The Nocebo Effect : critique qui voit rouge en Green

Geoffrey Crété | 7 mars 2023
Geoffrey Crété | 7 mars 2023

En 2019, on faisait partie des gens qui aimaient (beaucoup) Vivarium, où Jesse Eisenberg et Imogen Poots étaient bloqués dans une boucle infernale dans la plus pure tradition de The Twilight Zone. En 2023, le réalisateur et scénariste Lorcan Finnegan est de retour avec The Nocebo Effect, où Eva Green succombe à une mystérieuse maladie. Disponible en VOD, DVD, Blu-ray le 8 mars.

tropical malady

Ça commençait si bien, avec un doux parfum d'angoisse old school grâce aux cartons du générique et la musique de Jose Buencamino. En quelques scènes, Lorcan Finnegan place le décor (une grande demeure sortie d'un vieux film d'horreur), le cadre (une famille a priori banale) et l'héroïne (Eva Green, créatrice de mode). Et sans perdre une minute, il plante la graine du mal avec une scène saisissante, qui convoque aussi bien la fantasmagorie pure que l'horreur intime.

Car le moteur du cauchemar de The Nocebo Effect est une toute petite et affreuse chose : une tique. Agrémentée d'une couche de mystère hallucinatoire, la créature devient un poison qui pourrit la vie, le corps et l'esprit de l'héroïne. Après une ellipse qui lui a roulé dessus comme une semi-remorque, la créatrice de mode n'est plus que l'ombre d'elle-même, la faute à un mystérieux mal qui la ronge, sous les yeux impuissants de son mari et sa fille. Jusqu'à ce qu'une mystérieuse femme débarque, telle une Mary Poppins légèrement flippante qui lui promet de la soigner avec des méthodes peu orthodoxes.

Tout ça arrive dans les 10-15 premières minutes, où The Nocebo Effect place tous ses pions. Problème : Lorcan Finnegan ne semble pas trop savoir quoi en faire par la suite.

 



tique tac

Ceux qui n'avaient pas aimé Vivarium lui reprochaient certainement la lourdeur de son discours, et sa capacité à étirer une fantastique idée de court-métrage sur plus de 90 minutes. The Nocebo Effect reprend ces travers, mais avec en plus une narration alambiquée et sans un concept aussi ludique.

Le principal problème : le scénario de Garret Shanley, déjà derrière Vivarium. En jetant aussi rapidement son héroïne dans le cauchemar, le film se condamne à ensuite étirer le mystère, quitte à tourner en rond. L'histoire avance ainsi à coups d'effets usés (une petite hallucination par ci, une crise-dispute par là), et tire sur toutes les plus grosses cordes (le personnage sera évidemment remis en question par un mari cartésien, et aura une crise absolument effroyable en public).

Tristement mais sûrement, The Nocebo Effect s'enterre alors dans une montagne de pas grand-chose. Le rythme devient vite le gros point faible du film, en partie à cause d'un effet de masque maladroit. Le récit apparent cache le véritable sujet, amené par des flashbacks-parpaings posés çà et là dans l'histoire. Le décrochage de point de vue vient sans cesse casser la dynamique, et empêcher la totale immersion aux côtés du personnage d'Eva Green. Et c'est fort dommage puisque la talentueuse actrice retrouve ici un bon rôle, qui ne se contente pas d'appuyer sur la touche *intensité-possession-malaise à la Penny Dreadful*.

 

The Nocebo Project : photo, Eva GreenPenny Dreadful : Legacy

 

nocebof effectivement

Difficile de ne pas vite comprendre où veut en venir The Nocebo Effect. Étant donné que le film dirige d'office le regard avec son titre (l'effet nocebo est le pendant négatif de l'effet placebo) et son intro hallucinée, les pièces du puzzle sont visibles comme le nez au milieu de la figure. Les indices deviennent impossibles à rater, et permettent (obligent) de résoudre le mystère qui sert de clé de voûte au récit.

Rien de grave, sauf que le scénario en rajoute douze couches dans une dernière ligne droite qui explique et surligne en fluo absolument tout, de A à Z. Après avoir tourné autour du pot pour meubler et suivre sagement le manuel du petit film d'angoisse, The Nocebo Effect se lance dans un tuto pour expliciter son discours et détricoter sa mythologie. La lourdeur du dispositif narratif apparaît alors dans toute sa splendeur, confirmant l'écriture grossière des personnages, qui servent l'intrigue sans avoir le droit d'y trouver une véritable place. Une petite part de mystère résiste à ce coup de karcher, mais c'est bien peu puisque même le personnage principal est perdu et sacrifié pour les besoins du discours.

 

Nocebo : photo, Chai FonacierUne nounou des enfers

 

C'est d'autant plus triste que The Nocebo Effect repose finalement sur deux idées extrêmement fortes et riches. Derrière la tique des enfers, il y a un autre parasite beaucoup plus familier et terrible, qui donne une couleur particulièrement intéressante au cauchemar.

Dans ses meilleurs moments, Lorcan Finnegan parvient à noyer le poisson et mélanger les deux, avec quelques instants fiévreux réussis, comme cette mémorable scène nocturne de pure angoisse. Dans le grand final, il rappelle aussi ses talents de metteur en scène avec des images sensationnelles. Mais le réalisateur ne peut pas faire de miracle avec un tel scénario. The Nocebo Effect se termine donc dans la petite tristesse d'un rendez-vous manqué, comme le confirment la fin et l'épilogue, dénués d'émotion.

The Nocebo Effect, disponible en en VOD, DVD, Blu-ray le 8 mars 2023 chez The Joker Films

 

The Nocebo Project : Affiche française

Résumé

Il y a des idées, des images et des intentions passionnantes dans The Nocebo Effect. Mais Lorcan Finnegan se perd dans les méandres d'un scénario bancal et surexplicatif qui finit par tuer même les meilleurs effets. Et sinon, quand est-ce qu'elle va refaire un vrai bon film Eva Green, qui mérite mieux ?

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Lecteurs

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commentaires
Sirkette
20/03/2023 à 01:41

Un excellent film. J ai adoré du début à la fin. Je n ai rien à lui reprocher. Eva Green et les autres sont parfaits. Le film est bien maîtrise, bien filmé. Il delivre un message sous forme de film Fantastique. Pour moi c est un super 9/10. Ma soirée fut excellente

Geoffrey Crété - Rédaction
07/03/2023 à 16:18

@Trac

J'aurais jamais pensé à comparer les deux, même si j'entends les arguments. En tout cas, je doute que ce soit une évidence, donc rien d'anormal à ne pas le citer dans la critique

Trac
07/03/2023 à 16:07

Vous auriez quand même pu citer la mise à mort du cerf sacré avec Farrell et Kidman parcqu'ont est en plein dans la similarité, une histoire de malédiction et de vengeance même si ça reste différents... Oui le film est loin d'être parfait parfois même un peu facile mais je l'ai préféré a vivarium qui pour moi et une des plus grosses arnaque cinématographiques des dernières années et que la plus part des critiques on trouvé formidable. Là il y a une vrai story une vrai histoire de sorcière qui pour une fois est humaine et non un monstre vous êtes passé à côté de ça dans votre critique. Pour moi en tout cas j'ai trouvé ça correct même si ont est pas dans le chef d'oeuvre

Cidjay
07/03/2023 à 16:06

J'avais adoré Vivarium, donc je ne passerai pas à côté de celui-ci !

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