Cannes 2016 : le Baccalauréat de Cristian Mungiu réussit son examen de la société roumaine

Jacques-Henry Poucave | 19 mai 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Jacques-Henry Poucave | 19 mai 2016 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Auteur révélé par le Festival de Cannes, déjà détenteur d'une Palme d'Or, Cristian Mungiu est de retour sur la Croisette, toujours en compétition, à l'occasion de Baccalauréat. De nos jours, en Roumanie, un médecin qui prépare depuis des années le départ de sa fille unique pour l'Angleterre à l afaveur de ses études voit cette opportunité menacée par une agression absurde. Poussé dans ses derniers retranchements, il va progressivement renoncer à son intégrité pour tenter d'assurer l'avenir de sa progéniture.

Portrait d'une famille qui ne tient plus que par le faible truchement de liens symboliques, radiographie d'un pays à la corruption endémique et interrogation désenchantée sur les notions d'espoir et de renaissance, le nouvel effort du cinéaste roumain comptera sans doute parmi les propositions de cinéma les plus abouties et maîtrisées de la compétition officielle.

cannes 2016

Grâce à une interprétation collective proche de la perfection, qui s'épanouit dans une sobriété jamais feinte, la galerie de personnages amers et pathétique que charrie le film accroche immédiatement le spectateur. Ces protagonistes, accompagnés par une mise en scène à la fois limpide de simplicité et discrètement complexe, sont mis en avant sans démonstration de force par de longs plans à la composition extrêmement soignée. Le résultat permet à Cristian Mungiu de capter avec une réelle force le quotidien d'un pays à l'arrêt, coincé entre une fin de l'Histoire avortée et un avenir miné par la corruption.

Pour autant, Baccalauréat ne cède jamais à la sinistrose facile du film d'auteur de Festival. Son auteur ménage ainsi toujours une interrogation, un questionnement, sur le devenir de ses anti-héros, le cheminement des valeurs et l'identité Roumaine, réservant aux personnages féminins la fascinante responsabilité d'assumer les péchés d'hier, ou de tenter de s'en extraire. Le cinéaste confirme à son tour que cette édition 2016 se veut un Cannes résolument féminin, auscultant et questionnant la place d'héroïnes à la croisée des chemins.

Si on ne peut que saluer la maîtrise et l'intelligence du film, sa longueur un brin excessive étant donné la simplicité de son intrigue et une réalisation un peu trop mécanique et répétitive lui interdisent de bouleverser totalement le spectateur. Ainsi, sitôt l'horlogerie du film devenue apparente, les dialogues deviennent progressivement trop proéminents, la direction pris par le récit ne peut plus surprendre, et l'ennui menace plus d'une fois de s'installer.

Reste donc une oeuvre d'une réelle intelligence, dont la délicatesse et l'intelligence marque, mais qui souffre un peu trop de son aridité formelle et conceptuelle.

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