Bird Box Barcelona : critique d'une fausse suite et vrai ratage Netflix

Dis moi ce que tu vois

En 2018, Bird Box débarquait dans le catalogue des exclusivités Netflix. Adapté du livre de Josh Malerman, réalisé par la danoise Susanne Bier et porté par Sandra Bullock, le film d'horreur profitait allègrement de la popularité de Sans un bruit pour s'articuler autour d'un high-concept similaire : de mystérieuses créatures ont envahi la terre, et le moindre contact visuel avec ces dernières pousse quiconque à se donner la mort, évidemment de manière plutôt graphique. 

Malgré une réception critique relativement fraîche (c'est le moins que l'on puisse dire), force est de constater que Bird Box a conquis en nombre les utilisateurs de la plate-forme américaine, au point de se maintenir à l'heure actuelle dans le top 10 des longs-métrages les plus visionnés par les abonnés à Netflix. Même si l'idée d'une suite a rapidement fait son chemin, le plus grand écueil des œuvres destinées exclusivement à la SVoD (à savoir leur statut de produits régulièrement jetables) nous poussait à détourner le regard de la licence, pour ne plus en attendre grand chose.

Vite vu, vite oublié

à tâtons

Et pourtant, cinq ans après la sortie du premier film, Netflix tente le pari de la délocalisation avec Bird Box Barcelona. Entièrement tourné en espagnol, le long-métrage ne fait pas office de suite directe à Bird Box, mais plutôt de vision alternative entièrement désolidarisée de son prédécesseur, qu'il ne sera donc pas nécessaire de visionner au préalable.

Signe encourageant au premier abord : le projet a été confié aux frères David et Àlex Pastor. Solides scénaristes et réalisateurs issus de la péninsule ibérique, les Pastor se sont déjà révélés aux commandes des plaisants Les Derniers jours et Chez moi, ainsi qu'à l'écriture du Renaissances de Tarsem Singh.

Au casting, nous retrouvons dans le rôle principal l'irrégulier mais charismatique Mario Casas, vu dans l'efficace Groupe d'élite mais surtout Les Sorcières de Zugarramurdi d'Àlex de la Iglesia. A ses cotés, la distribution hétéroclite souffle le chaud et le froid, même si certains comme Diego Calva (débarqué du Babylon de Damien Chazelle) ou la comédienne britannique Georgina Campbell tirent sporadiquement leur épingle du jeu.

Au moins eux, ils ont pas vu The Flash

Relocalisée en Catalogne donc, l'intrigue de Bird Box Barcelona suit, comme de coutume, la quête un tantinet désespérée d'un groupe de survivants en pleine apocalypse. Alors que la menace émanant des mystérieuses créatures est encore bien présente, forçant chacune et chacun à se bander les yeux en extérieur sous peine de mort immédiate, de nouveaux antagonistes font leur apparition. Esquissée dans le premier Bird Box, la menace des "regardeurs" est cette fois au centre du récit. 

Ces humains, immunisés à l'influence des créatures de par leur génome atypique, ne survivent que dans un seul but : forcer les autres rescapés à voir, en les précipitant vers une mort certaine sous couvert de dogmatisme religieux fumeux. Notre groupe de courageux (ou pas) miraculés va donc devoir traverser Barcelone, pris en tenaille entre les monstres et leurs servants impitoyables.

Le tourisme, c'était mieux avant

Les yeux grands fermés

D'emblée, donner la responsabilité de ce spin-off à des cinéastes espagnols — pays où un certain cinéma fantastique dit débrouillard comporte pas mal de fortes personnalités, dont font partie les Pastor — semblait être un pari au risque limité. Pourtant, on sent les deux réalisateurs souvent timorés, et prisonniers des quelques éléments d'univers mis en place précédemment. Une nouvelle occasion de toucher du doigt toutes les limites des high-concepts, immédiatement séduisants mais terriblement soporifiques sur la durée.

On attend Bird Box Strasbourg

Nous retiendrons tout de même un certain sens de la mise en scène toujours présent chez Alex et David Pastor, au détour de quelques séquences urbaines tendues et d'un hors-champ correctement employé (la séquence introductive du bus, ou encore celle de la disparition des chiens).

Autre idée intéressante à dégager de cet ensemble bien convenu (et qui n'utilise d'ailleurs jamais l'urbanisme de la ville qu'il met pourtant sans cesse en avant) : la caractérisation de la menace indicible, qui prends ici une valeur symbolique et picturale convaincante... mais malheureusement sous employée.

Bird Box Barcelona est disponible en exclusivité sur Netflix depuis le 14 juillet 2023