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Don’t move : critique d’une paralysie scénaristique partielle sur Netflix

Par Ange Beuque
28 octobre 2024
MAJ : 28 octobre 2024

Outre le nom ronflant de son producteur Sam Raimi, le film horrifique Don’t move compte sur son high concept pour se distinguer : suivre le calvaire d’une femme (Kelsey Asbille) qui tente d’échapper à un homme (Finn Wittrock) en pleine forêt avant que le produit qu’il lui a inoculé la paralyse. Mais le thriller horrifique d’Adam Schindler et Brian Netto, paru sur Netflix pour offrir aux amateurs un petit frisson de saison, tient-il ses promesses ?

Don't move : critique d'une paralysie scénaristique partielle sur Netflix

Une structure perfectible

Une femme en deuil doit trouver le moyen d’échapper à son agresseur en pleine forêt avant que son système nerveux ne lâche : avec son high concept, Don’t Move plastronne aux côtés des Buried, 127 Heures, Jessie et autres Nowhere. La recette est connue : une situation de péril évidente et marquante, une durée resserrée (1h32 douche comprise), un budget contenu et le nom de Sam Raimi en énorme sur l’affiche pour espérer le transcender… alors qu’il n’en est que le producteur.

Contrairement à ce que son pitch pouvait laisser augurer, le scénario de T.J. Cimfel (V/H/S Viral) et David White (Intruders) rushe la partie où le produit gagne progressivement du terrain dans le corps de la victime, réduite à une dizaine de minutes. Le dilemme de l’effort physique qui accélère son effet offrait pourtant quelques promesses.

Sam et Frodon contre le naze-guy

L’héroïne est donc rapidement plongée dans un syndrome d’enfermement qui décuple sa vulnérabilité, mais dont les rebondissements nécessitent par définition l’intervention de tiers. La structure devient dès lors assez mécanique, alternant rencontres en apnée et petit creux dans l’attente de la suivante. Ce choix, respectable dans l’absolu, est plus discutable sur un concept de ce genre, qui se prête si merveilleusement au survival en crescendo continu.

Surtout que ces respirations servent traditionnellement à approfondir les personnages. Mais l’héroïne étant inerte et mutique la plupart du temps (une gageure pour Kelsey Asbille, échappée de Yellowstone), on les ressent comme ce qu’elles sont : un tracé sommaire entre deux points de tension à relier. L’aspect redondant de cette boucle narrative rend l’issue de chaque segment assez prévisible, même si certaines scènes se montrent plutôt honnêtes dans leur gestion de l’appréhension.

Evil forest of the dead

L’oppression par la parole

Avec sa trogne inquiétante, Finn Wittrock (American Horror Story) avance d’abord masqué en sauvant l’héroïne du suicide. La scène de son changement de visage, et la manière affreusement prosaïque dont elle se retrouve physiquement à sa merci, se révèlent glaçants.

S’il recourt volontiers à la chimie et aux violences diverses, il apparait que sa meilleure arme reste la parole. Le début du film est muet : c’est lui qui brise le silence pour l’attirer dans ses filets, et c’est par l’échange qu’il essaie de se sortir de situations compromettantes.

Certes, ce choix de valoriser la rhétorique ressemble aussi à une certaine facilité afin d’allonger la sauce à peu de frais. D’ailleurs, la mise en scène se montre affreusement balourde pour construire d’autres formes de suspense : une pensée émue pour sa tentative de faire monter la pression autour d’une tondeuse, avant qu’un plan large ne rende la menace risible.

Don’t morve

Ce procédé offre toutefois quelques pistes métaphoriques simplistes, mais pertinentes. Bien qu’une thèse récente fasse du Petit Chaperon rouge un avertissement contre les menaces du foyer plutôt que contre l’extérieur, que le danger se déploie en forêt évoque forcément le grand méchant loup, inconnu à l’abord affable qui se repaît de vulnérabilité.

Le problème, c’est que le comportement de l’antagoniste relève d’un mélange d’ultra clairvoyance et de connerie absolue. Il est à la fois l’agresseur le plus prévoyant du monde et le plus stupide, puisqu’il vérifie les paramètres de sa montre connectée (au lieu de lui enlever) et lui administre un puissant calmant « au cas où »… mais oublie de lui faire les poches.

Cette écriture approximative empêche par ricochet de s’immerger dans la reconstruction de l’héroïne, qui (re)trouvera dans cet affrontement une combattivité inattendue. Jusqu’à reprendre goût à la vie, à la manière d’un Gravity dont Don’t move épouse un moment clé.

Don’t Move est disponible sur Netflix depuis le 25 octobre 2024 en France

Rédacteurs :
Résumé

Avec sa structure un peu rigide, Don’t move dilapide inutilement ses forces, au point d’apparaître parfois paralysé par son propre high concept.

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gh0st

Du vu et re vu ce genre de film.
Absolument pas innovant.
Il y en a de biens meilleurs dans le genre.
Ennuyant, pour ma part

davidberthelot

Le concept est sympa mais l’écriture un peu faible… Finn Wittrock est excellent, j’adore sa bizarrerie charmeur inquiétant.
La bise

morgiana83

Regardé d’une traite, j’ai pas vu le temps passer (ce qui est assez rare pour moi quand je regarde un film) donc perso je valide 😉