Critique : Chez Gino

Sandy Gillet | 30 mars 2011
Sandy Gillet | 30 mars 2011

On a connu Benchetrit plus inspiré. Ou tout simplement plus nuancé dans ses « inspirations ». On le sait, le cinéaste pompe sans vergogne le bestiaire de son vécu cinématographique pour le régurgiter la plupart du temps de façon déviant pour ne pas dire original. C'était tout l'intérêt de sa filmo jusqu'ici. Janis et John et plus encore J'ai toujours rêvé d'être un gangster affirmaient peu à peu l'homme derrière la caméra mais aussi un univers bien à lui composé surtout donc de fantômes d'un monde révolu. Celui de l'âge d'or du cinéma hollywoodien et européen. Chez Gino veut surfer sur ce plaisir et ce fantasme de cinéma sans plus y parvenir tout à fait, comme si Benchetrit, malgré une bonne volonté et une sincérité évidente, n'arrivait plus à colmater les brèches d'un système quelque peu éculé.

Et pourtant on en prend encore du plaisir à découvrir cette comédie un peu foutraque aux forts accents de « commedia all'italiana » qui commence comme un De Sica et se termine façon Affreux, sales et méchants d'Ettore Scola. Bien d'autres clins d'œil parsèment d'ailleurs un film au demeurant généreux avec ses acteurs à commencer par un José Garcia égal à lui-même en pizzaiolo de la banlieue bruxelloise nanti d'une famille peu encline à le considérer comme le chef de clan. Servi par des dialogues aux petits oignons, il s'en donne à cœur joie dans ce rôle dans le rôle où il doit se faire passer pour un caïd mafieux digne de toucher une partie de l'héritage en provenance d'un oncle sicilien « en fin de vie ». Et pour apporter cette preuve irréfutable, il s'entoure d'un réalisateur autoproclamé comme tel et de son équipe de bras cassés. Le but : réaliser un documentaire à la gloire de sa personne en parrain local. On imagine sans mal avec un tel pitch de départ combien la chose convient à la gouaille et aux talents innés d'un José Garcia toujours aussi à l'aise dans l'imposture et le déguisement. Après on peut aussi préciser que l'on vient juste de le quitter avec Le Mac, autre film, un peu le même rôle. Bref on est en terrain connu ici. Depuis l'univers maintenant balisé et connu de Benchetrit jusqu'aux personnages devenus caricatures de son propre cinéma de l'emprunt.

En fait, le plaisir on le prend ailleurs. Dans cette propension peu évidente au début de regarder quelque chose de pas tout à fait fini où le personnage du réal joué par Benchetrit lui-même sonne un peu faux tant il est évident que l'homme a bien fait de choisir réalisateur première langue à l'école de la vie. Le reste du cast est d'ailleurs à l'avenant. Anna Mouglalis se donne tellement du mal en épouse vulgaire et acariâtre que cela en est touchant. Sergi López semble tellement à des années lumières de son personnage de raclure romano du coin que le décalage opère et la poésie affleure, parfois. On l'aura compris, Chez Gino est une comédie tellement fourre tout et gracieusement bancale que chacun pourra y trouver son petit bonheur. Mais attention, pas certain que cela fasse encore la blague la prochaine fois...

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