François-Xavier Demaison (Sans laisser de traces)

Didier Verdurand | 10 mars 2010
Didier Verdurand | 10 mars 2010

Dans Sans laisser de traces de Grégoire Vigneron, François-Xavier Demaison interprète Patrick Chambon, un type plutôt banal au premier abord mais qui va rapidement se révéler comme le poil à gratter de ce thriller étonnant. On a décidé d'en faire autant avec des questions au départ assez classiques puis d'autres, plus inconfortables...

 

Comment choisissez-vous un scénario ?

D'abord je le lis ! Je le trouve bon ou non, ensuite je m'attarde sur le rôle qu'on me propose et si je me sens attiré, je rencontre le réalisateur et on en discute. Pour Sans laisser de traces, c'est un cas un peu particulier car Grégoire Vigneron était scénariste avant d'être metteur en scène - il a écrit avec Laurent Tirard Prête-moi ta main, Mensonges et trahisons, Molière et Le Petit Nicolas. C'est à l'occasion du tournage de ce dernier que je l'ai rencontré avec Laurent Tirard et qu'ils m'ont proposé d'interpréter Patrick Chambon, ce type un peu dangereux malgré lui. « Tu vas voir, ça va te changer de ce qu'on a l'habitude de te proposer. » C'est en effet dans un registre un peu décalé, plus noir et sombre. Connaissant la qualité de l'équipe, je me suis laissé convaincre facilement.


On vous propose souvent le même type de rôle ?

J'essaie de ne pas m'enfermer dans une catégorie pour qu'on ne m'envoie pas toujours la même chose et j'ai l'impression que ça marche car entre Coluche, le Bouillon dans Le Petit Nicolas et ce Patrick dans Sans laisser de traces, il est difficile de trouver des points communs. Même le curé dans Neuilly sa mère est un clin d'œil pour montrer que je peux élargir ma gamme. J'aime me transformer, c'est déjà ce que je faisais dans mes spectacles alors je veux continuer sur cette lancée pour toujours surprendre le public. C'est le meilleur moyen pour éviter la lassitude.

Votre rôle est secondaire mais quand on vous voit, vous êtes un « voleur de scène ».

L'histoire montre le point de vue du personnage de Benoît mais le mien la relance à chaque intervention à cause de ses actes incontrôlables et sa personnalité incontrôlée. C'est un impulsif, un instinctif, il est un peu le double pulsionnel de Benoît. Il en devient attachant tellement il n'a pas de limites. Il n'est pas manipulateur mais dangereux malgré lui, ce qui nous éloigne un peu du film de genre où en général, dans un thriller, il y a souvent un manipulateur. C'est un thriller, mais psychologique car le suspense vient autant de l'intrigue que des personnages qui sont imprévisibles. Je trouve ça intéressant.

Quand on a peu de scènes, on n'est pas tenté d'en faire trop, ce que vous évitez d'ailleurs parfaitement ?

Non, car on ne se rend pas compte qu'on a peu de scènes. Je suis surtout conscient que mon rôle participe directement à l'histoire. Mon personnage est en retrait mais c'est lui qui vient titiller Benoît sur son terrain et qui le fait avancer. J'ai proposé à Grégoire de rester dans la retenue et de ne pas tomber dans le démonstratif. Il n'y a aucune frustration quand l'importance du rôle est aussi délicieuse. Il fallait être sincère, comme un enfant.

Un mot sur l'affiche ?

J'adore. Mais je ne voudrais pas que les spectateurs s'imaginent que c'est un film d'action. Ce n'est pas Banlieue 13. Encore une fois, c'est un thriller psychologique et j'espère que le public se laissra tenter car il ne sera pas déçu, c'est un bon film.


Vous pensez au facteur box-office quand vous choisissez un rôle ?

J'ai été dans des succès comme Le Petit Nicolas, en tête des film français l'année dernière avec plus de 5 millions d'entrées, et j'ai fait d'autres films qui ont fait moins. On verra pour celui-la mais je me doute que ce n'est pas le genre qui attire les familles le samedi soir.

Quand on fait des recherches sur vous dans Google, on tombe sur pas mal d'articles qui parlent de la polémique qui a accompagné la sortie de Coluche. Quel est le fin mot de l'histoire ?

Je n'ai pas très envie d'en parler, pour moi c'est vraiment du passé. Je garde un magnifique souvenir de cette aventure, de ma rencontre avec Antoine De Caunes et de mon travail salué par une nomination au César. Maintenant, je comprends l'émotion suscité à la sortie... C'est indissociable de l'exercice du biopic.


(On ne va pas insister pour ne pas réveiller le Patrick Chambon qui sommeille, ça pourrait se terminer en meurtre) Dans ces recherches, j'ai vu aussi qu'Audrey Tautou était dans votre promotion aux Cours Florent. C'est pour ça que vous avez décidé de changer de voie et de devenir avocat fiscaliste à New York ?

(Rires) Pas du tout ! Elle était déjà extraordinaire, son charisme était incroyable. Elle est une grande actrice et elle n'est pas internationale pour rien.

Vous avez vécu le 11 septembre à New York. Qu'avez-vous pensé de World Trade Center d'Oliver Stone ?

Je ne l'ai pas vu.

Comment vous réagissez aux propos tenus par Bigard et Kassovitz sur l'attentat ?

Ils ont le droit de s'exprimer. Ce n'est pas parce que j'était à New York que j'ai plus de légitimité pour m'exprimer sur le sujet. Tout le monde se rappelle de ce qu'il faisait ce 11 septembre 2001, je ne suis pas le seul dans ce cas ! J'ai été témoin des conséquences mais je n'en sais pas plus qu'un autre sur les causes.

Qu'est-ce que ça fait de jouer devant 7 personnes dans une salle de 500 places ?

C'est un grand moment de solitude. Tu sers les poings, tu tiens le coup. Il y a eu aussi des moments magiques parce que ces 7 personnes étaient emballées. Evidemment c'est dur d'entendre les applaudissements à la fin, tu fantasmes sur Gilbert Bécaud devant un complet à l'Olympia !

Vous avez passé un casting pour le Da Vinci Code ?

Oui, pour jouer un flic. Ron Howard m'a sorti un grand « Excellent ! » (avec l'accent, Ndlr). C'est tout ce qu'il a dit et je ne l'ai plus jamais revu depuis ! Mais je ne regrette rien, l'avoir rencontré au Lutécia reste un souvenir. Je n'ai pas passé d'autres castings pour des américains et j'aimerais beaucoup, surtout que je me débrouille quand même en anglais... Mais la caricature du français ne m'intéresse pas. Le maître d'hôtel qui va servir des tournedos rossini toute la journée dans un palace, non merci.


Le César raté, c'est digéré ?

Vincent Cassel le méritait largement et puis il a une quinzaine d'années de métier derrière lui. Ma carrière est déjà assez fulgurante comme ça pour que je puisse me plaindre. La nomination en soi était déjà une source immense de satisfaction.

À choisir entre figurer dans le Top 10 des comédiens les mieux payés et un César, quel est votre préférence ?

Un César. Je fais ce métier par choix. Mes démarches sont purement artistiques. Alors bien sûr, c'est un métier bien payé quand on réussit, mais ce n'est pas ma motivation.

Vous avez connu récemment le premier échec de votre carrière au cinéma, Divorces (156 187 entrées).

Le film est réussi mais le thème a fait fuir. Il suscitait plus l'émotion que la comédie. Si beaucoup de gens se disent que ce n'est pas un film à aller voir avec sa fiancée, on passe à côté du public. Je me consolais avec Le Petit Nicolas, qui cartonnait au même moment.

Vous n'avez plus de points sur votre permis de conduire ?

Hé oui. Faut être patient. Je vais faire en sorte de les récupérer, enfin j'espère. De petits mais nombreux excès de vitesse en sont la cause. Je me suis payé 3 ou 4 fois le même radar à un endroit bien spécifique, deux points par-ci, deux autres par-là et ça va vite. J'ai zappé les stages et un jour ça tombe, c'est assez inconfortable comme situation. Mais c'est provisoire.

On a parlé de vous pour interpréter Obélix dans le prochain Astérix ?

C'est une rumeur. Je connais très bien la nouvelle équipe, puisque c'est celle derrière Le Petit Nicolas, mais personne ne m'a jamais rien proposé.

 

Propos recueillis par Didier Verdurand.

Photos de Côme Bardon.

 

François-Xavier Demaison est l'une des 72 personnalités qui ont accepté de donner un de leurs meilleurs souvenirs dans le très beau livre de Didier Audebert et GianniSoglia, Des souvenirs pour mémoire. 2 euros par exemplaire vendu seront donnés à l'Institut du Cerveau et de la Moelle épinière pour faire avancer la recherche sur la maladie d'Alzheimer.


 

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