Andor plus fort
La première saison d’Andor avait constitué une sacrée surprise à sa sortie en 2022 sur Disney+. Trois ans plus tard, le scénariste Tony Gilroy vient conclure l’histoire de Cassian Andor (Diego Luna). Après trois premiers épisodes qui confirmaient que c’était toujours la meilleure série Star Wars, Andor attaque son deuxième arc, toujours avec le même panache.
Là où la première saison d’Andor avait quelque peu tâtonné à l’heure de se trouver un format adéquat, sa deuxième fournée d’épisodes est en effet brillante au niveau du rythme. Après une mise en bouche déjà impressionnante, mais finalement assez resserrée, les épisodes 4 à 6 de cette saison 2 marquent une nette montée en puissance de la série, en pleine possession de ses moyens et surtout de ses personnages.
Car au fond, ce qui démarque Andor de ses congénères sur Disney+, ce sont bien ses personnages, clés de voûte absolues du récit par qui toute l’intrigue passe. Débarrassée des maladresses de contextualisation et d’introduction inévitables de la première saison, la série évolue dans une arène dont elle a l’absolu contrôle, où chaque dialogue se transforme en uppercut violent ou un vicieux coup droit. On sent comme une atmosphère de calme avant la tempête, d’apocalypse inévitable, notamment en présentant le conflit à venir sur Ghorman.
La planète, prise pour cible par l’Empire pour des raisons floues, organise comme elle peut sa révolte dans un climat tendu. Un climat que l’on retrouve sur Coruscant, la planète-ville qu’ont rejoint Cassian et Bix, désireux de bâtir une vie commune au milieu de la paranoïa générale. Comme à son habitude, Andor se penche sur l’intime, et pose un regard surprenant de tendresse sur ce couple traumatisé. Toujours à travers des intrigues à petite échelle, la série continue de brillamment plonger dans les complexités d’une galaxie en guerre sans le savoir.

Infowars
Par la qualité de son montage, Andor explore avec grâce les rouages de l’Empire et de la Rébellion naissante. Comme à son habitude, Tony Gilroy emprunte plusieurs de ses thématiques au monde réel, de manière plus ou moins subtile. Ici, la série insiste de plus en plus sur le pouvoir de la rumeur et de la désinformation, au cœur du dispositif d’oppression de Palpatine. On ne parle plus des agaçants hommes de main de l’Empereur envoyés pour assister le Bureau de Sécurité dans les premiers épisodes, mais bien d’un système médiatique étouffant et sans pitié.
Une machine qui noie la planète Ghorman dans un torrent de rumeurs qui l’isolent du reste de l’Empire. Jamais montré, Palpatine n’en reste pas moins l’antagoniste ultime qu’il a toujours été dans Star Wars. Pas besoin d’éclairs ou de sabres lasers, les attitudes des sénateurs de Coruscant suffisent à montrer l’étendue de son pouvoir. Face à une Mon Mothma désemparée, ils refusent de voter à contre-courant, effrayés des conséquences, aveuglés par la propagande, ou désireux de rester en poste.

Jusque dans le générique de son épisode 5, le bruit crépitant d’une radio, Andor place l’information au centre de son intrigue. La série aime ses parallèles, et l’Empire comme la Rébellion tissent un épais tissu de mensonges, où leurs pions respectifs se perdent et s’échangent. Quand Cassian est constamment manipulé par un Luthen au bord de la rupture, Syril, le fonctionnaire loyal à l’Empire, joue un jeu dangereux d’agent double où ses convictions personnelles paraissent plus que jamais ambiguës.
Finalement, il est assez fascinant de voir comment une série aussi obsédée par l’individualité plonge ses personnages dans deux machines de guerre broyeuses d’âmes, où le résultat prime sur le reste. Syril est réduit à son rang de rouage jusque dans ses relations intimes, tant par sa compagne Dedra Meero que par sa mère qui le conseille de ne pas penser par lui-même. De son côté, Luthen est prêt à sacrifier le peuple de Ghorman si sa chute peut permettre de rallier plus de systèmes à la cause rebelle.

Rebel-ception
Des parallèles, il y en a, mais évidemment, Andor n’oublie pas de fortement différencier ses deux camps. À l’Empire parfaitement huilé et presque monochromatique répond une Rébellion sale et surtout désordonnée, où différents mouvements participent chacun à leur manière à un effort de guerre encore éparpillé.
« La révolution n’est pas pour les sains d’esprit », s’époumone Saw Gerrera (toujours génial Forest Whitaker) tandis que Cassian n’a « pas grand-chose d’un révolutionnaire » pour le chef de l’effort rebelle sur Ghorman. On l’a dit, Andor aime ses parallèles, mis en lumière par la fluidité de la mise en scène et du style de la série en montage alterné. Face au fascisme, les héros sont à la fois des fous rongés par des décennies de guerre et des anti-héros qui rêvent plus de la fin du combat que du combat en lui-même.

Le format en arcs de trois épisodes de cette saison 2 trouve tout son sens dans la conclusion de l’épisode 6, qui superpose la fronde menée de l’intérieur par Luthen et Mothma sur Coruscant avec la révolte de terrain qui commence sur Ghorman. Un final tendu et tragique, qui montre encore une fois toutes les facettes de la guerre, et particulièrement la puissance de l’information, à n’en pas douter la thématique de ce deuxième arc.
Si on devait faire les difficiles, on pourrait presque reprocher la fin quelque peu brutale de l’épisode, même si elle marque la reprise en main nécessaire du destin d’un personnage majeur. Hormis ce (très) léger bémol, Andor reste un modèle d’écriture, plus solide encore que dans sa première saison, et dont le crescendo intense trouvera un début de récompense dans ses trois prochains épisodes. Préparez-vous, la tempête arrive à grands pas.
Les épisodes 4 à 6 de la saison 2 d’Andor sont disponibles sur Disney+ depuis le 30 avril 2025.

Andor, c’est Star Wars pour adulte. Personnellement c’est le seul produit SW que je peux regarder. La mécanique de l’emprise du totalitarisme, de la paranoïa et du chaos de la résistance… Les rouages administratifs, déshumanisés par leur ambition et leur cynisme derrière leur bureau, font plus peur que n’importe quel Sith peinturluré bondissant le néon à la main.
La série aurait pu se passer en 1941 en France, dans les 70’s en Argentine, au début des années 2000 en Russie ou de nos jours aux USA. C’est d’autant plus fort et brillant que d’être arrivé à faire rentrer ça dans un univers de fans hystériques collectionneurs de bédés et de jouets en plastoque.
Les MAGA n’ont qu’à bien se tenir !