Eric Mabius (Ugly Betty)

Stéphane Argentin | 15 avril 2008
Stéphane Argentin | 15 avril 2008

Dans Ugly Betty, Eric Mabius interprète Daniel Meade, personnage queutard, vindicatif et dragueur impénitent. À la ville et derrière son visage angélique, Eric révèle une toute autre personnalité : celle d’un comédien qui a le cœur sur la main et ne s’arrête pas à la seule beauté physique mais ô combien superficielle.

 

Attention aux spoilers : Cet entretien aborde différents éléments d’intrigue de la saison 1.

 

Propos et autoportrait (en fin d’article) recueillis au cours du 47ème Festival de Télévision de Monte-Carlo (juin 2007).

 

 

Dans quelles circonstances êtes-vous arrivé sur Ugly Betty ?

Je venais tout juste de me marier à la Nouvelle-Orléans et mon agent me hurlait de revenir car ils ne parvenaient pas à trouver leur Daniel Meade. Mon épouse et moi avons donc annulé notre lune de miel pour revenir à Hollywood où j’ai lu le script d’Ugly Betty. Sur le papier, je trouvais l’idée brillante mais après avoir rencontré les producteurs, je me suis rendu compte que cela risquait de ne pas coller car nous n’avions pas le même sens de l’humour. Et alors que je me rendais aux auditions de Heroes pour le rôle de Peter Petrelli (finalement tenu par Milo Ventimiglia, NDR) cet après-midi là, ils ont arrangé un rendez-vous avec le patron d’ABC le matin-même. Au terme de cette rencontre, il m’a offert le rôle.

 

Le script ne faisait-il pas un peu trop « cliché » ?

Ils le sont rarement sur le papier, tel qu’écrit par les scénaristes. Les problèmes surviennent ensuite, en raison du nombre de personnes qui ont leur mot à dire : scénaristes, producteurs, studios, networks… Et à l’arrivée, neuf scripts sur dix retombent dans le cliché. D’un autre côté, le processus créatif d’une série télé fait peur à voir dans son ensemble : le pitch de départ, la commande d’un pilot, le pilot retenu dans la grille de rentrée avec parfois des reshots et des recastings durant l’été. Ensuite, la série doit parvenir à trouver son public pour pouvoir être commandée pour une saison complète puis être reconduite la saison suivante. Avoir la chance de prendre part à une série qui a su franchir toutes ces étapes me donne la sensation de vivre un véritable rêve éveillée, littéralement. Je suis ici à Monte-Carlo avec ma femme et mon petit bébé, la série a déjà décroché de nombreux prix, elle vient de se vendre dans 130 pays en l’espace de quelques semaines. Que peut-on rêver de mieux ?

 

 

Connaissiez-vous la série colombienne originelle, Betty la fea ?

J’en avais eu vent par l’intermédiaire d’amis d’origines hispaniques qui m’avait raconté des légendes urbaines du style : « Dans certaines villes de Colombie, la consommation d’électricité grimpait en flèche parce que tout le monde allumait sa télé au même moment pour regarder la série (rires) ». Des histoires de ce genre. Mais étant donné qu’elle est en espagnole et que je ne connais pas cette langue, je n’ai jamais dû en voir plus de 30 secondes.

 

Selon vous, qu’est-ce qui rend la série et ses personnages si attrayants ?

Silvio Horta (le créateur d’Ugly Betty, NDR) est le premier émigrant américain d’origine cubaine de sa famille et il n’a pas cherché à « fabriquer » les personnages, il s’est simplement contenté de les écrire d’après sa propre expérience : ethnie, âge, orientations sexuelles, profession… De plus, le thème central de la série, le fait de ne pas se sentir à sa place sur cette Terre à un moment donné ou un autre de sa vie, ne date pas d’hier. Le concept était déjà présent dans les tragédies de la Grèce Antique.

 

Vous êtes passé de The L Word, une série du câble réputée pour son libéralisme sexuel, à Ugly Betty, un show diffusé sur un grand network. Quelles sont les différences au niveau des scénarios ?

Je n’ai plus besoin de me déshabiller chaque semaine (rires). Si ce n’est ôter ma chemise de temps à autres. Plus sérieusement, beaucoup ont tenté de cataloguer un peu vite The L Word alors que c’est avant tout une excellente série qui a fait tomber pas mal de barrières. Et c’est ainsi que l’on s’en souviendra dans plusieurs années et non comme un show lesbien. De même pour Ugly Betty qui ne se réduit pas à une série « latino », bien qu’elle interpelle avant tout cette communauté. Une fois encore, les scénaristes, Silvio en tête, ont écrit avant tout sur ce qu’ils connaissaient sans chercher à introduire de force des personnages stéréotypés. Plusieurs critiques ont rapidement catalogué Ugly Betty dans la catégorie « série stupide avec héroïne enlaidie » alors qu’en réalité tout le concept réside ironiquement dans le fait qu’elle représente la seule vraie beauté dans le monde où elle évolue.

 

Pourriez-vous tomber amoureux d’une personne comme Betty ?

Oui, bien sûr ! Betty n’est pas repoussante, elle est simplement mal habillée, mal coiffée et elle porte un appareil dentaire. Des choses qui peuvent être rapidement arrangées. De plus, son honnêteté et son optimisme sont contagieux. C’est d’ailleurs l’état d’esprit de tous les intervenants sur cette série, aussi bien Silvio qu’America (Ferrera, l’interprète de Betty, NDR) ou encore de Salma Hayek (interprète de Sofia Reyes dans quelques épisodes et productrice exécutive du show, NDR). La série parle avant tout de la façon dont Betty transforme les gens autour d’elle, comment elle les rend heureux, Daniel en tête. Les liens qui vont se nouer entre eux deux au fil du temps sont bien plus importants que le fait qu’ils couchent ensemble.

 

Vous n’avez pas eu peur la première fois qu’America Ferrera a débarqué sur le plateau grimée en Betty ?

Elle est très mignonne ainsi ! Il n’y a rien de moche (« Ugly » en anglais, NDR) la concernant. America est une jeune femme à la silhouette magnifique. Vous l’avez vu en couverture de W Magazine ? Elle ressemble à Elizabeth Taylor à l’époque de Cléopâtre. Nous savons tous pertinemment que nous allons vieillir, prendre des rides et du bide. La série est bien plus substantielle que ça. L’idée véhiculée par l’intermédiaire de Betty est de se souvenir d’une personne au terme de sa vie, non pas sur son apparence physique mais sur ce qu’elle a su apporter aux autres.

 

 

Selon vous, qu’est-ce qui a été le plus difficile à accepter pour Daniel : le fait que son frère ait simulé sa mort ou bien qu’il soit devenu une femme ?

Sa première réaction est le dégoût. Il est littéralement sous le choc. Puis, aussitôt après, nous découvrons tout le poids du chagrin sur son visage car il était incroyablement proche de son frère. Le choc est donc avant tout d’ordre émotionnel et lié au fait que son frère n’était plus à ses côtés. C’est d’autant plus facile pour moi de m’identifier au personnage que j’ai un frère de deux ans mon cadet et je n’imagine même pas quelle serait ma réaction s’il venait à mourir.

 

Vous avez déclaré que Dr House était l’une de votre série préférée. Est-ce en raison du personnage-titre, un médecin brillant mais qui traite tout le monde, aussi bien ses patients que ses assistants, avec sarcasme ?

Les scénaristes sont très malins sur cette série dans leur écriture du personnage. Ils savent ce dont Hugh Laurie est capable dans le rôle et son interprétation y est formidable. Je trouve bien plus intéressant d’interpréter et de regarder un tel personnage. Je déteste lorsque le bad guy devient gentil à la suite d’une bonne action. Je préfère un personnage comme House ou Daniel qui font un pas en direction de la bonté puis dix pas en arrière. Ce type de comportement est plein plus proche de la réalité qu’un changement radical du tout au tout du jour au lendemain.

 

Aux États-Unis, Ugly Betty est diffusé sur ABC qui possède quelques uns des plus gros cartons de ces dernières années : Lost, Grey’s anatomy, Desperate Housewives. Ressentiez-vous une pression supplémentaire face à tant de réussites ?

Absolument pas. ABC tablait sur 7 à 8 millions de téléspectateurs je crois et le pilot a fait 16 millions. Aux États-Unis, Ugly Betty est diffusé le jeudi soir à 20h et a doublé l’audience que faisait Alias l’année précédente dans la même case horaire. Et à présent, nous voilà en route pour la saison 2.

 

Pensez-vous que Betty va continuer à jouer le rôle d’ange gardien de Daniel l’an prochain ?

Daniel est définitivement pris dans une spirale infernale et sa situation va encore empirer avant de s’améliorer. Pendant un an, Betty a cherché à lui venir en aide et à la fin de la première saison, elle abandonne. Mais le naturel va sans doute revenir au galop et elle va de nouveau être à ses côtés pour le soutenir. Tout du moins, je l’image ainsi. Pour tout vous dire, j’ignore ce qui va arriver. Nous découvrons généralement les scripts un ou deux jours avant le tournage.

 

Quand débute le tournage de la saison 2 ?

Le 2 juillet.

 


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