Critique : J'ai (très) mal au travail

Reportage télévisé de facture assez banale porté sur grand écran, J'ai (très) mal au travail n'est pas très novateur du côté de la forme : des interviews se succèdent auxquelles sont simplement rattachées quelques images d'une masse dans le métro, de Coluche et de travailleurs déçus. Simpliste, à destination d'un public habitué à ce type d'exercice assez laborieux par moment, il ne se distingue des doc' d'Envoyé Spécial que par sa longueur : 1h30 au lieu de 52 minutes et au final n'apporte pas grand-chose, se contentant d'effrayer au maximum les gens sur ce qui les attend.

A travers un argumentaire appuyé par des grands pontes de la psychologie et de la sociologie du travail, le réalisateur montre à quel point travailler est devenu moralement exténuant de nos jours : peur du chômage, stress entretenu par un marketing interne aux entreprises absolument dévastateurs, etc. Mais ne nous leurrons pas, ce film sera générateur de suicides davantage que catalyseur de changements. Il ne fait que recenser certains cas de travailleurs atteints psychologiquement par le harcèlement moral dont ils sont victimes mais ce n'est malheureusement pas après cette mise en perspective que quelque chose bougera dans le monde du travail, sinon cela se saurait.

D'autant que le message que tente de faire passer Jean-Michel Carré n'atteint son but que partiellement. Misant sur un décalage assez prononcé entre humour et drame, qui aurait pu être très intéressant, il laisse surtout l'impression d'être passé à côté de quelque chose. Et désolé pour lui mais un témoin masqué d'un écran d'ordinateur a une fâcheuse tendance à provoquer le rire à un point tel qu'on en oublie presque d'écouter ce qu'il a à nous dire.