Films

Rescue Dawn : Critique

Par Patrick Antona
3 décembre 2007
MAJ : 23 mai 2022
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On aurait pu penser que le cinéma de Werner Herzog avait perdu une partie de son intérêt et de sa force avec la disparition de son interprète-Némésis le plus emblématique, Klaus Kinski. D’ailleurs le réalisateur allemand semblait plutôt se cantonner dans le domaine du documentaire (La Roue du Temps, Grizzly man) malgré la réussite artistique de Invincible en 2001. Avec Rescue dawn, Werner Herzog démontre que son talent d’artiste du cinéma ne s’est en rien amoindri et que sa rencontre avec Christian Bale, autre acteur jusqu’au-boutiste, semble poser les bases d’un nouveau souffle dans sa carrière.

Photo Christian Bale

En reprenant l’histoire vraie de Dieter Dengler, pilote de l’US Navy abattu au-dessus du Laos en 1966 dont il avait déjà consacré un documentaire il y a 10 ans (Little Dieter needs to fly), Werner Herzog renoue avec ces obsessions ancestrales qui habitaient des œuvres comme Aguirre ou Fitzcarraldo, à savoir la lutte de l’homme pour échapper à la folie et à l’aliénation ainsi que sa capacité à encaisser au maximum face à l’adversité.

Car ce qui à la base aurait pu fournir un énième POW movie comme on n’en fait plus depuis Rambo II ou la série des Portés disparus se transforme en ode lyrique à la vaillance humaine, que ce soit dans la confrontation avec les geôliers ou les colères de Mère Nature, et au respect d’une certaine morale humanitaire.

 

 

On retrouve dans la narration de Rescue dawn ce qui a fait la marque du réalisateur, à savoir ces plans contemplatifs et travaillés qui épousent au mieux le côté quasi-documentaire d’un film censé s’appuyer sur une histoire vraie, ainsi que cette capacité à transmettre une certaine vision de la folie (personnifiée par un Jeremy Davies parfait en loque humaine) ou de maîtriser les scènes de violence sans gratuité mais avec impact.

Mais le principal atout de Rescue dawn demeure sans aucun doute Christian Bale : naviguant entre innocence voire naïveté et détermination inaliénable, le comédien n’en oublie pas de montrer une forme de vulnérabilité qui emporte l’adhésion, tout en réussissant à faire passer une pointe d’humour, ce qui est un grand avantage par rapport à un Kinski qui se complaisait dans la morgue ! Mais cette capacité à habiter son rôle est d’autant plus réussie qu’elle s’accompagne à nouveau d’un travail sur son corps (à l’identique de ce qu’il avait entrepris sur Le Machiniste en 2004) poussé à la limite, jusque dans ses actes de survie (voir la scène où il se nourrie d’un serpent encore vivant).

 

 

Avec Rescue dawn, Werner Herzog réussit à redonner ses lettres de noblesse au film de survie, en évitant tout commentaire politique qui aurait alourdit le propos et surtout une vision super-héroïque du « all-american hero » qui aurait fait tomber son film dans le grotesque. En posant sa caméra à niveau de ses personnages, en ne tombant pas dans l’abstraction façon Aguirre pour représenter cette descente aux enfers si particulière, Werner Herzog signe un film réaliste sur la dignité humaine, dur mais touchant.

 

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