Critique : Téhéran

Sandy Gillet | 12 avril 2010
Sandy Gillet | 12 avril 2010

Film OVNI à tous égards, Téhéran raconte l'histoire d'un iranien monté à la capitale dans l'espoir de dégotter un boulot synonyme de survie pour lui et sa femme restée dans leur ville de province. À la lecture de ce « pitch », pas de quoi remuer plus d'une paupière à la fois si ce n'est l'intérêt de « mater » la scénographie d'une ville autrement que par le prisme du cinéaste officiel iranien, bien malgré lui, Kiarostami. Et de fait, dès les premières images filmées au téléobjectif dans les rues de Téhéran, on est saisi par le réalisme moderne d'une prise de parole à la fois conventionnelle et déviante. Conventionnelle car naturaliste au sens que Nader T. Homayoun est d'abord un documentariste. Déviante car il insuffle à ce premier long-métrage un vrai sens de la dramaturgie au détour de chaque rue et rencontres faisant de la capitale iranienne le personnage central de son film.

Le boulot dégotté par Ebrahim (Ali Ebdali, comédien non professionnel comme pour le reste du casting) est de se balader dans les rues de la ville avec à son bras un nouveau né qui lui permet d'augmenter les revenues de sa mendicité. Un boulot oui puisque l'enfant n'est pas à lui et qu'il reverse une partie de ses maigres « revenus » à celui qui l'a confié. Jusqu'au jour où le bébé est kidnappé laissant notre pauvre Ebrahim à la merci de son mafieux de propriétaire qui est par ailleurs à la tête d'un véritable trafic de mouflets. En quinze minutes le film passe d'un état des lieux peu reluisant d'une société à la dérive au thriller haletant où coups fourrés et rebondissements étonnants sont légions.

Au-delà de la gageure pour un réalisateur de nationalité iranienne à représenter son pays sous un tel « vernis », nous voici  tout bonnement aspiré au cœur d’une ville foutrement barrée. Nader T. Homayoun accroissant ce constat en distillant insidieusement et au détour de chaque plan le sentiment malaisé à décrypter de la fiction phagocytée par le documentaire. Ou est-ce le contraire. Cette dualité qui s'enracine à chaque nouvelle minute, c'est bien là toute la force d'un film par ailleurs non dénué d'humour et de dialogues ciselés. On ne sait si le cinéaste saura pérenniser ce qui semble être un genre nouveau dans son pays natal mais le voici déjà en digne héritier de Scorsese version Mean Streets...

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