Michael Ealy (Sleeper cell)

Stéphane Argentin | 30 septembre 2006
Stéphane Argentin | 30 septembre 2006

Alors que depuis 2001, tous les regards sont tournés du côté de la FOX et l'une de ses séries-phares (24), le véritable choc en matière d'introspection en milieu terroriste post-11 septembre est venu l'an passé d'une chaîne bien plus modeste mais aux projets beaucoup plus « casse gueules » : Showtime (The L Word, Weeds). Un choc qui a pour nom ô combien évocateur Sleeper cell, mini-série de 10 épisodes nominée aux derniers Golden Globes ainsi qu'aux derniers Emmy Awards (où le sacre de 24 y a été paradoxalement très polémiqué). Dans le rôle de Darwyn, un agent du FBI qui infiltre une cellule terroriste d'extrémistes islamiques, Michael Ealy y est remarquable. Au cours du festival TV de Monte-Carlo en juin dernier, alors que tous les journalistes se battaient là encore pour rencontrer les deux représentants de la série 24, Kim Raver et Jon Cassar, Michael Ealy de son côté donnait ses interviews à une petite poignée d'intéressés à quelques encablures de là. Rencontre avec un acteur qui aime les séries à risques…

 

 

La question la plus basique qui soit pour commencer : comment avez-vous décroché le premier rôle de Sleeper cell ?
Les producteurs ont remarqué mon travail dans deux films, Barbershop et Never die alone (inédit en France, NDR), et ils y ont tout particulièrement apprécié ma prestation de « communication non verbale » qui correspondait à ce qu'ils recherchaient pour le personnage de Darwyn. Lorsque j'ai reçu le script, qui rappelons-le a été rédigé en 2004, soit bien avant que d'autres films et séries sur le même sujet ne voient le jour, je n'avais jamais rien lu d'aussi compliqué et risqué à la fois. Dès lors, je ne pouvais décemment pas refuser un rôle pareil.

 

La complexité de la série va justement bien au-delà d'une simple cellule d'Al-Qaida. Il y est également question de drogue, de prostitution, de la façon dont ces actes terroristes sont financés. Jusqu'à quel point ce que l'on peut voir dans la série se rapproche-t-il de la réalité ?
Tous les personnages au sein de la cellule sont basés sur de véritables terroristes à travers le monde. Darwyn est le seul personnage fictif. Quant aux évènements racontés, ils sont eux aussi basés sur des faits réels. Il faut savoir que les deux créateurs / scénaristes de la série (Ethan Reiff et Cyrus Voris, NDR) sont des fondus d'histoire et passent leur temps à rechercher des tonnes de renseignements. Par exemple dans le septième épisode qui débute avec le tunnel clandestin. Et bien deux semaines après le tournage, on a découvert un tunnel similaire entre le Canada et les États-Unis. Et pas plus tard qu'au printemps dernier, de nombreux articles dans la presse parlaient de la façon dont le gouvernement tente de débusquer de tels tunnels entre le Mexique et les États-Unis. Nous sommes donc en avance sur la réalité d'une certaine manière. Mais le plus effrayant à mes yeux dans la description du fonctionnement d'une cellule terroriste est surtout la façon dont ces individus se fondent désormais dans notre société. L'un d'entre eux est professeur, l'autre est guide touristique. Voilà le nouveau visage du terrorisme.

 

 


 

N'est-il pas un peu « facile » en quelque sorte d'imaginer de telles fictions qui capitalisent sur la peur du terrorisme post-11 septembre ?
L'objectif premier n'est pas de jouer avec cette frayeur. Parmi toutes les personnes qui ont vu Sleeper cell, aucune d'entre elles n'est encore venue me dire : « J'ai peur à présent ». En revanche, la série crée une sorte de conscience de la situation auprès du public, conscience qui était absente avant le 11 septembre, sur un sujet qui se trouve être désormais le sujet n°1 d'actualité, si ce n'est dans le monde tout du moins aux États-Unis. La série ne cherche nullement à glorifier les terroristes qui y sont présentés, elle se contente de les montrer sous leur vrai visage tout en servant de vitrine aux évènements qui ont cours aux quatre coins du globe : le problème israélo-palestinien, les affrontements et l'occupation par les forces armées au Moyen-Orient… Le problème existe aussi depuis longtemps aux États-Unis mais sous le nom de « crimes haineux », la fusillade au lycée de Columbine en étant le parfait exemple. Vous pouvez qualifier cet évènement de « crime haineux » mais ça reste du terrorisme.

 

Au cours du septième épisode que vous mentionniez juste avant, votre personnage déclare à un moment : « Les gens peuvent parfois apprendre de leur histoire ». Pensez-vous que ce soit le cas et que cette série en particulier puisse faire comprendre et apprendre aux gens qui la verront ?
Les créateurs du show ont là encore tellement bien fait leur travail qu'à partir du moment où vous regardez la série, vous apprendrez obligatoirement quelque chose, tout comme ce fut le cas pour moi.

 

Une deuxième saison de 8 épisodes a déjà été lancée ?
Oui, le tournage débute dans 10 jours (cet entretien a eu lieu le vendredi 30 juin 2006, NDR).

 

 


 

Y sera-t-il là encore question du démantèlement d'une autre cellule terroriste car dans ce cas de figure, le show risque de se répéter quelque peu ?
Je ne peux rien vous dire à ce sujet si ce n'est qu'il y aura une certaine similitude (sourires). Mais dans son ensemble, cette deuxième saison sera très différente, notamment par l'aspect beaucoup plus global que vont prendre les évènements qui ne concerneront plus seulement les États-Unis.

 

Combien de temps dure le tournage d'une saison ?
Quatre mois.

 

Ne craigniez-vous pas à la lecture du script, et même encore aujourd'hui, que les téléspectateurs comparent Sleeper cell à 24 en raison du sujet abordé : le terrorisme sur le territoire américain. D'autant plus que 24 est antérieur à Sleeper cell et a vu le jour au moment même où ont eu lieu les attentats du 11 septembre ?
J'ai effectivement eu cette crainte à un moment. Mais la plupart des personnes qui ont vu les deux séries dans mon entourage m'ont dit que notre show était meilleur que 24. J'ai vu la première saison de 24 avant que ne débute le tournage de Sleeper cell et c'est alors que j'ai réalisé que les deux séries avaient des approches diamétralement opposées sur le sujet. 24, c'est pour les junkies à la recherche d'adrénaline pur jus. Le développement des différents personnages y est très limité tandis que Sleeper cell prend son temps pour présenter et faire évoluer les siens tout en restant aussi crédible que possible. Quiconque vivant à Los Angeles vous dira par ailleurs qu'il est tout bonnement impossible de faire autant de fois le tour de la ville en seulement 24 heures (rires). Les deux séries ont chacune leur public et moi-même j'aime beaucoup 24, mais je préfère m'engager sur des projets motivés avant tout par ses personnages.

 

 

Propos recueillis au cours du 46ème festival de télévision de Monte-Carlo en juin 2006.
Autoportrait de Michael Ealy.

 

Copyright : La photo en bas d'article (ci-dessus) a été obtenue avec l'accord du festival de télévision de Monte-Carlo en vue d'être exploitée exclusivement dans le cadre du site Ecran Large. Toute autre utilisation en dehors de ce cadre est par conséquent formellement interdite.

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