Test Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition - le meilleur JRPG dans le plus beau des écrins

JL Techer | 22 avril 2022
JL Techer | 22 avril 2022

En 1999 au Japon, puis en 2000 aux USA, débarquait Chrono Cross, qui allait tout dévaster sur son passage et marquer durablement les esprits, allant jusqu'à faire oublier Final Fantasy VII et VIII aux fans de JRPG (si si). Il aura fallu plus de 20 ans pour que les frenchies puissent enfin prendre en main cet objet de culte, grâce à une version appelée Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition. Mais l'attente en valait-elle la chandelle ? Spoiler : oui.

 Le meilleur du meilleur du JRPG...

Un livre ouvert sur une table à peine éclairée par une lampe à huile, un texte défile et questionne sur la justice d'un destin qui pousse à blesser ceux qu'on aime et à garder près de soi ceux qu'on déteste. Puis une musique aux accents à la fois celtiques et orientaux s'emballe alors qu'un jeune homme fait face à la mer, et que monstres, dragons et créatures anthropomorphes se succèdent à l'image à un rythme effréné, jusqu'à la libération de l'affichage du titre Chrono Cross

À l'image de cette ouverture devenue inoubliable pour tous ceux qui ont pu prendre la créature en main il y a presque un quart de siècle,  le terme "monument" semble presque avoir été pensé pour Chrono Cross. JRPG hors-norme de la PlayStation 1, conçu par une dream team du jeu vidéo de la fin des années 90 au service d'un SquareSoft pas encore devenu Square Enix, Chrono avait fait l'effet d'un raz de marée outre-Atlantique et sur les terres nippones. Mais le phénomène n'avait jamais pu atteindre les frontières européennes, et encore moins françaises, tout du moins légalement. 

 

Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition : photoUn JRPG en apparence traditionnel

 

Lointain cousin de Chrono Trigger, avec lequel il partage des thématiques comme le questionnement du rôle de  héros, et celui du voyage entre les mondes, CC a fait figure d'anomalie du JRPG. Loin des ambiances crépusculaires de FF7, et de FF8 alors attendu comme le messie, CC offrait un cadre lumineux, une direction artistique colorée, et un casting de plus de 40 personnages jouables, tous conçus avec un soin obsessionnel

Mais c'est surtout dans sa structure non linéaire, à l'opposé des canons du JRPG de l'époque, et grâce à un scénario à embranchement quasi révolutionnaire pour un JRPG que CC avait conquis le public. Le titre proposait des choix cornéliens, comme seuls savaient le faire à l'époque les CRPG à la Baldur's Gate, condamnant certains personnages aux oubliettes, ou permettant d'en rallier d'autres à sa cause.

Par la même occasion, et grâce à un new game plus accessible en fin de partie, le jeu pouvait se targuer de jouir d'une rejouabilité inédite. CC était-il le Mass Effect du JRPG de l'époque ? Assurément. D'une modernité folle, le titre de SquareSoft avait 20 ans d'avance sur son temps. Autant dire qu'en termes de narration et de structure scénaristique il n'a pas pris une ride, et l'édition Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition lui offre une seconde jeunesse graphique bienvenue.  

 

Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition : photoUne DA hallucinante

 

... dans un écrin enfin à la hauteur

Mise à part en passant par des moyens détournés (émulation, consoles modifiées, etc.), Chrono Cross était resté un lointain mirage pour la grande majorité des joueurs. Justice est donc enfin rendue grâce à Radical Dreamers. Et il s'agit d'une justice polie comme un diamant. Non seulement le soft revient dans une version française intégrale avec une traduction de haut vol, chaque trait d'esprit, chaque accent (Kid parlait avec l'accent australien en VO) ayant été traduit à la perfection, mais aussi avec un emballage graphique qui rend enfin honneur à ce chef-d'oeuvre. 

Les assets des protagonistes ont fait l'objet d'une remodélisation 3D splendide. Bien entendu, on se trouve plusieurs crans en dessous de ce qu'un Persona 5 peut proposer, mais en termes de politique de remastering, The Radical Dreamers est bien meilleur que tout ce que Square a pu produire au cours des dix dernières années. Loin de la fainéantise des Final Fantasy Pixel Remaster, ou des rééditions de SaGa Frontier, ici tout a été pensé pour offrir le plus grand confort de jeu possible aux joueurs d'aujourd'hui. 

 

Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition : photoLa VF rend justice à la caractérisation des personnages

 

Square a eu l'intelligence d'inclure une flopée de features destinées à faciliter la vie des gamers, en donnant la possibilité (ou non) de vivre le jeu avec les poncifs de 2000 ou débarrassé de ce qui encombrait les JRPG de cette époque. Libre à chacun donc de désactiver les combats aléatoires, d'activer un mode automatique pour les affrontements, ou de rendre les batailles plus faciles.

La liberté de choix entre vivre l'aventure historique telle quelle ou pouvoir profiter sereinement d'un scénario dense et riche est plus que bienvenue, d'autant plus que le système de levelling du jeu peut être complexe à maitriser pour qui n'a jamais mis les mains sur un JRPG. On pourra reprocher au remaster de n'offrir qu'un format TV 4:3 ou 16:9 étiré et non pas un widescreen natif, mais ce ne sont là que peccadilles. 

Le titre vient même augmenté du bonus "Radical dreamers - le trésor interdit", un roman audio à l'histoire inédite. Et que dire de la musique de Yasunori Mitsuda, belle à pleurer, qui ici revit pleinement grâce à une remasterisation admirable. Même s'il est vrai qu'il aurait été préférable de pouvoir bénéficier de l'OST réarrangée publiée en 2015, difficile de bouder son plaisir tant ces merveilles auditives sont bouleversantes.

 

Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition : photoSortez les mouchoirs

 

Un objet de culte hors du temps

Jouer à Chrono Cross The Radical Dreamers, c'est retrouver un vieil ami longtemps perdu de vue, et pourtant réaliser que le temps n'a en rien entamé cette amitié. Ou découvrir un aïeul à la vie passionnante que l'on ignorait faire partie de la famille. Conçu pour abattre les limites du JRPG, avec une brochette de stars aux commandes : Yasunori Mitsuda (Xenogears) à la musique, Nobuteru Yuki (Escaflowne) au chara-design, Masato Kato (scénariste de FF7) et Hiromichi Tanaka (Xenogears) au game design, le titre s'est rapidement imposé comme étant plus qu'un jeu.

Chrono Cross joue avec les notions de voyage dans le temps et d'univers alternatifs, et interroge le joueur-héros sur sa place dans le monde, sur l'impact de ses décisions sur son propre destin, mais aussi sur celui des autres. Le héros, Serge, est bien plus qu'une simple coquille vide, il est l'outil de questionnement de son environnement. Basculant d'un univers à l'autre, sachant que dans l'un d'entre eux il est mort noyé dix ans auparavant, il interroge la nécessité ou non de sa présence dans son monde. De la même manière, le jeu pousse à s'interroger sur l'impact que notre propre présence a sur autrui, et à se demander en quoi paroles et actes ont un impact sur ceux qui nous sont chers. 

 

Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition : photoLe trait inimitable de Nobuteru Yuki

 

De la même manière, ce remaster Radical Dreamers vient interroger le JRPG sur son état d'aujourd'hui. Chrono Cross vient prouver que le genre était au meilleur de sa forme, voire à son âge d'or en 1999, et par ses quelques améliorations, vient se demander en quoi il a changé en 20 ans, et surtout, pourquoi il a si peu évolué. Car malgré des améliorations graphiques indéniables, dans sa structure narrative, le JRPG n'a pas vraiment subi de transformation majeure. 

Mis à part des titres tels que Persona 5 ou Yakuza : like a dragon  qui viennent dynamiter les codes du JRPG, et s'en amusent pour faire grandir le genre, même les rois du genre (dont Final Fantasy) sont au point mort en termes d'inventivité. Les mêmes sempiternelles structures linéaires continuent de tirer en arrière un genre hésitant constamment entre nécessité de transformation, et maintien d'un statu quo, à l'image des deux mondes de Chrono Cross

 

Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition : photoLe point de départ d'une immense aventure

 

C'est là la marque des grands jeux : être toujours capables de questionner le média vidéoludique plus de 20 ans après sa sortie originale.  À la fois précurseur, témoin d'un âge d'or révolu, synthèse de ce que le genre du JRPG a su faire de mieux, et remasterisation exemplaire, Chrono Cross The Radical Dreamers est un jeu essentiel et incontournable. 

Chrono Cross The Radical Dreamers Edition est disponible depuis le 7 avril 2022 sur PS4, Xbox One, Nintendo Switch et PC. 

 

Chrono Cross : The Radical Dreamers Edition : photo

Résumé

Chrono Cross est un indispensable pour les amoureux de JRPG, mais aussi pour ceux qui n'ont jamais mis la main sur un JRPG. Il doit impérativement faire partie de la ludothèque de tout roliste qui se respecte. Et il prouve que la plus grande force du genre reste sa narration, au-delà de tout aspect graphique (dans ta face FF7 remake).

Newsletter Ecranlarge
Recevez chaque jour les news, critiques et dossiers essentiels d'Écran Large.

Lecteurs

(0.5)

Votre note ?

commentaires
Shaddei
24/04/2022 à 00:12

Je poste jamais mais comment on peut mettre une si bonne note à un si mauvais remaster. Le jeu est une pépite, mais il aurait clairement mérité mieux que ce que fais un émulateur depuis déjà X années. Square continue de se faire de l'argent facile en faisant le moins possible. Honteux.

dams50
23/04/2022 à 13:57

Allez Square, le même effort siouplait pour un remaster de Xenogears, avec une trad actualisée, et je le referai alors volontiers (parceque là, la version PS1 NTSC avec traduction de l'époque, ça pique un peu à l'écran, et la trad US mérite des corrections si j'en crois le "Monolythes brisés" de Charles - Kadmony - De Clercq, bouquin qui entre nous soit dit est un must-have pour tout curieux de l'univers Xeno).

Copeau
23/04/2022 à 09:22

@JL Techer
Je vois que vous aimez les jeux vidéos (cf Elden ring :). L’annonce d’un nouveau Monkey Island par Ron Gilbert en personne me donnerait bien envie de lire un bel article de synthèse sur la saga ! :)) Au cas où …
Merci
PS : et un article sur comment battre Malenia ! arrg j’y arrive pas lol

Moixavier58
22/04/2022 à 20:57

D'accord avec Jaroh. Mais j'irais plus loin. Par rapport a Ff7, lui c'est un remaster et non un remake. Donc c'est du mauvais boulot, voyer le test plus soigné de Monsieur Toc sur Youtube

Copeau
22/04/2022 à 17:55

Un jeu tout bonnement incroyable … je suis d’accord à 100% avec l’article . Un jeu obligatoire pour tout amoureux du JRPG.

jaroh
22/04/2022 à 15:47

La partie technique aurait pu être plus soignée, le frame rate bloqué à 30 tps toussote même sur PC.

votre commentaire