Critique : My name is Joe

Nicolas Thys | 13 octobre 2007
Nicolas Thys | 13 octobre 2007

My name is Joe c'est une rencontre entre deux mondes a priori proches : la classe moyenne inférieure, celle qui possède une voiture et touche un chèque à la fin du mois, et la classe populaire. Souvent au cinéma cette rencontre aboutit à une élévation, même légère, du niveau de vie et à un semblant de bonheur, en fait une simple façade mais le cinéaste s'appelle Ken Loach et l'action se situe en Grande Bretagne, nation des drames cinématographiques parmi les plus sordides depuis la fin du règne Thatcher.

Cette rencontre entre un homme et une femme, seuls tous les deux, sans vie réelle mais avec en commun une recherche désespérée du bonheur voire d'un soupçon, va vite se révéler impossible, improbable. L'illusion est courte mais elle est le propre du cinéaste qui malgré quelques indices nous leurre, avant de nous ramener de force à la cruauté d'un quotidien infernal. La réalité se manifeste plus brutalement quand les rêves se brisent d'un coup et Loach est passé maître en ce domaine. Le destin rattrape toujours ceux qui tentent de survivre.

Mais My name is Joe c'est aussi une affaire de papier peint. La distinction des deux classes vient de là : de la couleur des murs, de la possibilité d'ôter le blanc et de marquer son territoire, de posséder un chez soi. Face à eux les quatre murs incolores et vides d'appartements de dealers accrocs incapables de se déplacer, prisonniers volontaires d'un univers claustrophobe que même les miroirs ne parviennent à agrandir. Leur seul instant de liberté, toujours surveillé par Joe : un match de foot avant de rejoindre leur cercueil moderne. Le papier peint apporte une matière, une couleur, il transforme littéralement l'espace et le rend supportable. Il est la frontière entre deux individus incapables de se comprendre : l'assistante sociale pour qui la réalité est pure théorie malgré son emploi et le bon samaritain qui la pratique chaque jour en portant le poids du monde sur ses épaules.

Au final, un Loach sombre ou plutôt surexposé et aveuglant - ce qui revient sensiblement au même - un drame poignant, beau et réfléchi à éviter en cas de dépression.

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