24 heures chrono - Saison 2

La Rédaction | 18 mai 2007
La Rédaction | 18 mai 2007

 Dix-huit mois après la tentative d'assassinat dont il était la cible, le sénateur David Palmer (Dennis Haysbert), devenu entre temps président des États-Unis, fait appel à Jack Bauer (Kiefer Sutherland) afin de désamorcer une menace d'attentat nucléaire sur la ville de Los Angeles…

 

Si vous cherchiez le meilleur film de l'année 2003, ne cherchez plus, vous ne le trouverez pas en salles mais (enfin) chez vous, sur votre petit (grand, tout dépend de votre équipement) écran. 24 heures chrono (24, en VO, et pour faire plus court) avait créé l'évènement l'an passé non pas, comme l'ont cru certains, en inventant, mais en reprenant des concepts à la fois techniques et narratifs jusque-là disjoints, et que l'on croyait quasi exclusivement réservés aux grosses productions : le spilt-screen, rendu célèbre dans les années soixante par Norman Jewison et son Affaire Thomas Crown, et poussé dans ses derniers retranchements trente ans plus tard par Mike Figgis dans Timecode, l'histoire en temps réel, expérimentée par Robert Wise dans Nous avons gagné ce soir, Alfred Hitchcock dans La Corde, puis plus récemment (et avec moins de bonheur) par John Badham dans Meurtre en suspens, la caméra à l'épaule perpétuellement en mouvement, véritable marque de fabrique dans les années quatre-vingt-dix de la série NYPD blues…, autant de choix, révolutionnaires à leur naissance quoique rebutants (comme toute nouveauté), qui, combinés au sein d'une seule et même fiction et sur une durée aussi longue (vingt-quatre épisodes de 40 minutes chacun), avait tout de l'édifice casse-gueule par excellence.

 

Et pourtant, à l'arrivée, 24 est incontestablement la création la plus solide, la plus (sur)prenante, la plus palpitante qu'il ait été donné de voir depuis si longtemps que la recherche remonterait probablement à trop loin. La raison ? Un tout cohérent et homogène. Là où certaines fictions s'illustrent par leurs acteurs, leur réalisation ou encore leur scénario, 24 peut se vanter d'être bien au-dessus du lot dans tous ces domaines à la fois, et qui plus est combinés à merveille au sein d'une seule et même création. Autour d'une ligne directrice (la tentative d'assassinat dans la première saison, la menace d'attentat nucléaire dans la deuxième), 24 tisse une toile aux ramifications aussi nombreuses qu'excitantes autour de personnages qui ont chacun leurs forces et leurs faiblesses, leurs qualités et leurs défauts, tant physiques que moraux. Personne n'y est totalement bon ou totalement mauvais mais juste humain, des êtres mus par un intérêt, quel qu'il soit, des êtres que l'on suit caméra à l'épaule comme en vision subjective et en temps réel, accroissant d'autant la notion d'urgence, d'intensité du moment. Des êtres liés par le temps, le lieu, la parole (téléphones portables), soit concrètement (physiquement), soit artificiellement (split-screens). 24 raconte avant tout et surtout des histoires à échelle humaine, des humains qui, bien que souvent dépassées par les évènements, ne baissent jamais les bras et vont continuellement de l'avant, le personnage de Jack Bauer en étant la plus parfaite incarnation.

 

Jack Bauer, alias Kiefer Sutherland, un Kiefer Sutherland qui nous en avait promis plus pour la deuxième saison. Et plus il y a. Plus d'humanité, de dramaturgie, d'action, d'intensité, d'intrigues, de démence…, en clair, plus de tout, mais surtout pas plus de n'importe quoi. Difficile, comme pour la première saison, d'en dire plus sous peine de divulguer l'un des nombreux rebondissements, l'une des nombreuses surprises que nous ont concoctés les scénaristes, des scénaristes qui feraient bien de breveter et commercialiser la substance (illicite ?) dont ils usent et abusent s'ils souhaitent (et nous aussi) voir le niveau des productions cinématographiques et hollywoodiennes avant tout tiré vers le haut. Car il faut bien admettre que ces tyrans (i.e. les scénaristes) en font sérieusement baver (et c'est peu dire, cf. l'épisode 19) à tout le monde au cours de ces vingt-quatre nouvelles heures (à commencer par les pauvres spectateurs que nous sommes). Certes, certains revirements de situation (épisode 15) sont visibles comme le nez au milieu du visage, tandis que le maillon faible de cette deuxième saison est incontestablement l'intrigue gravitant autour du personnage de Kim Bauer, la fille de Jack, intrigue totalement détachée du reste, mais qui aboutira néanmoins à l'un des moments les plus poignants. Ces quelques faiblesses mineures et passagères sont toutefois bien peu face au reste et surtout, à nouveau, face aux autres productions qui nous barbent 90min durant (dans le meilleur des cas) tout au long de l'année. Tous les personnages bénéficient d'ailleurs d'approfondissement, à commencer par Jack Bauer (LE rôle de Kiefer Sutherland ?), véritable tueur-né remis en cause, George Mason, servi sur un plateau d'argent par Xander Berkeley, ou encore Dennis Haysbert, imperturbable, tout en colère rentrée dans le rôle du président David Palmer. Mais les autres « anciens », ainsi que les nouveaux venus, ne seront ni oubliés ni épargnés pour autant, rassurez-vous.

 

L'aspect politique de l'intrigue, également beaucoup plus prononcé que précédemment, prend une tournure pour le moins surprenante, tout particulièrement dans la deuxième partie de la saison. En effet, s'il est déjà assez curieux de constater l'analogie plus que marquée avec un certain 11 septembre 2001 (attentat sur une grande ville américaine, à l'image de La Somme de toutes les peurs), et encore plus qu'un tel sujet n'ait pas été évincé par une quelconque censure en phase de préproduction, la suite converge (dangereusement ?) vers l'actualité du début d'année 2003, tout en faisant au passage un petit détour par le Couvre-feu d'Edward Zwick, aux accents d'émeutes raciales californiennes de 1991. À ce moment précis, 24 se paye même le culot d'offrir une modérée, quoique évidente, leçon de morale à l'attention d'une certaine administration de Georges W. Bush. Oui, il s'agit bien là d'une soi-disant fiction ! De la deuxième saison de 24. Une saison résolument sombre, très sombre, véritable fût d'huile sur un brasier (une actualité) ardent(e) d'où personne ne ressortira totalement indemne (pour ceux qui en ressortiront).

 

Pour attiser encore davantage un foyer déjà bien rougeoyant, la technique à présent totalement huilée de la série est toujours de la partie, à commencer par l'immense boulot de cadrage caméra à l'épaule, augmentant d'autant l'impression de proximité, tandis que l'emploi des split-screens est désormais une merveille de modèle à suivre. Pour preuve, l'épisode d'ouverture, plus long et sans « coupures temporelles », ou encore les conversations en tête-à-tête où une telle technique a été (à raison) préférée aux habituels travellings latéraux et autres champs / contre-champs. Impossible aussi de passer sous silence la partie musicale également bien plus (omni)présente et toujours parfaitement dans le ton de l'action (ou de la non-action).

 

Cette deuxième journée de 24 est donc exactement ce à quoi l'on pouvait s'attendre et ce que l'on nous avait promis : plus. Certes, ces plus-là en font parfois un peu trop, mais p*** c'que c'est bon (les huit derniers épisodes menant à l'apothéose de la confrontation finale d'une virtuosité inouïe, ou bien l'épilogue reliant à la perfection les quarante-huit heures déjà existantes de la série) ! Vite, encore plus !

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