L'Etrange Festival 2012 - 3ème Partie

Patrick Antona | 15 septembre 2012
Patrick Antona | 15 septembre 2012

Déroulant sa programmation vouée au renouveau du cinéma de genre et dit bizarre, tout en gardant un œil sur le passé par le biais des cartes blanches confiées aux réalisateurs invités et autres Pépites, l’Étrange Festival 2012 s’est illustré cette semaine par une prime versée aux premiers films de qualité ,ainsi qu’à la comédie dans des registres bien variés.

Illustrant avec brio l’adage que la valeur n'attend pas le nombre des années, Juan Carlos Medina se fend dans son premier long-métrage Insensibles d’une merveille de film fantastique, à la croisée du mélodrame et de la chronique historique qui a touché le public et une bonne partie de la rédaction (sauf Sandy... Et Simon). Vous pouvez lire notre critique ici.

 

 

Autre jeune réalisateur mais dont la filiation imprime sa marque indéniable sur le résultat final, Brandon Cronenberg (donc fils de David) traite dans son film Antiviral des liens qui unissent la chair à fascination morbide de la célébrité. Si l’idée originale et nauséeuse d’une société médicale qui prospère sur la vente et l’inoculation de virus cultivés sur la peau de célébrités à des fans hardcore réussit à prendre au début, on peut reprocher à Brandon Cronenberg un manque de métier quant à la caractérisation de ses personnages et une austérité qui met le spectateur de côté. Prenant un nouvel angle pour traiter du  thème de la "nouvelle chair" et adoptant une trame qui rappelle furieusement Videodrome, Brandon Cronenberg évite l’hommage servile à l’œuvre de papa par quelques fulgurances bien tordues. Mais il étouffe toute ambition avec une dernière partie brouillonne qui noie son sujet prometteur. Brandon un talent de cinéaste encore en construction !

 

 

Autre premier long-métrage mais à classer dans le registre du polar noir, Black’s Game de Óskar Thór Axelsson a le mérite de nous narrer une histoire de maffieux bien originale car se situant en Islande. Ici, point de geyser ni de troll mais une immersion totale dans un monde de petits truands prospérant sur le trafic de drogue et les braquages. Si l’approche des personnages et la stylisation rappelle la série des Pusher de Nicolas Winding Refn (ici producteur exécutif), le destin collectif qui nous est narré penche plus vers le récit de groupe à la Martin Scorsese mais auquel il manque un bon rythme pour pouvoir imprimé durablement sa marque. Une bonne dose de violence et la beauté de María Birta (parfaite dans le rôle de Dagny la prostituée perdue) laisse quelques os à ronger mais cette saga criminelle laissera quelque peu sur sa faim un public de l’Etrange venu voir quelque chose de plus saignant.

 

 

Au programme des réjouissances que l’on peut qualifier de "autre", la palme du psychotronique absolu revient à la super-production fantastique indienne de l’année : Eega. Que ceux qui ont jeté un œil sur la bande-annonce ne soit aucunement surpris, le résultat final assume parfaitement son postulat complètement idiot mais ô combien jubilatoire : un film de vengeance où le héros se réincarne en mouche belliqueuse et adepte des arts martiaux ! Preuve que le cinéma venu d’Inde (et plus précisément telougu pour Eega) peut tout se permettre avec une assurance qui réussit à faire passer quelques grosses maladresses. Le film de S.S. Rajamouli verse dans le surréaliste et le spectaculaire avec une générosité et une maîtrise technique affirmée qui en laissera plus d’un pantois. S'il faut se coltiner une première partie de romance à l’eau de rose savamment corsée, l’heure et demie suivante est un véritable festival d’humour et d’action qui versera même, dans son final explosif, dans du John Woo de la grande époque ! Et réussir à faire d’une mouche l’équivalent d’un Steven Seagal ou d’un Chuck Norris tout en faisant passer la métaphore de la revanche des petits face à l’oppression des nantis corrompus n’est pas un des moindres exploits réussis par cette nouvelle perle venu du pays de Gandhi. Un vrai film de gauche en fait !

 

 

Toujours dans le domaine de la comédie, l’espagnol Game of Werewolves (Lobos de Arga dans la langue de Cervantès) ne révolutionnera pas le genre du film de loup-garou mais réussit à évoquer avec respect les productions des années 80 telles que Hurlements ou Le Loup-garou de Londres mais aussi celles du patrimoine local comme la saga de l’Hombre-Lobo aka Paul Naschy . Servi par un duo d’excellents acteurs (Secun de la Rosa et le désormais renommé Carlos Areces) sur qui repose  la dynamique comique du film, Game of Werewolves faiblit malheureusement dans sa seconde moitié à cause d'une perte de maîtrise au niveau de la narration et d’un climax bien faible. Mais on peut être conciliant au vu du résultat final, du maquillage des loups-garous au look délicieusement rétro (et à mille lieues des horreurs numériques de Twilight) et à l’humour gouleyant, dont quelques gags bien sentis sur les penchants zoophiles des bergers.

 

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