Critique : American dreamz

Flore Geffroy | 24 avril 2006
Flore Geffroy | 24 avril 2006

Heureux réalisateur d'American Pie, Pour un garçon et En bonne compagnie, Paul Weitz était attendu au tournant pour son nouvel opus, dont l'argument principal de vente promettait moult merveilles satiriques et dézingage en bonne et dûe forme d'une certaine idée de l'Amérique. Ce serait donc, sur le papier, une farce poilante, qui s'en prendrait à un Président plus benêt que nature et dégringolant dans les sondages, un aide de camp plus manipulateur que le vrai, une émission de télé populo pour découvrir aujourd'hui les talents de demain, des beaufs scotchés sur leur canapé devant la petite lucarne et conquis par des erzatz de stars en devenir. Pour lier la sauce, on prendrait un échantillon – évidemment – représentatif de la diversité de cette Amérique goulûe de ces paillettes qui font oublier cette lointaine guerre (d'Irak), ailleurs. Puis, vertus du scénario aidant, on ferait la comique démonstration que l'Amérique de ce début de siècle, vraiment, a perdu le sens des priorités. Du pain, des jeux : voilà à quoi carburent les Américains, ces grands enfants naïfs.

Alléchante les vingt premières minutes, la farce caricature à tour de scènes des personnages clichés dont les airs de ressemblance avec des personnes existantes ne sont absolument pas fortuits. Et ça marche dans un premier temps, surtout grâce aux numéros parfois réjouissants des comédiens, Dennis Quaid en tête. Avec ses airs de W. Bush, il mérite le détour, qu'il gobe ses pistaches ou découvre hébété que le monde n'est peut-être pas binaire ; Mandy Moore, en donzelle pulpeuse d'un bled paumé de l'Ohio, se la joue pile poil très future Britney Spears, les dents aussi étincelantes et la lippe aussi gourmande ; Sam Golzari rend Omer, djihadiste raté et chanteur de pacotille, décalé comme un poisson pédalant à l'envers sur une bicyclette. Et puis il y a Hugh Grant, à la fois irrésistible et crispant. Il est cette fois Martin Tweed, présentateur vedette imbu de sa personne, frimeur, rouleur de mécaniques, dandy cynique et redouté. Mais il pourrait aussi bien être à nouveau Daniel Cleaver dans Le journal de Bridget Jones ou Will dans Pour un garçon, tant il joue ad lib le même type de personnage (message personnel : Hugh, s'il vous plaît, prenez des risques parfois, on aimerait bien vous voir à contre-emploi).

Les premières gorgées de ce cocktail digérées, on guette avidemment la pointe de férocité qui va sceller ce début prometteur de satire, dont l'intention semble bien être le pastiche ravageur de la politique, de la télévision et de l'Oncle Sam. Las. Gentil, facile, vaguement paresseux, le film s'emberlificote peu à peu dans le sketch sans fin, en une série de saynètes très inégales. Si on sourit souvent, on ne se gondole pas vraiment. En terme de satire sur le dysfonctionnement de l'Amérique, American dreamz manque ainsi sa cible faute d'avoir su se montrer réellement corrosif. Tout le contraire de la vraie et bonne comédie satirique du moment (aux USA du moins), Thank you for smoking (NDR, la critique bientôt dans ces pages).

Résumé

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(0.0)

Votre note ?

commentaires
Aucun commentaire.
votre commentaire