Critique : Tout est pardonné

Vincent Julé | 26 septembre 2007
Vincent Julé | 26 septembre 2007

Il suffit d'un regard. La jeune cinéaste Mia Hansen-Løve l'a compris et surtout admirablement mis en scène. Ainsi, en une série de plans fixes, elle confère au léger et envoûtant strabisme de l'actrice et révélation Constance Rousseau, la profondeur de l'instant et la puissance de l'évocation. Car cette scène pivot, où l'adolescente Pamela hésite à revoir son père Victor, n'intervient que tard, aux trois-quarts du film. Avant, l'enfant éveillée et bavarde est le témoin de la lente et silencieuse déchirure de ses parents, et le spectateur de l'errance et du poids d'une existence. En adoptant le point de vue du père aimant, du mari désolé mais surtout d'un homme perdu (en lui-même), le film fait alors rien de moins que le portrait d'une humanité contrariée, où ni l'amour ni le temps ne semblent avoir d'emprise. Chaque geste anodin, chaque éclat inattendu y est saisi par la caméra avec grâce et gravité.

 

Lorsque Pamela réapparaît, à la fois jeune et épanouie, la mise en scène s'illumine, épouse son personnage mais aussi son époque, mais déjà les destins brisés, solitaires et conscients ou pas imprègnent les séquences et les silences d'une étrange et précieuse émotion. Il est alors moins question de tout pardonner, que de reprendre son combat contre le temps qui passe, d'un jour à l'autre, d'une génération à l'autre. Et bien qu'il soit perdu d'avance, le film lui donne une sensibilité, une sincérité et finalement une liberté, auxquelles il serait dommage de ne pas goûter même si l'on est réfractaire au temps qui passe au cinéma.

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