She-Hulk : faut-il être fou pour défendre la série Marvel ?

La Rédaction | 29 août 2022 - MAJ : 29/08/2022 12:50
La Rédaction | 29 août 2022 - MAJ : 29/08/2022 12:50

Les deux premiers épisodes de She-Hulk : Avocate divisent la rédaction d'Écran Large. Et pour l'occasion, nous avons réuni les sujets principaux de discorde, les arguments qui les illustrent... et on a secoué. Fort. Longtemps.

She-Hulk était une promesse de divertissement simple, accessible, porté sur l'humour et l'étude d'un personnage sous-estimé mais au potentiel très riche pour Marvel. En somme, Disney s'essayait à la pure comédie féminine contemporaine, un sous-genre dans l'air du temps, mais qui compte déjà de nombreux et fiers représentants. La cousine de Bruce Banner est-elle une clone ratée d'Ally McBeal, ou la frangine cachée de Fleabag ?

 

She-Hulk : Avocate : photo, Tatiana MaslanyC'est l'heure de la plaidoirie

 

C'EST FÉMINISTE

VRAI : She-Hulk n'est pas tant une série féministe qu'une série consacrée à un personnage se débattant avec le féminisme. Le sien (quand elle ouvre les yeux, dès le pilote, à son cousin, sur sa suffisance), celui des autres, mais aussi ses incarnations plus ou moins grossières ou contradictoires dans le quotidien de tout un chacun. Par conséquent, Jennifer doit composer avec ses aspirations, le plus souvent contradictoires. Être une héroïne ? Surtout pas ! Se laisser marcher sur les pieds ? Hors de question ! Jouer de son physique pour obtenir un emploi ou une forme de validation sociale... c'est tout de suite plus compliqué.

Si la série n'a ni l'ambition ni les moyens artistiques de développer un discours critique très fin sur le sujet, elle a l'immense mérite de confronter son héroïne aux problématiques de son époque avec un mélange d'inventivité, de bonne humeur et de malice ludique qui fait du bien. L'observer s'arrachant les cheveux à déterminer si travailler dans sa forme super-héroïque pour s'attirer les bonnes faveurs de ses employeurs, des médias ou des mâles alentour est en soi, un assez formidable terrain de jeu pour tout personnage désireux d'explorer les problématiques liées au féminisme contemporain.

 

She-Hulk : Avocate : photo, Tatiana MaslanyTout le monde voit vert

 

FAUX : Entre les démonstrations de sororité, la dénonciation du harcèlement de rue, l'invisibilisation des femmes au travail ou le recadrage de Bruce Banner, les deux premiers épisodes de She-Hulk dressent en effet une liste plutôt exhaustive des problématiques contemporaines que rencontrent les femmes. L'écartèlement idéologique du personnage en revanche est une version carencée des errements de Fleabag et toutes les notes d'intentions et propos faussement éclairés ont du mal à cacher les problèmes de fond de la série. En particulier plusieurs choix de production qui dépassent l'héroïne.

She-Hulk a du mal avec l'idée que les gens – et surtout les hommes – ne s'intéressent à elle que parce qu'elle a un super cul et représente un genre de fantasme, mais la faire relativement fine et sexy était un choix conscient (et un gros rendez-vous manqué pour varier le catalogue). De même, la série s'emploie à dénoncer le pseudo réducteur de "She-Hulk" alors même que c'est le titre de la série. Et comme dit Jennifer Walters le dit dans le premier épisode : "Tu l’utilises, tu le valides". À voir si les prochains épisodes sauront rééquilibrer ces deux approches pour l'instant contradictoires.

 

She-Hulk : Avocate : photo, Tatiana MaslanyC'est assez rageant, oui

 

C'EST DRÔLE 

VRAI : Fait rare chez Marvel, voici un récit dans lequel l'humour n'est pas un cache-misère dramaturgique. En effet, les gags ou blagues qui émaillent régulièrement le récit n'ont pas pour but de dissimuler l'incapacité du scénario à traiter tel ou tel élément difficilement crédible, porteur d'émotion ou possiblement de violence... les vannes ne sont là que pour nous faire rire.

Y parviennent-elles ? Parfois. Moins souvent que dans Friends, Community ou The Leftovers, mais de par leur positionnement au sein du récit, tout comme la dimension gentiment loseuse de leur personnage principal, les épisodes accueillent plutôt naturellement les saillies comiques, qu'elles touchent parfaitement leur cible ou non. Et ce, grâce à une raison évidente : Tatiana Maslany, de toute évidence née pour incarner un personnage aussi démonstratif qu'impulsif, léger que sentencieux, colérique qu'aspirant à la frivolité. C'est d'ailleurs souvent elle qui transcende, de par son électrique énergie et sa bonne humeur communicative, les limites de la mise en scène ou du montage en matière de tempo blagueur.

 

She-Hulk : Avocate : photo, Mark RuffaloAlors Hulk trouve ça drôle, et c'est déjà ça

 

FAUX : Après le pastiche de WandaVision, qui reprenait les procédés visuels et narratifs des sitcoms de toutes époques en retraçant leur évolution, proposer une vraie sitcom était plutôt malin. Et Tatiana Maslany, par le débit de ses répliques, son expressivité et son jeu physique, est vraiment super (mais ça, on n’en doutait pas une seconde). 

Là où ça pêche, c'est plutôt du côté de l'écriture, avec des gags paresseux – sur la virginité de Captain America, par exemple – qui reposent presque uniquement sur l'interprète. C'est elle qui insuffle tout le tempo comique, plus que le montage ou la mise en scène, pourtant essentiels pour réussir l'exercice. Enfin, de la même manière qu'il est agaçant de voir le QI de Thor dégringoler à chaque film, voir Bruce Banner devenir un personnage neuneu est irritant, même dans le cadre d'une sitcom.  

 

She-Hulk : Avocate : photo, Mark RuffaloTrop tirer sur l'élasthanne

 

IL FALLAIT BRISER LE QUATRIÈME MUR

VRAI : Briser le quatrième mur, c'est-à-dire accepter que la convention créant un espace artificiel entre réel et fiction ne soit rien de plus... qu'une convention, c'est un des gestes les plus forts et essentiels du théâtre, où l'adresse aux spectateurs constitue une des plus anciennes figures de style pratiquées par les personnages. Moins fréquente au cinéma, la pratique n'en est pas moins extrêmement intéressante pour ce qu'elle ouvre de possibles doubles sens, de remise en perspective de la narration. Son usage est tantôt basique, comme dans Deadpool, ou extrêmement sophistiqué, comme dans Fleabag, mais le concept n'en demeure pas moins très stimulant.

Et maintenant, grâce à She-Hulk, on sait qu'il peut être totalement horripilant, absurde, placé dans un épisode en dépit du bon sens, et capable de mettre les nerfs en pelote de n'importe qui. Et ça, c'est en soi un bel exploit. Il ne reste plus qu'à espérer qu'un jour, la série s'inspire des adresses au lecteur imaginées dans les comics, qui donnaient à l'héroïne l'occasion de bouleverser complètement la diégèse et la narration. L'espoir fait vivre.

 

She-Hulk : Avocate : photo, Tatiana MaslanyFlemme Bag

 

FAUX : Les murs c'est important. Si on les brise, les maisons s'écroulent. Dans le cas présent, c'est la bienveillance du spectateur qui fait office de maisonnée. Et pour cause, si officiellement, les apartés de Jennifer lancés au visage du spectateur ont pour origine les comics eux-mêmes, non seulement ils trahissent totalement l'esprit délirant de ces derniers...

Mais ils ont en plus, dès le pilote, la paresse de copier les plus célèbres de la série Fleabag. Et comme, la faute à une écriture très irrégulière, on a le sentiment qu'ils ont été greffés au hasard au sein de la narration, sans souci de rythme ou d'impact sur le spectateur, ils en deviennent aussi dispensables qu'agaçants.

 

She-Hulk : photoNon, on ne veut pas être complice de ça

 

IL Y A TROP DE CAMÉOS 

VRAI : Vu qu'ils accaparent l'attention et ont servi d'arguments commerciaux durant la campagne promotionnelle, Hulk et Emil Blonsky sont plus des parasites laissés au premier plan que des vrais caméos. Le premier épisode est cependant le plus symptomatique du cahier des charges de Marvel vu qu'il sert moins à présenter Jennifer Walters au public qu'à préparer le futur du géant vert.

Entre le vaisseau saakarien, son super labo, son bras guéri, la confirmation qu'il peut reprendre sa forme humaine et son départ dans l'espace, l'épisode a grossièrement mis en place tous les éléments narratifs pour une prochaine série ou un prochain arc narratif autour de Bruce Banner. Quand on sait que Wong et Daredevil seront aussi de la partie, on se demande quand la série aura le temps de développer ou de nuancer la caractérisation de ses autres personnages "principaux".

 

She-Hulk : Avocate : photo, Tim RothL'abominable sourire

 

FAUX : Après quatre phases, presque une trentaine de films et déjà plusieurs séries, l'écurie Marvel déborde de héros, de seconds couteaux et de personnages pas toujours d'une grande importance, mais néanmoins identifiés, ne demandant qu'à être revisités. Et cela tombe bien, la production qui nous intéresse est celle dans laquelle ce grand recyclage est le plus logique. Avec une intrigue qui encourage une structure autour d'épisodes uniques, aux intrigues peu entremêlées, a fortiori au sein du système judiciaire américain, She-Hulk va probablement nous proposer plus d'une fois l'affaire ou le monstre de la semaine.

Quoi de plus normal et ludique, dès lors, de revisiter le bestiaire Marvel, ses méchants, ses anciens alliés, et plus globalement, tous ceux qui ont un jour ou l'autre filé un coup de main aux Avengers ? 

 

She-Hulk : Avocate : photo, Mark RuffaloEt même un gros coup de main

 

il n'y a pas besoin de MÉCHANT(e)

VRAI : Qui vivra verra, et rien n'indique que She-Hulk n'optera pas, après quelques épisodes, pour une trame narrative plus tenue, et opposera Jennifer à un antagoniste digne de ce nom. Mais pour le moment, rien de tel n'est nécessaire. En effet, toute héroïne qu'elle soit, et aussi super s'avère-t-elle, l'enjeu central de la narration n'est pas un conflit incarné par un adversaire unique dont la géante bleue devrait triompher. À la manière de quantité de récits contemporains, le seul champ de bataille de She-Hulk, c'est son héroïne elle-même.

Comment vit-elle ses pouvoirs ? Le regard des autres ? Peut-elle s'accepter ? S'assumer ? Progresser professionnellement ? Toutes ces questions sont autant de conflits qui ne nécessitent pas l'intervention d'un savant fou armé de rayons X pourfendeurs de veuves et d'orphelins.

 

She-Hulk : Avocate : photo, Tatiana MaslanyLes vrais méchants, à priori, c'est l'équipe maquillage

 

FAUX : L’idée de ne pas faire de She-Hulk une super-héroïne (même si elle est condamnée à en devenir une), mais plutôt une femme carriériste est assez rafraichissante. Elle colle plutôt bien avec le principe d’une sitcom aux scénarios très épisodiques, sans le schéma narratif convenu qu'on colle à chaque histoire de super-héros. Sauf qu’il est difficile de s’impliquer dans une série sans enjeu quand les personnages ne sont pas réellement attachants et que l’humour fonctionne une fois sur cinq.

Tout savoir sur She-Hulk : Avocate

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commentaires
Miami81
21/10/2022 à 13:37

Concernant un pseudo-féminisme, je trouve que les créateurs ont raté le coche, Car que retenons nous au final ? : Qu'en tant que super héroïne, elle préfère passer son temps à trouver un mec voire un amant que profiter de sa situation pour aider les autres. Qu'elle profite de son double personnage pour faire progresser sa carrière et bien passer en public (scène du mariage où la mariée est obligée e lui demander de reprendre forme humaine pour ne pas être la star du jour ou la scène de remise de prix).
Bref, si l'objectif était féministe et montrer qu'une femmes pouvait jouer égal avec un homme, je trouve ça raté. La perception du personnage est à mon sens litigieux. Si l'objectif de la série est de faire une série féminine à la sex and the city, le résultat est alors un peu plus cohérent.

sultano13
01/09/2022 à 13:54

Je me demande si le sgens qui commentent ici sont des habitués des séries marvel et plus généralement du MCU.. Par exemple quelqu'un qui n'aime pas les films d'horreur ou de guerre ben forcément faut pas regarder ce genre de films..
On dirait que les gens découvrent le fait qu'il y a ait un épisode par semaine alors que ça fait bientot 2ans que ce format est repris..Et pour info avant l'arrivée de Netflix, les séries se consommaient pas en mode boulimique, perso j'aime bien qu'il y ait du suspens et ça permet d'en parler tout au long de la semaine avec ses collegues, de faire des théories ect.. et cette série est connecté avec pas mal de chose et v ainstaller des choses essentielles pour la suite , je ne comprends pas les critiques mais arretez de regarder le MCU au lieu de toujours vous plaindre

Vesna Green
01/09/2022 à 11:02

Franchement j'ai du mal c'est très très moyen, j'attend de voir la suite ( je n'ai regardé que 2 épisodes) donc si arrivé au 5eme c'est tjr aussi plat et très moyen j'arrête perso, j'ai pu regarder 2 épisodes de Mrs Marvel, pareil vraiment vraiment nul ... Moon Knight c'est pas mal j'ai pas encore fini ( 3 épisodes de vu) mais c'est pas la folie non plus. Faudrait peut être revoir les réalisateurs et les scénaristes parce que même avec de bons acteurs ça rattrape pas les séries

Fontâmos
31/08/2022 à 14:57

Je suis déçu par le format de la série : trop peu d’épisodes (9 diffusés sur 9 semaines je crois) et/ou épisode trop court. Peut-être qu’il faudrait privilégier un « visionnage boulimique » de la série pour mieux l’apprécier.

Au final, une sitcom pas assez drôle pour l’instant.

Evidemment Tatiana Maslany est épatante.

Joe75
31/08/2022 à 13:36

Pour moi un des problème des séries Marvel, c est la durée...on est vite frustré avec des épisodes de durée variable 30 mn puis 38mn. On ne s ennuie pas mais c
Ça reste du divertissement un peu fade, globalement plutôt déçu des productions Disney+ quand je compare à la qualité des histoires de super héros sur netflix (Daredevil, Luke Cage,Jessica Jones,...,)

Simon Riaux
31/08/2022 à 10:03

@Cidjay

On en a plus qu'hier et moins de demain.

Et on essaie de les traiter avec le respect qui leur est dû et de ne pas les laisser débarquer dans une section commentaire aux airs de bras d'égoût. Surtout les gens qui ont utilisé plein de pseudos différents pour poster des dizaines de commentaires.

Cidjay
31/08/2022 à 08:16

Un paquet de commentaires ont été supprimés... vous avez trop de lecteurs ?

Dankin
30/08/2022 à 21:01

A quel moment the leftovers est drôle ???

jérome2
30/08/2022 à 16:47

Je parie que c'est Geoffrey qui n'aime pas aimé la série

Guihero
30/08/2022 à 15:09

@Nyl, pareil, j'ai pas compris le coup de la "Géante bleue", vous avez des soucis de Daltonisme dans l'équipe ?

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