LA BELLE ÉPOQUE
En 2023, le roi Shahrukh Khan récupérait son trône en signant avec Pathaan le plus gros succès de l’histoire du box-office hindi. Mais aussi absurde que cela puisse paraître, il ne s’agissait même pas de son projet le plus ambitieux de l’année. Ses fans attendaient bien plus impatiemment la sortie de Jawan, un blockbuster mystérieux dont même les bandes-annonces ne dévoilaient que peu de choses sur l’intrigue.
Si Jawan était attendu à ce point, c’est avant tout parce qu’il incarne l’aboutissement du renouveau du cinéma indien. Longtemps divisé de manière très marquée en industries régionales, le septième art local tente depuis plusieurs années de créer des films visant toute la nation. Des longs-métrages réunissant le cinéma hindi, tamoul ou encore télougou pour toucher un public bien plus large.

C’est évidemment un enjeu majeur que le cinéaste Atlee a parfaitement saisi avec Jawan. Pour sa première production bollywoodienne, le réalisateur tamoul montre immédiatement qu’il sait comment s’adresser à un nouveau public. Il nous plonge ainsi dans un récit de justice et de vengeance qui rappellera aux nostalgiques le cinéma hindi des années 70 et 80, l’époque qui avait fait du grand Amitabh Bachchan l’incarnation même du héros en colère. Mais le style de mise en scène et l’ambition visuelle assument indéniablement un héritage kollywoodien.
Comme tout film masala qui se respecte, Jawan joue avec les genres. Plus qu’une simple formule appliquée de façon mécanique, Atlee pousse l’expérimentation à un niveau encore rarement atteint dans le cinéma indien. Son film est une course effrénée qui passe en un rien de temps d’un registre à l’autre, d’une esthétique à l’autre.

Le long-métrage nous balade ainsi entre blockbuster d’action ultraviolent et romance naïve. Une séquence de drame familial apparaît pour être rapidement chassée par de la comédie, du polar ou encore du film de casse. Impossible de ranger cet objet insaisissable dans une case tant sa générosité à toute épreuve force le respect. D’autant que cette expérience chaotique parvient à ne jamais être décousue grâce à un sens aigu du montage et du découpage.
En cinq films à peine, Atlee s’est imposé comme un auteur incontournable dans le paysage du blockbuster indien. Avec Jawan, cet ancien élève du génie Shankar (2.0, I) retrouve ses obsessions habituelles : doubles rôles, retour en arrière qui change les enjeux du récit et rebondissements ininterrompus. Mais c’est du côté de l’exécution technique que le cinéaste semble avoir enfin trouvé sa voie. S’il assume toujours explicitement ses inspirations, notamment le cinéma de Lokesh Kanagaraj, il se forge une identité visuelle unique et extrêmement riche.

TOUJOURS PLUS FORT
En quelques années à peine, les différentes industries indiennes ont produit des films d’action absolument fous. On pense évidemment au colossal RRR mais aussi à Vikram, Pushpa ou encore la franchise K.G.F. Face à de telles références, il semble difficile d’apporter un quelconque renouveau à la formule du masala d’action. C’est pourtant le défi impossible que Jawan remporte haut la main.
Pour se démarquer, Atlee décide de prendre tout ce qui fait la folie du blockbuster indien et de multiplier les codes par cent. Le héros doit faire une entrée marquante à l’écran ? Shahrukh Khan aura droit à une bonne dizaine d’introductions iconiques dans un seul film. La séquence avant l’entracte doit marquer les esprits ? Celle de Jawan ferait pâlir le grand final de n’importe quelle super-production. Chaque séquence d’action semble d’ailleurs réfléchie comme un final explosif.

Si les séquences chorégraphiées se font plus rares en Inde avec des blockbusters occidentalisés comme Pathaan, Atlee revendique plus que jamais son identité indienne. Grâce au compositeur de génie Anirudh, Jawan bénéficie d’une bande-originale survoltée. Chaque chanson vient traduire avec force l’énergie ridiculement démesurée du film.
Force est d’avouer qu’avec ses trois heures de spectacle ininterrompu, Jawan souffre de quelques sorties de piste. Le dernier quart d’heure en particulier peine à conclure un récit si dense et semble hésiter sans trancher entre émotion et grand spectacle. Mais l’expérience est tellement intense que ça n’a plus la moindre importance à ce stade. À l’issue du film, les spectateurs quittent la salle en étant à la fois surexcités et épuisés, conscients d’avoir encaissé l’équivalent de 5 ou 6 blockbusters en une séance.

J POUR JUSTICE
En plus de trente ans de carrière, Shahrukh Khan s’est forgé une filmographie passionnante dont le propos métatextuel peut évoquer une réponse indienne à la carrière de Tom Cruise. Jawan ne fait pas exception à la règle. Le film réagit notamment aux problèmes judiciaires de son fils Aryan Khan dans une relecture particulièrement intense de leur relation père-fils.
À une époque où les actrices servaient de décoration dans le cinéma indien, Shahrukh Khan a toujours tenu à donner des rôles puissants aux femmes qui ont traversé sa filmographie. Jawan semble être le pinacle de cet engagement. On y trouve un héros d’action constamment secouru et sauvé par les femmes qui l’entourent. Qu’il s’agisse de Nayanthara, de Deepika Padukone ou du gang de prisonnières, chaque actrice a son moment de gloire. Une prise de pouvoir féminine qui revigore complètement le cinéma indien.

Mais plus important encore, le film est certainement le blockbuster le plus politique de ces dernières années. Atlee tire sur tout ce qui bouge en abordant de front les suicides des agriculteurs, la corruption des élites, les violences policières, le communautarisme ou encore l’état lamentable des hôpitaux publics. À l’heure où les films de propagande de l’extrême-droite hindoue fantasment une Inde parfaite, Jawan utilise le divertissement comme cheval de Troie pour remettre les pendules à l’heure.
Si le cinéma tamoul est resté plus libre politiquement parlant, cela fait déjà plusieurs années que Bollywood s’auto-censure pour éviter les polémiques, les interdictions et les attaques médiatiques. Aidé par un cinéaste confiant et intrépide, Shahrukh Khan rappelle que s’il est le roi de son industrie, c’est aussi parce qu’il n’a jamais cédé lâchement à la pression de l’époque. En résulte un geste courageux, utopiste et terriblement attachant. La joie indescriptible de voir une légende du cinéma triompher pour les bonnes raisons.

Je l attends avec impatience.
En France, nous ne sommes pas gâté avec nos films. Il faudrait que les films de Shah Rhukh Khan prennent une place importante.
Bonjour,
J’ai tenu une demie-heure. Je ne comprends pas votre critique « admirative »! Bon, je vais réessayer
@PonniyinSelvan : Merci pour cette précision cruciale ! Aborder le cinéma indien par ce qu’on lit sur les réseaux sociaux est extrêmement délicat… Entre les tensions entre industries régionales, les tensions politiques et religieuses, ou encore les guerres de fans, le cinéma indien est pollué par les fakes news et les guerres de communication sur internet.
En connaissant bien la filmographie d’Atlee et les techniques du studio Red Chillies, on sait qu’il n’y a absolument aucun fondement derrière ces accusations de payer les critiques. Le film continue de faire bien plus fort que Pathaan en Inde, la preuve comme tu le dis qu’il y a une très large acceptation de la part du public « neutre ».
Mouais , si le film était vraiment nul , malgré les commentaires positifs , ils se seraient casser la gueule au box office après 3 jours .
Enfin en Inde , l’antagonisme entre les fans de diférent acteurs est tellement grand , qu’il y a aussi le cas inverse . Des gens propagent des mensonges pour nuire aux films des acteurs concurrent de leur star . Pour RRR , il y a beaucoup de tweet indiquant que Rajamouli payaient les américains (sic) pour dire que le film était formidable …
SRK est particulièrement détesté par les fondamentalistes hindous , je ne suis pas étonné qu »ils propagent des conneries
@Serievore
Je sais pas si c’est censé s’adresser à nous, mais si jamais y’a un doute : on n’est pas payés pour dire qu’on aime les films. Même quand on est partenaires d’un film (ce n’est pas le cas ici), on ne vend pas notre avis.
Expliqué ici : https://www.ecranlarge.com/partenariats
Par ailleurs, on le dit constamment : tout le monde devrait toujours se faire son propre avis sur les films. Et si quelqu’un n’est pas d’accord avec nous, tant mieux. C’est totalement normal, sain et ça ne veut absolument pas dire que quelqu’un a tort / a été payé pour mentir.
!! ATTENTION !!
Alerte pour tous ceux que cet article aurait rendu curieux comme moi, j ai decouvert apres quelques recherches sur le net que la societe de production, et le realisateur de ce film, Jawan, ont la reputation (pas forcement bonne), de payer pour recevoir de bons avis sur leurs films.
Et ce bien plus que ne le font la plupart des autres. Ils sont souvent denonces pour payer des critiques, des bots qui publient plein d avis elogieux, pour remunerer les influenceurs qui leurs font de bonnes critiques, etc etc…
On trouve enormement de personnes se plaignant apres avoir vu leurs derniers films en s estimant decus et dupes par les avis positifs qu ils avaient lu et qui ne refletaient pas du tout la veritable qualite du film qu ils venaient de voir.
Je n accuse bien evidement pas le site ecran large, et sa critique de ce film.
Mais par contre la quantite astronomique de commentaires que j ai pu trouver sur le net parlant de cette pratique les concernant, sucite a minima le doute sur le sujet.
Donc j invite tous ceux que cet article a rendu curieux, a faire quelques recherches par eux memes, et a lire quelques critiques faites par des spectateurs lambdas ayant vus le film apres sa sortie en salle. Les avis donnes par ceux visionnant un film en avant premiere etant de toutes facons la plupart du temps biaise etant donne que ce sont souvent dds fans ayant ete invites, quand ils ne sont pas purement et simplement remuneres pour faire des critiques positives.
Et je le redis bien, ce genre de pratique est clairement habituelle, et pressue normale, mais concernant ce film, et les derniers de ce realisateur, ce qui est denonce va bien au dela. Il ne s agit pas d une simple campagne de pub, ou de marketting, mais plus d une pratique mensongere et trompeuse, au vu de la quantite de faux avis qui seraient diffuses et propages.
Donc mefiez vous, et revoyez peut etre vos attentes a la baisse si vous comptez aller visionner ce film.
Bonjour Goeffrey,
En 1, merci de votre reponse.
Et en 2, je reconnais que dans mon message, et ma demande, j ai oublie l evidence, a savoir que pour les films sortant en salle au cinema, il n est pas forcement necessaire de le preciser, ceci etant la norme par defaut, et que ce serait plutot dans le cas d un autre type de diffusion qu il serait utile, voir necessaire de le preciser.
Avec les multiples facons de pouvoir visionner des films, ou series, actuellement, j avoue que pour un film venant d inde, j ai oublie la possibilite qu il sorte tout simplement en salle de cinema.
Merci de votre reponse en tous cas
Bonjour, la version originale de Jawan est en Hindi
seances: https://m.facebook.com/story.php?story_fbid=pfbid02xYG8jk8c1YurkYx5opz53G5AQgb5LUfFCvML1SqzgZh5NhDszgakGJ2H8ksu6WkTl&id=100063691175136
Mon cinéma le propose en Tamoul ou Hindi.
Quelle version est l’originale ?
Merci.