24 heures chrono - Saison 6

Stéphane Argentin | 21 novembre 2007
Stéphane Argentin | 21 novembre 2007

S’il fallait résumer en un seul mot cette sixième saison de 24 heures chrono, il suffirait de dire qu’elle est à l’image de la première apparition de son héros Jack Bauer : une épave. Ou, plus précisément, un navire en perdition. En effet, alors que les quatre premiers épisodes, dont nous ne tarissions pas d’éloges dans cet article en janvier dernier, nous avaient laissé littéralement sur le cul tant les créateurs avaient su une fois encore y repousser les limites du « ils ont osé », le reste de la saison va aller de mal en pis avant de sombrer corps et bien dans un grand portnawak au cours de son dernier tiers.

 

La cinquième journée de Bauer avait pourtant su renouer avec l’esprit et la qualité de la saison originelle en remettant, entre autres, l’accent sur l’entité « humaine ». L’assassinat de David Palmer, réminiscence contemporaine de celui de JFK, planait tel un spectre sur l’ensemble des épisodes. Ce meurtre inaugural influait directement sur le comportement de Bauer (cf. l’exécution sommaire en clôture du season premiere) tandis que, côté cœur, Jack prenait désormais pleinement conscience de son statut « d’âme damnée », vouée à pourrir et/ou tuer tout ce qu’il touche. Teri était morte à cause de lui et, à présent, la même épée de Damoclès risquait à tout moment de s’abattre sur la nouvelle femme de sa vie : Audrey Raines.

 


Pour la sixième journée, à raison (au début) mais à tort (par la suite), les auteurs de 24 ont donc cru bon de jouer à fond la carte du jeu des sept familles version « roulette russe » (qui mourra, qui restera ?). Un Palmer, Wayne (D.B. Woodside), frère de, en chasse donc un autre dans le Bureau Ovale et la soeurette, Sandra (Regina King), n’est jamais bien loin tandis qu’un Bauer peut lui aussi en cacher beaucoup d’autres : Phillip le père (James Cromwell), Graem le frère (Paul McCrane), Marilyn la belle-sœur (Rena Sofer) et Josh le neveu (Evan Ellingson). Il ne manquerait plus que le chien et le canari pour que la famille soit au grand complet (ouf, on a échappé à Kim cette année !). Le problème ne vient pas tant de cette grande réunion familiale que de la façon dont les scénaristes ont décidé de l’exploiter.

 

Dans un grand déballage foutraque, les auteurs abusent en effet des gimmicks pourtant déjà usés jusqu’à la corde les saisons passées mais sans faire preuve cette fois-ci du moindre renouvellement. Tortures, traîtrises, attentats, disparitions puis réapparitions de personnes supposées mortes ou dans un piteux état sont censés apporter leur lot de mini-cliffs dramatiques mais ils aboutissent in fine à l’effet inverse : le sentiment d’assister à la énième représentation d’une même pièce de théâtre sombrant dans le granguignolesque. Même refrain concernant la dimension politique du show. Une nouvelle fois très ambigu (amener l’ancien n°1 du terrorisme sur le devant de la scène des négociations) et bien en phase avec l’actualité (une relecture des prisons de Guantánamo : justifiées ou répréhensibles ?), cet aspect de la série va à son tour rapidement sombrer dans la pantalonnade d’anti-chambre.

 


Quant au clou du spectacle, il est définitivement atteint lorsque, huit épisodes avant le 24ème coup de gong, l’intrigue principale se voit résolue. Et alors que, au cours des années passées, les scénaristes étaient parvenus à maintenir l’illusion d’une certaine forme d’homogénéité jusqu’à la toute dernière minute, cette fois-ci, faute de mieux, ils ressortent dans l’urgence de leur chapeau magique un personnage supposé disparu afin de rallier la ligne d’arrivée tant bien que mal.

 

C’en est trop ! La coupe est pleine ! 24 heures chrono n’est plus que l’ombre d’elle-même. Si les cinq premières saisons étaient les plus longues de la vie de Jack Bauer et, paradoxalement, les plus palpitantes et courtes de celle du téléspectateur, cette sixième année inverse la tendance et même les fans les plus fervents auront bien du mal à tenir jusqu’au bout devant tant de fadeur. Ce n’est d’ailleurs pas un hasard si, outre-atlantique, la série a enregistré ses audiences les plus faibles depuis ses débuts en 2001 en plus de se retrouver pointée du doigt pour son recours récurrent à la violence et la torture (cf. news). Dire que les auteurs sont désormais attendus de pied ferme pour la saison 7 est un doux euphémisme tant la pente à (re)monter pour rallier les cimes de la qualité s’annonce raide…

 

24 heures chrono saison 6 : Tous les jeudis soir à 20h50 sur Canal + à partir du 22 novembre 2007.

 

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