Alien : Isolation a été une expérience "bizarre et très intense" racontent les créateurs

JL Techer | 10 août 2021 - MAJ : 10/08/2021 18:35
JL Techer | 10 août 2021 - MAJ : 10/08/2021 18:35

En 2010, Creative Assembly donna vie à un survival-horror exceptionnel, en créant Alien : Isolation pour consoles et PC. Exploration de la genèse d'un monstre. 

Travailler sur l'adaptation d'une licence cinématographique au format du jeu vidéo est toujours un sacerdoce pour les studios de développement. Entre les directives des détenteurs des IP, les attentes des joueurs et les contraintes de développement, le résultat finit la plupart du temps en un simple produit markéting (n'est-ce pas Marvel's Iron Man VR ?).

Toutefois, il existe également des éclairs de génie, des momentums où les astres s'alignent pour donner lieu à d'authentiques chefs-d'oeuvre. Alien : Isolation est de ceux-là. Créé par le studio britannique Creative Assembly (sous l'égide de Sega), avec la bénédiction et le soutien de la 20th Century Fox, le titre fut le fruit d'un travail d'orfèvres créé par des fans de la saga Alien. Ce jeu exceptionnel permit une totale immersion dans une des sagas de SF les plus appréciées par les amateurs de frisson spatial. 

 

photo"Devine qui vient diner ce soir ?"

 

Le magazine PC Gamer a eu la chance de pouvoir longuement s'entretenir avec les développeurs de Alien : Isolation, interview grâce à laquelle les conditions de la genèse du titre deviennent plus claires. Creative Assembly, studio derrière les excellents jeux de stratégie Total War, a tout d'abord fait le choix de ne pas axer leur jeu sur les volets post-James Cameron de la saga. En renouant avec le premier volet filmique, les développeurs firent le choix de se recentrer sur l'horreur et la peur

Un choix de raison puisque cela leur permit d'obtenir le soutien inconditionnel de la Fox. En effet, la major fut séduite par la proposition de retrouver les frissons du premier épisode, et donna aux développeurs un accès à une immense quantité d'archives, pour la majorité jamais diffusée, allant des travaux préparatoires, à des Polaroids et des photographies des costumes et décors. Alistair Hope, responsable créative chez Assembly, a déclaré : 

"C'était comme ce moment dans Pulp Fiction où ils ouvrent la valise. Nous étions stupéfaits que tout cela existe. C'était génial qu'ils puissent nous donner cette quantité de matériel. Cela nous a donné un très bon aperçu de la façon dont le premier film a été réalisé."

 

Photo NostromoLa cène de Ridley Scott

 

Pour coller au mieux au matériau d'origine, toute l'équipe s'est bien évidemment immergée dans le premier volet de la saga. Les membres du studio ont regardé le joyau d'horreur de Ridley Scott en boucle, afin de s'imprégner de chaque détail du film. Un jusqu'au-boutisme qui se ressent en jeu grâce à l'environnement (level-design, bande-son) et à l'interface rétro-futuriste qui rappelle les recoins sombres et les équipements du Nostromo.

La direction artistique d'Alien : Isolation est non seulement d'une fidélité à toute épreuve à son modèle, mais cela a aussi permis de renforcer le sentiment de peur en jeu. Avec son design sale, presque "lo-fi", très crédible, le futur d'A:I est ancré dans une implacable réalité. Ici, ne comptez pas trouver de "Big Fucking Gun" à la Doom Eternal pour vous en tirer vivant. Alistair Hope a expliqué que : 

"Même si c'est le futur, ce n'est pas la technologie qui va vous aider à survivre à cette créature extraterrestre. Quand vous regardez Alien, vous n'avez pas l'impression qu'il y a un casier quelque part avec un gros pistolet qui va être la réponse aux problèmes de l'équipage. Malgré toute cette technologie, il s'agit vraiment d'utiliser ses instincts pour rester en vie."

 

photoÀ quelques "bip" de l'horreur

 

Bien qu'Isolation se soit énormément inspiré du film de Scott, il a également su prendre quelques distances pour offrir une expérience de jeu originale. Ainsi, si les joueurs incarnent bien une Ripley dans le jeu de Creative Assembly, il ne s'agit pas de la légendaire Ellen Ripley campée par Sigourney Weaver, mais de sa fille, Amanda Ripley (incarnée par la très convaincante Andrea Deck). On pourrait argumenter en disant que malgré cela, le titre reste un quasi copié-collé du film de 1979. Ce qui est totalement assumé par l'équipe comme l'atteste la directrice créative : 

"Nous voulions raconter une histoire qui soit étroitement associée au premier film. Amanda étant la fille de Ripley, l'enregistreur de vol du Nostromo, le positionnement de l'histoire pour qu'elle se déroule quinze ans plus tard..."

  photoUn air de famille ?

 

Afin de se détacher de l'impression d'arpenter le vaisseau d'Alien premier du nom, et accentuer le sentiment de peur, les développeurs ont multiplié les dangers. Non seulement, il n'y a pas un, mais bien deux aliens à bord du Sevastopol, pour une double dose de terreur, mais les joueurs sont aussi confrontés à des ennemis synthétiques nommés Working Joes

Avec leurs yeux luisants, leur peau grisâtre et leur voix désincarnée, ils contribuent à maintenir une tension permanente en jeu, malgré le fait qu'ils soient moins dangereux que les aliens. Catherine Woolley, designer qui a également travaillé sur le scénario, est revenue sur la création de ces ennemis :

"Nous savions que les joueurs ne pouvaient pas être confrontés à l'alien pendant toute la durée du jeu. Ça aurait été beaucoup trop stressant. Nous avons donc ajouté les Working Joes au jeu. Ils ont été conçus pour être aussi imprévisibles que l'alien, en suivant rarement un itinéraire prescrit [...]  Un adversaire plus coriace par rapport aux humains, mais dont la vitesse de marche lente était leur principale faiblesse."

 

PhotoFantomas se déchaine, dans l'espace

 

Le jeu n'oublie pas non plus son statut d'expérience vidéoludique, et contient une bonne dose de fan-service et de surprises à destination des fans. À commencer par la distribution des rôles, qui voit une partie du casting du film de 1979 réunie pour la première fois plus de trente ans après Alien. Ainsi, Sigourney Weaver revient en tant qu'Ellen Ripley, de même que Tom SkerrittYaphet Kotto et Veronica Cartwright qui reprennent les rôles d'Arthur Koblenz Dallas, Dennis Monroe Parker et Joan Marie Lambert.

Pour les convaincre de venir participer au projet, le studio a dû faire preuve de diplomatie, et cela ne s'est pas fait sans émotion :

"Nous leur avons dit que le jeu consistait à survivre, pas à tuer. Ils ont vu le soin que nous avons apporté à l'atmosphère. C'était vraiment excitant qu'ils disent oui. Sigourney Weaver allait jouer Ripley pour la première fois dans un jeu vidéo. C'était vraiment spécial".

 

photoRipley n'a pas pris une ride

 

Près d'une dizaine d'années après sa sortie, Isolation conserve une aura très particulière dans le coeur des joueurs, et des connaisseurs de la saga Alien. Son ambiance, sa réalisation, ses grands moments de frayeurs et son scénario ont contribué à rendre ce titre exceptionnel. Consécration ultime s'il en est, le jeu n'est pas un simple spin-off ou produit dérivé de la saga, mais bel et bien considéré par la Fox comme un élément canon à part entière de la série Alien.

À l'évocation du travail mené sur ce titre, et de l'accueil critique et public dithyrambique qui fut réservé à Isolation lors de sa sortie, Jon McKellan, créateur de l'interface du jeu, ne cache pas son émotion : 

"Je n'avais rien vécu de tel, et je doute que cela se reproduise un jour. J'avais regardé ce film un nombre incalculable de fois avant de penser que je travaillerais un jour sur la franchise, et nous étions là, en équipe, à créer cette expérience nouvelle, bizarre et très intense pendant des années. Que les gens y répondent si bien, et le légitiment comme un chapitre authentique et canonique de la saga Alien... ouais, c'est difficile de réaliser."

Alien : Isolation est la preuve que lorsque s'unissent passion, savoir-faire, respect de l'oeuvre d'origine et liberté créative, le résultat peut aller bien au-delà des espérances. Aliens : Fireteam Elite va avoir fort à faire s'il souhaite pouvoir aller tutoyer ce titre dans le coeur des gamers.

Tout savoir sur Alien : Isolation

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commentaires
MadMcLane
11/08/2021 à 15:37

Faudra que je le reprenne aussi, j'ai arrêté après quelques heures, gavé de ne rien pouvoir faire face à l'Alien qui te repère facile et te charcute de suite. Mais bon l'ambiance est top quand-même, gros travail sur le design à saluer, je vais m'y remettre une fois...

Lorian
10/08/2021 à 23:14

Pour ma part l'ayant fait il y a peu près 5 ans, avec donc des souvenirs assez évanescents, je me rappelle avoir eu une relative bonne expérience du jeu, honnêtement il n'y avait rien à dire sur la DA, les mecs de Créative Assembly avait tout compris, en reproduisant à la perfection l'ambiance du premier film; et c'est d'ailleurs principalement le point fort du jeu, avec le sound design extrêmement bien reproduit... Bref le fan service était clairement présent, le scénario, j'en ai plus aucun souvenir, et même en jeu, ça m'avait pas scotché plus que ça, maintenant ce qui était gavant, c'était les nombreux allers retours, la linéarité du titre, et surtout.... surtout l'IA de l'Alien qui était pas loin de gâcher mon expérience de jeu, c'était tellement casse burne que j'avais hésité à installer un mod pour virer l'Alien justement...

Pourquoi ? Parce qu'il était impossible de visiter une zone malgré le fait qu'on fasse profil bas, l'alien venait à poper constamment près du joueur, pour moi c'était infernal.. Quel intéret d'incorporer de l'infiltration si c'est pour se faire "spotted" par l'IA en permanence, du coup, j'en venais à rusher des zones de jeu, puisque je ne pouvais pas m’approprier une zone ... bref le jeu était déséquilibré à ce niveau... et puis une dernière chose, la longueur du jeu, certains ont apprécié, pour ma part, c'était vraiment long pour un jeu de ce type où on se tape des allers retour... mais malgré tout 5 ans après j'en garde un beau souvenir, grace à la plastique du jeu qui fait toujours son effet et cette ambiance si particulière du premier film si on est fan...

Kyle Reese
10/08/2021 à 21:11

Je n’y ai joué que quelques heures dans le noir avec le casque.
Les décors, graphismes et sound design sont fabuleux. Nous sommes quasiment dans le film . L’angoisse est là et je m’attendais à voir l’Alien à chaque recoin et ce depuis le début. Et puis à un moment j’ai arrêté car je ne pouvais pas me retrouver démuni, sans arme, à poil quoi à avancer le trouillomètre à zéro. C’est sûrement con mais ne pas avoir de grosse pétoire me rendait hyper nerveux (moi qui suit plus habitué à des jeux bourrin) et en plus le suspens dure longtemps car je n’ai pas croisé l’Alien durant ma durée de jeux assez limité. C’est un peu comme pour Resident evil 7. On se sent tout petit, vulnérable et le genre de système de sauvegarde que je n’aime pas n’aide pas.
Mais je me suis promis de reprendre le jeu un de ces jours il est trop beaux.

Leo
10/08/2021 à 20:13

Je n'ai fait le jeu que l'année dernière à tout petit prix, avec un casque VR (en mode cinéma), et franchement sans être un énorme fan de la série je l'ai trouvé incroyablement bon, immersif, sous-coté - ce jeu a une âme ! Il est long, très long, j'ai aimé les scènes cultes et le stress permanent qu'il procure. Franchement c'est jeu est une réussite.

Garm
10/08/2021 à 19:34

Chef d'oeuvre, ok l'IA est criticable, parfois l'alien a l'air de tourner en rond comme un débile, alors que dans les films il est souvent passif et caché dans l'ombre.
Par contre quelle immersion, le sound design de folie, la DA, la tension.... Meme le simple fait de lancer une sauvegarde ou de deverouiller une porte te provoque un sentiment d'angoisse

Milou
10/08/2021 à 17:45

@Snake

Lorsqu'une IA trop bichonnée, qui fait virer ton ennemi oracle, vient annihiler le peu de fun d'un jeu, oui, je la considère pété malgré ses milles qualités et comme un défaut.

Kojima avait eu un problème similaire lors des tests sur MGS et avait finit par abaisser son niveau.

L'IA, et particulièrement en difficulté max, transforme le jeu un stupide die and retry injuste qui couplé à des saves mal foutues et une boucle de gameplay périmée (même à l'époque) et pas très épaisse rend chaque mort toujours plus lourde.
Surtout avec cette magnifique anthologie de l'ouverture de porte.

Sans parler de l'effet assez catastrophique sur le rythme d'un scénario déjà pas ouf en plus de rallonger un jeu déjà trop long sans ça.

Jaime Jaime
10/08/2021 à 17:19

Chef-d'œuvre absolument pas.
Au bout de 25 min, de 12 kms de couloirs, il ne se passe rien.
J'ai abandonné.
Trop mou.

Portal est un chef-d'oeuvre.
Gears of war 2 est 1 chef d'oeuvre
Modern warfare 2 aussi.

Snake
10/08/2021 à 17:17

@Milou

T'es complétement a la ramasse mon gars... Tu peux avoir l'avis que tu veux sur le jeu mais l'IA de l'Alien a été saluée unanimement comme une des meilleures IA jamais faites. Les développeurs ont travaillé des années dessus et ont désigné le jeu tout autour de celle-ci, la rendant à la fois pragmatique mais aussi imprévisible. Dans le niveau de difficulté max, l'Alien est absolument implacable. Il y a pleins de vidéos sur Youtube sur le sujet, faut juste se renseigner au lieu de dire n'importe quoi.

Giro
10/08/2021 à 16:52

Super papier les gars,par contre le jeu n'a "que" 7 ans hein ;)

Milou
10/08/2021 à 16:44

"des momentums où les astres s'alignent pour donner lieu à d'authentiques chefs-d'oeuvre. Alien : Isolation est de ceux-là."

Au mieux, c'est un jeu sympathique, au pire, un jeu de cache cache chiant avec un Alien à l'IA pété de partout...
Faut vraiment n'avoir joué à rien avant pour lui flanquer l'étiquette de chef d'oeuvre...

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