Heath Ledger à l'honneur sur la Croisette
Ce matin, le nouveau film de Terry Gilliam, L'imaginarium du docteur Parnassus a été présenté à la presse. Un événement sur la Croisette puisqu'il s'agit du dernier film du regretté Heath Ledger, décédé en plein milieu du tournage et que le réalisateur remplaça par une pirouette scénaristique en faisant jouer son personnage par trois autres comédiens : Johnny Depp, Jude Law et Colin Farrell.
Une trouvaille aussi simple qu'ingénieuse qui, à l'écran, ne surprend
pas le moins du monde puisque sitôt franchi le miroir magique de cet
Imaginarium, tous les délires visuels sont permis.
C'est d'ailleurs la seule chose qu'il faudra retenir du nouveau
long-métrage de Terry Gilliam, cinéaste débordant d'imagination pour
concevoir et porter à l'écran des univers comme nul autre pareil.
Désormais armé de l'outil numérique et ses possibilités quasi infinies,
Gilliam s'en donne à cœur joie : des gondoles vénitiennes côtoient les
pyramides d'Égypte au pied desquelles serpente un fleuve de couleur
noire, la luxure d'un palace cède la place à une terre de désolation où
siège un gigantesque escalier vers l'échafaud... Plaisante au début,
cette effervescence visuelle tourne hélas rapidement à vide. Pire
encore : la scène où un gamin pénètre cet univers
fantastico-cauchemardesque console de jeux en mains nous fait même,
l'espace d'un instant, furieusement penser à du Spy kids.
Soit un gigantesque jeu vidéo dont l'objectif serait de déterminer qui
du Diable ou du Docteur l'emportera et où la récompense suprême serait
la « princesse » Valentina, la fille de Parnassus dont Tony tombe
instantanément amoureux, interprétée par Lily Cole, comédienne
britannique aussi inconnue que voluptueuse et séduisante.
De ces possibilités sentimentales (la relation père-fille et l'histoire
d'amour) sur toile de fond faustienne découle dès lors un délirium
visuel à la finalité vaine. Après deux adaptations déjà peu
convaincantes (Tideland et Les Frères Grimm), Terry Gilliam referme donc les années 2000 avec L'Imaginarium du Docteur Parnassus, une histoire originale coécrite en compagnie de Charles McKeown. Si ce dernier avait déjà prêté sa plume à Brazil et Les Aventures du Baron de Munchausen,
le cinéaste quant à lui est loin de renouer avec son génie visionnaire
de l'époque. Quant à Heath Ledger auquel ce film est dédié, bien que
débordant de passion théâtrale et sentimentale, son personnage
rappellera davantage le Casanova
de Lasse Hallström (le déguisement n'aide pas à l'affaire). Du regretté
acteur australien, on préférera donc amplement conserver l'image de sa
prestation époustouflante en tant que Joker dans The Dark Knight.
Stéphane Argentin