Episodes Saison Game of Thrones - Saison 7 épisode 3 : un venimeux nectar

Jacques-Henry Poucave | 31 juillet 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58
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Photo Lena Headey, Nikolaj Coster-Waldau

Alors que la série approche de sa conclusion, Game of Thrones met en place tous les pions qui devront mener à sa fin, forcément spectaculaire et grandiose. Que vaut donc l’épisode 3 de cette saison 7.

ATTENTION SPOILERS

 

PhotoLa Bretagne... ses falaises, son grand air. Ses dragons.

 

Ça faisait bien trois ans qu’on attendait un épisode de cette trempe. Au cours de ses deux premières saisons, la série phare de HBO s’était montrée capable d’allier régulièrement grand spectacle, écriture éclatante, personnages forts, dramaturgie implacable, grand spectacle et émotions brutes. Depuis, si ces atouts n’avaient pas disparu, ils s’étaient retrouvés curieusement éparpillés, le show alternant segments à rebondissements, chapitres spectaculaires et plage de surplace narratif.

Or, avec ce troisième épisode, les showrunners David Benioff et D.B. Weiss nous démontrent qu’ils sont encore parfaitement capables de rassembler ces qualités pour nous offrir des moments anthologiques. Et le résultat est un épisode 3 qui s’inscrit instantanément parmi les tous meilleurs de Game of Thrones depuis ses débuts.

 

PhotoJon Snow face à son destin

 

DRAGON DUMB

Pourtant, dès les premières minutes de l’épisode, on s’est un peu inquiétés. On attendait depuis des années la rencontre Jon Snow et Daenerys, et elle a bien failli ne pas (du tout) tenir ses promesses. On l’a répété un paquet de fois, à nos yeux, un des principaux problèmes narratifs du show tenait ces dernières années dans le fait de châtier intraitablement tout personnage commettant une erreur tactique ou humaine, quand Jon et Daenerys étaient mystérieusement épargnés en dépit de leurs gourdes délirantes et répétées..

Et quand notre Reine auto-proclamée accueille le Roi du Nord avec une morgue et un mépris sidérant, malgré la nécessité d’en faire un allié, qu’elle exige de lui qu’il honore le serment d’un aïeul dont il n’est que le lointain descendant bâtard, avant de lui signifier poliment qu’il est désormais un rebelle et potentiel ennemi, on se dit que les scénaristes vont encore nous la faire à l’envers.

 

PhotoSisi face à son Jon Snow

 

Heureusement, il n’en n’est rien. Non seulement les scènes qui rassemblent les deux nigauds sont excellemment dialoguées, découpées, et montées, mais leur relation évolue très rapidement. Suite à l’attaque d’Euron Greyjoy (excellent Pilou Asbæk) sur une bonne partie de sa flotte, mais aussi grâce à Tyrion.

Si Peter Dinklage est rapidement devenu un des comédiens les plus en vue de Game of Thrones, c’est bien sûr grâce à son talent, mais également aux puissants dialogues dont bénéficiait son personnage. Et enfin, il bénéficie de répliques ciselées, impeccables, lesquelles appellent des réponses également intelligentes de la part des autres personnages.

Bref, plutôt que de  nous faire marner interminablement, l’épisode met nos deux héros en situation de s’entendre. Pourquoi ? Justement parce que les Lannister ont enfin décidé d’arrêter de faire n’importe quoi. Ou plutôt, ils le font à nouveau avec panache.

 

Photo"Il a vraiment l'air sympa le monsieur qui tue les gens, hein dis ?"

 

POISON D’AMOUR

Avec la mort des Sand Snakes ainsi que la capture d’Ellaria Sand et de sa fille adorée, Cersei tient logiquement l’occasion de se venger. Autre signe de la vigueur dramaturgique renouvelée de la série, tout ce qui aura trait aux actes du clan Lannister est mis en scène et amené avec une puissance inattendue.

Bien sûr, on se doutait que Lena Headey allait s’adonner à une vengeance bien corsée. Et elle ne s’est pas loupée. On était parés pour déguster un truc bien crado en mode viol au gravier perpétré par La Montagne sous une grêle de lisier de porc, mais la série a choisi une technique beaucoup plus fine, cruelle et cohérente, loin de sa fascination passée pour la violence physique faite aux femmes.

 

PhotoAllégorie de l'expression "passer un sale quart d'heure"

 

Cersei décide donc de faire subir à Ellaria ce qu’elle a fait subir à Jaime et elle-même. D’un baiser dont on ne réchappe pas, elle empoisonne fifille. Mais là où sa vengeance se fait pur supplice, ne réside pas tant dans la méthode que sa mise en scène. Après avoir longuement expliqué à son adversaire combien elle comprend sa rage, sa douleur et ses actes (encore une fois, quels dialogues !), elle explique à la pauvre Ellaria qu’elle ne sera exécutée, mais condamnée à regarder son enfant agoniser lentement, mourir, avant que son corps ne pourrisse, sous ses yeux, dans ue geôle dont elle ne ressortira jamais.

L’issue est logique, mais encore une fois exécutée à la perfection, très loin de la dimension souvent putassière de scènes de ce type au cours de l’histoire du show. Une fois n'est pas coutume, la mise en scène intègre le hors-champ, laisse place à l'imagination de ses spectateurs. 

On est également très intéressés par l’usage modéré que fait le scénario de son nouveau super méchant, Euron. Plutôt que de nous le servir à toutes les sauces, le script lui réserve une poignée de séquences fortes et de dialogues marquants, à l’image de sa brève confrontation avec Jaime. Le passage dit de la « Boîte à chocolat confraternelle » devrait rester dans les anales.

 

PhotoL'homme qui va nous faire regretter les Bolton

 

Ces deux hommes se battent pour la survie, pour le pouvoir et le corps de Cersei. Bien malin qui saura prédire lequel en sortira victorieux, alors que Westeros s’apprête à sombrer dans les flammes, le sang et la glace.

Enfin, après des années à jouer plus ou moins finement autour du couple incestueux formé par Jaime et Cersei, Game of Thrones fait un grand pas en avant alors que la Reine toute ivre de sa vengeance consommée et d’une nuit d’amour avec son amant, assume fièrement sa liaison devant une servante. Nul doute qu’après ses crimes et exactions, assumer au grand jour un amour aussi scandaleux aura des conséquences, humaines et politiques.

 

RETOUR A L’ENVOYEUR

Ce qui achève de faire de l’épisode un sacré morceau, ce sont ses dix dernières minutes. Enfin, un des protagonistes a appris de ce qui lui est arrivé. Stratège Jaime piège Daenerys, dont la stratégie est aussi teubée qu’à l’accoutumée et en profite pour désintégrer ce qui reste de son armée. La Reine s’est égarée à Castral Rock, ne bénéficie plus que de ses Dotrakis. Le protecteur de Cersei se rappelle encore son terrible échec face à Rob Stark, et fait vivre à la Mère des Dragons un affront similaire.

 

PhotoJon Snow face à son prompteur

 

Double avantage : Daenerys ne pourra pas se la jouer super-Reine intraitable bien longtemps, son alliance avec Jon Snow devient indispensable et tout un pan d’intrigues secondaires se voit ainsi balayé.

Mieux encore, la conclusion de ce chapitre est d’une puissance tragique rarement atteinte par le show. Pendant que la flotte de la Khaleesi se fait bouillave bien comme il faut, Jaime s’en va écraser la mère Tyrell en ses Terres. L’occasion d’une séquence parfaitement hallucinante.

Alors que nous suivons Lannister errant dans les décombres succédant directement à la bataille, il paraît évident que la série nous réserve un des petits sommets tragiques dont elle a le secret. Il est bien sûr venu tuer la mère de Margaery et achever ainsi un cycle de complots, trahisons et vengeance qui aura coûté cher aux deux clans.

Et à nouveau, le dispositif de la scène tourne autour d’une fiole de poison. Poison que Jaime a amené afin d’occire la vieille aristocrate, ce qui nous laisse un instant croire que l’épisode va simplement se terminer sur une note douce-amère, nous rappelant que l’homme à la main d’or est un des seuls personnages de ce récit à avoir un relatif sens de l’empathie et de la dignité, alors qu’il explique avoir refusé d’obéir aux souhaits de Cersei de voir la vieille Tyrell suppliciée et torturée.

 

PhotoProbablement le sort le plus cruel de tout Game of Thrones

 

WONDER WOMEN

Sauf qu’Olenna Tyrell ne l’entend pas, mais alors pas du tout de cette oreille. Avant de tirer sa révérence, elle dévoile à son interlocuteur que c’est elle, et personne d’autre qui a jadis empoisonné Geoffrey et qu’elle tient à ce que Cersei l’apprenne.

C’est un double coup de maître. Non seulement, nous avions totalement zappé de nous interroger sur le véritable assassin de cet odieux adolescent (et complètement zappé l'identité de la commanditaire), et la série vient donc de nous servir un cliffhanger totalement inattendu, mais Games of Thrones nous a également offert un très beau moment de poésie funeste.

On applaudit non seulement la dignité bouleversante de Jaime, qui se contient du mieux qu’il peut en découvrant que Tyrell a tué son fils et par conséquent précipité son clan vers sa perte, se retient de tuer séant Olenna (ce qu’elle espère, histoire d’échapper à l’empoisonnement), mais ne lui accorde pas non plus le réconfort d’une présence, préférant quitter la pièce et la laissant à la solitude de ses derniers instants alors que la mort approche et que l’épisode s’achève. À nouveau, le show fait preuve d’une élégance qu’on croyait ne plus retrouver.

  

Photo Nikolaj Coster-WaldauAube ou crépuscule des Lannister ? 

 

Plus encore, le lent mouvement scénaristique qui prend en partie fin ici est passionnant. Arroseurs arrosés. Les empoisonneurs d’hier sont les empoisonnés de demain, un retour de bâton tragique et terriblement cruel, alors que la maison Tyrell s’écroule symboliquement sous nos yeux.

Si le produit star de HBO fut longtemps un condensé de masculinité médiévale, de concours de glaives velus entrecoupés de scène de sexe, Game of Thrones semble achever ici une sacrée mutation. Plus que jamais, les femmes sont à la manoeuvre et surtout, sont confrontées au cendres d'un monde ébranlé par leurs pères, frères et fils. Dans cet univers où la prédation est devenue la règle, le vice la norme et le mensonge une nature, elles naviguent, s'affrontent et s'échouent les unes contre les autres, formant un portrait choral terrible, poignant. On n'en attendait pas tant.

Olenna, Ellaria, Cersei, Catelyn Stark et leur descendance, autant de femmes qui pour s'être risquée au jeu du pouvoir n'auront eu droit ni à un combat, ni à une défaite guerrière, sanglante mais honorable, pas même à un semblant de confrontation. En creux et de manière aussi imprévue que juste, D.B. Weiss et David Benioff ont retourné leur série comme un gant.

 

PhotoConfidences trop intimes

 

AFFAIRES COURANTES

Ce troisième épisode nous aura régalé de sa mise en scène et de ses dialogues surpuissants, sans oublier d’expédier nombre d’affaires courantes. Qu’il s’agisse de la guérison de Ser Mormont et de son départ direction Dragonstone, des négociations entre Lannister et la Iron Bank, de la prise de pouvoir progressive de Sansa sur Winterfell, du retour attendu de Bran (qui a manifestement pris la bonne décision de s’acheter une boussole), tout est mené efficacement et rapidement.

Cela faisait bien longtemps que HBO ne nous avait pas offert un divertissement épique de ce niveau. On espère désormais que la guerre qui se répand sur Westeros ne nous laissera plus aucun répit jusqu’à sa conclusion.

 

Profession punchin ball

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commentaires lecteurs votre commentaire !
lemon
01/08/2017 à 14:17

Mais qui est le traitre, proche de la mère des Dragons forcément, qui a balancé les mouvements de ses troupes (de sa flotte ?)

Keedz
01/08/2017 à 13:32

Ce qui me fait rire c'est que les armées de jaime et euron se déplace en un clin d'œil et à côté ta les marcheurs blanc qui au bout de 7 saisons ont toujours pas dépassés le mur alors qu'ils sont morts ils n'ont donc pas besoin de pause pour manger ou autre

ultron75
01/08/2017 à 10:07

Personnellement la temporalité m'énerve un peu (Euron se déplace en hors-bord je pense et les troupes Lannister en LGV) mais surtout que font les petites Araignées de Varys ????? Il est censé être au courant de tout et là Jaime et une énorme armée partent en campagne et personne n'est au courant ? Idem pour la flotte d'Euron ? Mouai, tout se délite un peu je trouve... à voir...

Stridy
01/08/2017 à 09:20

Clairement l'un des meilleurs épisodes.

C'est vraiment un excellent choix de remettre les Lannister en bonne forme. Les choses semblaient trop "faciles" pour les autres mais on retrouve la verve du clan.

Bibi
01/08/2017 à 00:28

Olenna avait déjà révélé son meurtre à Sansa dans la saison 5 donc ce n'est pas une surprise ici.

miaoumiaou
31/07/2017 à 21:42

Très bon épisode depuis très très longtemps. On voit Daenerys devenir trop sur d'elle, serait-ce le début de sa perte ? Les femmes perdent la tête, le pouvoir montent à leurs têtes (Cersei et Daenerys) et les hommes réfléchissent aux guerres violentes passés....
Par contre une question se pose, on dirait qu'on va assister à un GOT infinity war.....trop de guerres en même temps....soit ils vont faire la guerre Lannister vs le reste du monde soit ils mettent dans cette guerre les morts-vivants et là......ça sera vraiment un bordel monstre de faire une histoire entremêler de tout ce petit monde....à voir comment va s'entre mêler tout ça.

REA
31/07/2017 à 21:13

Quand c'est trop lent vous n'êtes pas contents (better call saul, TWD...), quand ça va trop vite, ils se moquent aussi de vous. Quand êtes-vous satisfaits ?

C'est l'avant dernière saison, pas / plus de temps à perdre.

captp
31/07/2017 à 17:43

Tres bon episode.
Tyrion a bien bien bourdé en conseillant l attaque de castle rock.
En deux episodes le rapport de force c est reéquilbré ... voir meme a l avantage des lanister.
J ai quand meme un gros probleme avec l acteur qui fait bran moi quand meme :/

Simon Riaux
31/07/2017 à 16:26

Effectivement, tout le monde se déplace très vite... Mais bon, c'est depuis la saison 2 que la série a envoyé bouler la temporalité et la géographie.

Dredd
31/07/2017 à 16:22

Le meilleur épisode de got depuis... Les noces pourpres. Mesquinerie, stratégie, violence, trahison et les ''gentils'' dos au mur, tout ce que j'ai aimé dans les premières saisons se trouve dans cet épisode. J'espère que çà continuera ainsi. Par contre @Rédaction, on sait depuis la saison 4 que Olenna Tyrell et Baelish sont les assassins de Jeoffrey Baratheon.

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