Sergio Martino
Sergio Martino est un des réalisateurs marquants du cinéma bis italien des années 60 aux années 80. Très rapidement et juste avant son départ du dernier festival de Valenciennes, le réalisateur nous livre un court entretien où il nous livre son point de vue sur le cinéma italien et revient sur sa carrière.
Vous êtes invité au festival de Valenciennes pour la
rétrospective du cinéma de genre italien. Quel regard portez vous sur
ce cinéma aujourd'hui ?
Evidemment, j'ai un regard nostalgique car j'étais jeune lorsque j'ai
fait ces films. J'ai vécu une période très extraordinaire du cinéma
italien car il avait une aura incroyable dans le monde entier. Notre
cinéma, spectaculaire, d'action était fait pour tout le monde ; j'ai vu
mes films à Hong Kong, en Amérique du sud, à New York,... J'ai connu le
succès aux Etats-Unis alors que c'est très difficile d'avoir son film
projeté en dehors des salles d'art et d'essai là-bas pour un européen.
À l'époque, avec ces films, une véritable compétition économique, avec
les films d'action américains, était possible. À la fin des années 80,
notre cinéma a reculé parce qu'il n'a pas su renouveler ses
techniciens. Les effets spéciaux étant une tradition d'antan aux
Etats-Unis, l'Italie les a découvert bien plus tard ; l'Etat donnant
aucune subvention à ce genre de films, les techniciens ont commencé à
manquer d'où la chute du cinéma de genre en Italie. Il y a des cinémas
comme celui de la France ou de l'Espagne qui bénéficient de l'aide de
l'Etat pour les films d'action, chez nous, personne n'y pense.
Que pensez-vous de la redécouverte du public pour ce cinéma ?
J'en suis très heureux. Je suis ravi de voir des metteurs en scène
espagnols ou américains tels que Quentin Tarantino rendre hommage à
cette période du cinéma. Aujourd'hui, je travaille beaucoup à la
télévision (séries TV et feuilletons) mais j'espère revenir l'année
prochaine au cinéma avec un film d'action.
Quel regard avez-vous sur le cinéma italien aujourd'hui ?
Au point de vue industriel, c'est plutôt mauvais parce qu'aucun auteur
a continué notre cinéma. Aujourd'hui en Italie, on essaye surtout de
faire de la comédie car c'est un genre qui a toujours bien marché chez
nous ou des films d'auteur qui ne marchent pas pour la plupart très
bien en Italie mais aussi à l'étranger. Il y a quatre ou cinq auteurs
pour qui ça fonctionne bien ; vous avez Roberto Benigni, Nanni Moretti
qui ont du succès partout dans le monde
.mais comparer à la quantité de
films réalisés dans les années 70-80 et qui ont marché, ce n'est rien.
Avez vous vu Romanzo Criminale ?
Finalement, il y a quelques auteurs comme Placido qui, là, a fait un
film dont l'esprit est universel. Il faut dire que c'est un film
d'action tiré d'un bon livre, Romanzo Criminale, qui donne un regard particulier sur une période très importante de la ville de Rome.
Quel rapport gardez-vous avec l'actrice Edwige Feneck ?
Nous sommes toujours amis. Elle était la femme de mon frère lorsque je
la faisais tourner dans mes films, c'est pour cela qu'elle tournait
beaucoup à cette époque, aussi bien pour moi que pour mes collègues. Je
l'aimais plus en tant qu'actrice de comédie qu'actrice de thriller
parce que son visage était trop « solaire » pour faire des films de ce
genre. Sa beauté était trop importante pour des films qui évidemment,
utilisaient en priorité sa plastique. Elle s'en est bien sortie mais je
l'aimais beaucoup plus dans mes comédies en particulier Mademoiselle cuisses longues (1973) et Sucre, miel et poivre (1980). Elle était parfaite pour ces rôles.
Mais aujourd'hui vous gardez toujours contact avec elle ?
Oui. Il y a dix ans, elle a produit une série télévisée en quatre
épisodes que j'ai réalisé et qui a eu beaucoup de succès. J'ai
d'ailleurs utilisé quelques acteurs allemands et français dont Annie
Girardot (NDLR Annie Girardot était présente également au festival pour un hommage à sa carrière).
Quel est le meilleur souvenir que vous gardez d'un de vos films ?
J'ai eu la chance de faire tous les genres de films alors je ne peux
pas avoir un meilleur souvenir. Mais si je dois choisir quelques films
parmi toute ma filmographie, ce serait La bellissima estate (1974) qui est un film sentimental que j'aime beaucoup, Torso (1973) qui est un thriller et Rue de la violence (Milano Trema, 1973) qui est un film policier sur Milan au moment des Brigades Rouges.
Avant de partir, Sergio Martino me fait part d'une interview où il raconte comment il a rencontré Bruce Lee. Malheureusement elle ne s'adresse qu'aux italophones, ici, et aux germanophones là. Ceux qui veulent absolument la lire en français, devront passer par Google qui peut vous traduire la page mais attention aux traductions littérales (exemple Run Run Shaw devient Court court Shaw...).
Propos recueillis par Flavien Bellevue.
Portrait de Sergio Martino par Flavien Bellevue.
Remerciements à l'équipe d'André-Paul Ricci et aux organisatrices du festival de Valenciennes: Patricia Lasou, Sylvie Lemaire et Patricia Riquet.