'ambivalence.
On retrouve dans Jin-Roh toutes les obsessions d'Oshii : une quête perpétuelle de l'humanisme (inhérente à tous ses personnages) ainsi que le rapport quasi organique liant l'homme à la machine comme une mue logique voire inévitable. A cela s'ajoute un lyrisme inattendu au vu de son sujet mais traduit par des séquences d'une incroyable fulgurance promptes à marquer longtemps notre inconscient cinéphilique jusqu'à son bouleversant final.
Passionnant film d'espionnage, glaçant brulot social, Jin-Roh est tout cela et bien plus à la fois : un cri d'alarme aux multiples couches de lecture, certes quelque peu prévisible scénaristiquement mais suffisament prenant pour interpeller durablement le spectateur.
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