Deauville Asia 2014 : la Claque, la vraie

Simon Riaux | 8 mars 2014
Simon Riaux | 8 mars 2014

On ne va pas se mentir. Il y a quelques heures à peine, l'auteur de ces lignes n'était pas sûr de vous offrir son compte-rendu journalier, pourtant attendu de pied ferme par la communauté Auvergnate en exil de par le monde. On se demandait alors s'il fallait centrer le dit papier sur une anecdote couleur locale, se la jouer pisse froid, ou faire croire à la rédaction que la connexion internet de l'hôtel Normandy venait soudainement de disparaître. Mais tout cela, c'était avant la projection de Han Gong-Ju (qui vient d'être acheté et devrait connaître dans les prochaines heures un titre français).

Le film, surnommé par votre serviteur « la-claque-du-festival-que-si-elle-est-pas-récompensée-on-fout-le-feu-à-la-cantine » est une belle gifle, de celle qu'on n'attendait pas, surtout au vu de son sujet. Il y est question d'une toute jeune fille, pas encore sortie de l'adolescence, qui après avoir été au centre d'une affaire de mœurs, se voit transférée dans un nouvel établissement scolaire et tente de se reconstruire.

 

Première réalisation de Lee Su-Jin, le métrage est un mélange inattendu de pure maîtrise et de liberté. Adoptant totalement le point de vue de son héroïne, le récit nous place dans la peau d'une enfant devenue femme, décidée à reprendre sa vie en main, malgré une société coréenne dominée par des instincts de clans et des réflexes patriarcaux. Ce canevas ouvrait la voie à un récit désespéré, appelait presque naturellement les bouffées de violence qui ont façonné une image réductrice du cinéma coréen. Heureusement, l'œuvre qui nous intéresse ne joue pas dans cette cour balisée.

Illuminé d'espoir, Han Gong-Ju se focalise sur la force de son personnage principal, l'incroyable pulsion de vie qui la pousse à dépasser son trauma. Et si l'horreur envahit régulièrement le cadre, jusqu'à contaminer totalement les protagonistes, le spectateur n'est jamais en présence d'un récit dépressif, qui lui jetterait sa neurasthénie cyclothymique à la figure. Au contraire, cette histoire nous confronte à l'espérance, à son échec certes, mais à sa puissance revigorante. Grâce à des comédiens et une direction artistiques qui préfèrent embrasser la réalité plutôt que la conformer aux désidératas du cinéma d'auteur, le film s'avère d'une puissance euphorisante. Le métrage n'a de cesse de se recentrer sur l'humain, pour mieux nous offrir un conte, évidemment ténébreux, mais férocement féminin plus que féministe.

La team EL n'a pas pour habitude de substituer son compte-rendu festivalier à une critique, mais il semble bien difficile de vous parler de Mater Dolorosa, un parrain pour les nuls philippin ou de Nagima, la preuve que le Kazakhstan n'est pas une destination de vacances fiable, tant la dernière œuvre présentée aujourd'hui en compétition les écrase.

 

 

Nous vous en diront plus dès que le film bénéficiera de son titre français. Et l'anecdote me direz-vous ? Nous pourrions vous parler de ce majordome du Normandy toujours partant pour siffloter du Franck Michael, mais nous préférons vous évoquer un autre énergumène, dit le « Marcel fringant ». Toujours vêtu de quelques centimètres de tissu, le sac à dos chargé de vodka bon marché qu'il sirote avec la discrétion d'un mafieux russe, il parle à sa compagne,  à voix haute, au téléphone durant les séances... Et à en croire ses onomatopées offusquées, cette dernière n'est pas trop motivée pour le rejoindre à Deauville. Quiconque fréquente régulièrement les toilettes du Festival l'aura entendu expliquer à sa chère et tendre sa façon de penser. On ne désespère pas de vous offrir un fac similé de ses conversations téléphoniques, qui feraient passer Joeystarr pour un cathéchiste.

 

 

 

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