Les Oubliées : La TV française retrouve espoir

Stéphane Argentin | 18 janvier 2008
Stéphane Argentin | 18 janvier 2008

Bien qu’elle ne constitue pas une série récurrente sous la forme que nous connaissons habituellement, Les Oubliées, mini-série de 6 épisodes de 52 minutes chacun, n’en demeure pas moins un nouvel espoir quant à l’avenir des fictions hexagonales sur le petit écran, quelques mois après Les Bleus (dans un genre bien différent il est vrai).

 

L’histoire : Depuis 15 ans, six jeunes femmes ont disparu. Aucun corps retrouvé ; juste des vêtements lavés, repassés et déposés sur des bancs publics. Au milieu des vêtements, à chaque fois, une petite statuette de porcelaine. Une statuette de la Vierge Marie… L’histoire d’un homme : Christian Janvier, hanté par six « oubliées ». Un homme malade, victime de troubles de la mémoire, qui ne sait plus où chercher pour trouver la vérité.

 

Contrairement à quantité de séries françaises récentes (et ratées), Les Oubliées ne tente pas de (photo)copier en vain ses consœurs américaines. Tout juste reprend-t-elle de ces dernières la mise en scène, révolutionnaire à l’époque, de NYPD Blue (1993-2005) à base de panotages et autres décadrages au cœur d’une photographie volontairement terne, à la limite du monochrome (qui a dit que le Nord de la France, lieu où se situe l’action de la série, était synonyme de grisaille ?). Des choix qui siéent parfaitement à l’atmosphère et aux objectifs affichés : souligner en permanence l’état d’esprit du personnage principal, Christian Janvier, inspecteur un brun tête en l’air (il perd systématiquement ses clés, son portable…) mais non moins efficace et tenace dans la poursuite de l’enquête. Dépréciée depuis déjà fort longtemps par ses collègues de travail, l’enquête en question, tout comme les proches des victimes qu’il continue de côtoyer, commence peu à peu à altérer le propre quotidien de Janvier, à l’user psychologiquement à petit feu.

 

Cette interaction entre vie privée et investigation au long cours n’est pas la moindre des qualités d’une série qui agit à l’identique sur le téléspectateur au fil d’épisodes faisant perpétuellement ressurgir ce thème de l’oubli, aussi bien au travers des victimes que des pertes de mémoires de Janvier. La résolution de cette affaire, et par extension l’identité et l’arrestation du kidnappeur / serial killer, n’est pas une finalité en soit (le doute plane d’ailleurs sur le succès ou non de Janvier jusque dans les dernières minutes). Seul compte ici le chemin parcouru au fil des milliers d’indices, de pistes et de suspects potentiels dans un style, tant narratif que formel, qui va totalement à contre-courant des Experts et autres FBI : Portés disparus et dont Les Oubliées ne conserve là encore que très peu (le flashback introductif qui présente chacune des victimes au moment de son rapt).

 

Contrairement à la très surestimée Epitafios, série argentine aux intentions peu ou prou identiques inutilement étirée en longueur (13 épisodes de 52 minutes), Les Oubliées forme un tout suffisamment homogène et maîtrisé à tous les niveaux (scénario, réalisation, interprétation) pour parvenir à immerger le spectateur et l’y maintenir de bout en bout. À condition là encore de faire fi des twists, indices de dernière minute et autres montages cut imposés par des diktats commerciaux auxquels nous ont habitué les fictions américaines. À l’heure où les séries télés françaises se remettent en question, Les Oubliées montre définitivement la voie à suivre.

 

Les Oubliées (6x52min) : Samedi soir à 20h50 sur France 3 à partir du 19 janvier 2008.

 

 


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