Daredevil : les 6 premiers épisodes de la saison 3 nous ont-ils aveuglés ?
Depuis le lancement de la collection de séries Marvel/Netflix, Daredevil joue le rôle de pivot central, autour duquel évoluent les autres héros et personnages, souvent conçus de manière à être force de contre-proposition, en regard de ce show aux airs de porte-étendard. De loin le plus spectaculaire et le plus abouti techniquement, le récit des aventures de Matt Murdoch s’était montré suffisamment dense pour accueillir un adversaire devenu protagoniste à part entière (Frank Castle, The Punisher).
Annoncée comme plus noire, définitive et violente que les précédentes, la saison 3 parvient-elle à gommer les problèmes de rythme et les baisses de régime qui minent la narration depuis ses débuts ?
Nous avons pu visionner les 6 premiers épisodes pour vous apporter un début de réponse. ATTENTION SPOILERS.
STREET FIGHTER 2 MOLLO
Avec sa violence crédible, ses affrontements physiquement éreintants, ses méchants solides, son héros au charisme faussement doux et chaleureux, Daredevil est peut-être la proposition super-héroïque de Netflix qui possède le plus de caractère.
Est-ce cette relative réussite qui pousse l’ensemble à ne pas franchement se remettre en question ? L’anticipation de Netflix d’une collaboration avec Disney qui semble bien fragile alors que Mickey prépare sa propre plateforme de SVoD ? Impossible à dire, mais ce qui frappe instantanément à la découverte de ces nouveaux épisodes, c’est leur stupéfiante mollesse.
En l’état, ce qui est narré tout au long de ces six chapitres pourrait aisément tenir sur deux segments (et sans se serrer). La série n’en finit pas de s’appesantir, de multiplier les séquences redondantes, voire de rejouer des arcs scénaristiques déjà rebattus.
En témoigne le parcours de Daredevil (Charlie Cox) dont on comprend mal l’écriture, puisqu’il est quasiment identique à celui de la première saison, et qu’il est des plus frustrants pour qui a vu l’issue de la saison 2 ou la conclusion de The Defenders. En effet, on avait laissé ce pauvre démon aveugle au milieu d’une explosion parfaitement apocalyptique.
Matt est de retour, mais son petit coeur est tout froissé
ROUILLE CALIBUR
On s’attendait à une résurrection compliquée, à un retour contrarié… mais non, Daredevil (Charlie Cox) tout blessé et déprimé, est récupéré par son curé, qui le confie à une nonne de bonne volonté – mais badass quand même – dans les souterrains de son église. De là, notre héros reprendra du début son parcours initiatique, ainsi que l’interrogation qui est la sienne au sujet de la violence.
Problème : cette approche contraint la narration à une ouverture posée, pour ne pas dire neurasthénique, alors que le personnage principal réapprend à taper sur les gens et a droit à une paire de râclées. Et malheureusement, on assiste à un problème similaire du côté des antagonistes, ou plutôt, de l’adversaire historique de Daredevil.
Fisk (Vincent D'Onofrio) est de retour bien décidé à retourner aux affaires malgré sa peine maousse d’emprisonnement. Prétendant vouloir négocier pour protéger son amour Vanessa, il feint de collaborer avec les enquêteurs fédéraux, pour mieux donner corps à un adversaire à la hauteur de Daredevil, tout en se rachetant une image auprès de l’opinion publique.
Préparez-vous à une séance de Fisk fucking plutôt salée
Et pour ramener ce formidable personnage au premier rang, et le mettre en capacité de nuire à Daredevil, le scénario est contraint aux pires cabrioles et complexités artificielles, inventant pour l’occasion plusieurs personnages secondaires totalement dispensables, et autant de sous-intrigues dont on se moque éperdument. Fastidieux, le procédé est en outre difficilement crédible.
Et si originellement, on ne s’inquiète pas outre-mesure du réalisme dans une adaptation de comic-book, la volonté de Netflix d’ancrer ses histoires dans un univers urbain familier pose ici problème. Le script a beau se démener pour justifier le retour de Vincent D'Onofrio aux affaires, on ne croit pas une seule seconde à l’imprudence de ses gardes, à son génie stratégique, ou à la faisabilité de son plan.
Ecartelée entre sa profession de foi crédible et sa nature de divertissement à base de surhommes, Daredevil n’a plus de centre de gravité, et cela se ressent terriblement. Ce constat s’applique également à Bullseye (Wilson Bethel), grand méchant fabriqué quasiment de toute pièce par ce salopiaud de Fisk.
Monsieur Pondexter est un nerveux...
SPRITE OF RAGE
Il représente presque à lui seul les forces et failles de cette saison 3. D’un côté, il est parfaitement incarné par Wilson Bethel, qui lui confère une énergie sans cesse proche de l’implosion, une sensibilité exacerbée, qui convient parfaitement à ce fou furieux, le rendant tour à tour pathétique et redoutable.
Mais pour une séquence d’introspection aussi vertigineuse que brillante (rendue glaçante par la présence fantomatique de Fisk) il faut se taper des scènes d’un embarras vertigineux. Plusieurs traumas ou incidents déclencheurs de la personnalité explosive de cet adversaire sont amenés sans finesse, paraissant parfois ridicules.
Par exemple, nous faire croire qu’un petit râteau suffit à transformer un soldat d’élite stressé en meurtrier assoiffé de sang, désireux d’obéir au doigt et à l’œil à un chef mafieux pervers au possible, apparaît comme un raccourci ridicule. Et des mécaniques de ce type, le récit en compte un sacré paquet.
La saison la plus intéressée par la foi de Murdoch
Si on doit remonter au péché originel de cette saison, en matière d’écriture, c’est à nouveau vers Fisk qu’il faut se tourner. Il apparaît ici curieusement terne, lui qui fut la principale attraction de la première saison. Pourquoi ? Parce que ces six premiers épisodes lui ont retiré ce qui faisait toute son ambiguité. Puisque Vanessa (Ayelet Zurer) n’est plus là, le monstre touché au cœur, le salaud soudain terrassé par l’amour, n’est plus.
Ne reste qu’un type ventripotent avec une manifeste infection des cordes vocales, qui aimerait que les blogueurs l’aiment et que les types en costume se fassent taper dessus. C’est bien peu. Cette soustraction aboutissant à une perte de finesse, quasiment tous les acteurs paraissent se débattre avec, exception faite de Deborah Ann Woll et Charlie Cox.
Mieux vaut ne pas trop agacer Wilson Bethel
KILLER INSTINCT
Pour autant, tout est loin d’être à jeter dans cette première moitié de troisième saison. Pour commencer, Charlie Cox s’il n’a pas grand-chose à faire, nous rappelle qu’il est un formidable comédien. Derrière son apparent sous-régime se dissimule une flamme puissante, une rage sourde, qui ne demande qu’à s’exprimer.
Une nouvelle fois, il est souvent la meilleure raison de continuer à s’accrocher, quand une série d’épisodes quasiment dénués du moindre intérêt s’accumulent.
Et si les scènes d’action sont devenues rarissimes (il faut attendre plus de trois heures de déroulé pour que quelqu’un daigne s’énerver), elles n’en demeurent pas moins très impressionnantes. Il faut une nouvelle fois souligner l’investissement de Cox, qui se livre au cours du plan séquence le plus ambitieux, violent, long, spectaculaire et maîtrisé de la série. Passage étalé sur près d’un quart d’heure, il est synonyme de pure sidération.
Et pourtant, cela fait quelques temps que Daredevil nous a habitués à la mise en place de bastons homériques. Mais, comme pour nous indiquer que même les réussites de cette saison sont entâchées par de vilaines tares de conception, difficile de ne pas noter combien scénaristiquement, ce qui justifie cette situation hostile est débile.
On fera la même remarque concernant la confrontation qui réunit notre héros et Bullseye, laquelle conclut le sixième épisode. On passera avec indulgence sur les interminables circonvolutions nécessaires pour en arriver là et sur l’idée douteuse de jouer la figure du double maléfique, mais le combat entre les deux personnages augure de scènes dantesques.
Fisk, enfin dans son légendaire costume
En l’état, il s’agit peut-être du méchant que Netflix aura le mieux su représenter, ancrer dans un monde contemporain sans ignorer l’idée de super-pouvoir. Signe que décidément, malgré ses ratés de plus en plus embarrassantes, Daredevil n’est pas encore en bout de course, on meurt d’envie de voir comment va se refléter cette confrontation au sommet, même si le désintérêt du géant de la SVoD pour ses séries Marvel est de plus en plus patent.
La saison 3 de Daredevil sera disponible sur Netflix en intégralité à partir du 19 octobre 2018. Les saisons 1 et 2 sont d'ores et déjà disponibles.
17/10/2018 à 09:36
Et spoiler la série Daredevil ce n'est pas comme si il y avait tout un tas de rebondissements incroyables du genre "mais où ils vont chercher ça ??".
Le seul truc passionnant c'est le personnage de Karen qui va peut être encore changer de métier sans rien faire : secrétaire, avocate (ou presque), journaliste avec un beau bureau, et policière (ou presque) et maintenant …? peut être un poste à la mairie avant la maison blanche …
15/10/2018 à 14:40
Mince, la saison n'est pas encore sortie et pourtant je suis d'accord avec votre critique... Il y a du potentiel et j'aime beaucoup l'interprète de Daredevil mais c'est des fois tellement niais, ça ne va pas au bout des choses, on est dans un entre deux sans trop de saveur et de finesse...
15/10/2018 à 11:18
@Storm
Aucun complot : traditionnellement, la presse américaine est presque systématiquement ultra-positive avec les blockbusters et encore plus avec les super-héros.
14/10/2018 à 20:22
Storm : Pas d'accord (enfin un peux), sur les critiques U.S.
Disons qu'il s'agit plus de c'est dernière année, pour lequel je les trouve plus indulgent (notamment avec le MCU......COMME le grand publique d'ailleurs).
Mais autrement, pour la plupart, ils reste honnête, notamment pour les série Marvel/Netflix (au final y a surtout Daredevil d'apprécier, Punisher a même était un peux bouder par beaucoup la bas, les saison 2 de JJ ou LC n'ont pas emballer tout le monde).
Bref faut pas non plus crier au complot ^^.
14/10/2018 à 17:26
En plus, les retours des journalistes qui l'ont vu sûr Twitter sont super violent.
14/10/2018 à 17:24
@pinkman
Je pense qu'il evoquait les critiques FR qui sont très négatives.
De toute façon en matière de super héros les critiques américaines sont aux fraises depuis toujours c'est un peu à se pisser dessus.
Il suffit de regarder, ils ne tapent sur rien sauf s'ils pensent que ça va se planter.
En plus ils défendent Netflix comme un produit national
14/10/2018 à 10:06
"En l’état, ce qui est narré tout au long de ces six chapitres pourrait aisément tenir sur deux segments (et sans se serrer). La série n’en finit pas de s’appesantir, de multiplier les séquences redondantes, voire de rejouer des arcs scénaristiques déjà rebattus."
Très bien résumé...
L'essence de tant de séries aujourd'hui. Multiplier par 3 le temps de narration pour tenir 10 ou 13 épisodes, sans chercher à offrir quoi que ce soit de nouveau.
14/10/2018 à 09:31
Ah....
Les retours sur le net sont pourtant excellente.
Et les 3 critique dont j'ai trouver (2 américaine et 1 française, hormis la votre), sont trés bonne !
Par ex ici : http://collider.com/daredevil-season-3-review/?utm_source=twitter&utm_campaign=collidersocial&utm_medium=social#images
La : https://comicbook.com/marvel/2018/10/11/daredevil-season-3-reviews/
Ou ici : http://www.comicsblog.fr/32465-Daredevil_saison_3__le_retour_en_grce_tant_attendu
^^
Voilou, ensuite encore une fois...C'est chacun !
(dans les mauvais point, effectivement des longueur dans les 1er épisodes), ce qui n'est pas nouveau dans les série Marvel/Netflix. C'est une saison avec 13 épisodes, je préfère qu'elle prenne leur temps, et envoyez du steak sur ca deuxième moitié ^^ (Comme le Punisher, le BEST avec Daredevil).
Ah mince, j'en ai trouver une autre de positif : https://www.ign.com/articles/2018/10/12/daredevil-review-season-3-premiere
Peace ^^.
13/10/2018 à 22:00
@pinkman
Très peu de critiques publiées pour le moment. Et les 2/3 sont très négatives.
13/10/2018 à 20:56
Pour ceux qui sont dégoutter de "ce" retour...Je vous rassure dans la globalité, la presse a "adoré", les 6 premier épisode....Comme quoi !
A voir.
(puis bon...Je trouve souvent Simon...comment dire, trés dur, voir plus que tatillons ^^). Mais ensuite c'est chacun je présume.