Critique : Et maintenant on va où ?
On est frappé par l'absolue liberté avec laquelle Labaki aborde ses différents thèmes, et leurs épines. Les dialogues fusent, acérés, alors que nous découvrons une galerie de femmes tour à tour rayonnantes, fortes, blessées, mais toujours empreintes d'une énergie débordante. À l'image de sa galerie de personnages, le film ne lâche jamais prise et sait traiter chaque arc narratif avec la même impatience. Qu'il s'agisse du débarquement impromptu d'une cargaison de bimbos, de gérer le ravitaillement du village, ou de juguler les tensions inter-communautaires, le scénario multiplie avec une grande fluidité les enjeux.
L'autre force du film vient de son humour, assez imparable et très bien dosé. Il fallait autant d'audace que de culot pour insuffler à cette histoire de telles ruptures de ton et de fantaisie, à l'image de la première séquence, qui désamorce à elle seule les pièges tendus par le sujet. Le rire permet à la réalisatrice une liberté de ton salutaire, qui ne cède cependant jamais à la caricature, ni à la simplification sauvage. Ces qualités mettent un certain temps à s'épanouir dans le film, mais c'est pour nous offrir un final décapant et parfaitement réussi, où l'on découvrira que l'opium du peuple n'est pas toujours la religion.
Il faudrait pour nous emporter totalement que la mise en scène soit aussi inventive lors de ses scènes intermédiaires que de certaines séquences pivot beaucoup mieux construites, mais ce ne serait pas rendre justice à l'énergie et la grâce que déploie souvent Et Maintenant on va où ? Le long-métrage de Nadine Labaki, comme son titre l'indique n'a pas de réponse toute faite ni de kit idéologique destiné au spectateur, il interroge, parfois avec gravité, souvent avec justesse, toujours avec le sourire.
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