Episodes Saison The Last of Us saison 1 épisode 2 : critique des claqueurs sachant claquer

Geoffrey Crété | 23 janvier 2023 - MAJ : 23/01/2023 11:57
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Après un premier épisode solide pour la série The Last of Us, l'épisode 2, intitulé Infected, ouvre sérieusement les portes du cauchemar. Notre critique.

ATTENTION SPOILERS

 

 

monde ouvert

Vous aviez trouvé le premier épisode de la série The Last of Us un peu trop facile et classique ? Vous aviez l'impression d'avoir une adaptation un peu trop propre des jeux ? Vous avez toutefois lancé le deuxième épisode, par curiosité ? Bravo, c'est là que commencent les choses sérieuses.

Comme le jeu, la série créée par Craig Mazin et Neil Druckmann démarre pour de bon une fois que Joel, Tess et Ellie sont sortis de la zone de quarantaine, et explorent le vrai monde. C'est aussi ici que commence le vrai travail d'adaptation, avec les libertés indispensables. Condenser un jeu qui dure une dizaine d'heures en une série presque aussi longue (9 épisodes) semblait a priori facile, sauf si on a en tête qu'il faut éjecter les longues séquences de pur gameplay impossibles à retranscrire à l'écran (Doom a essayé, et le monde essaie d'oublier).

 

The Last of Us : photo, Christine Hakim"Il faut le détruire par le feu"

 

Le deuxième épisode s'ouvre avec un prologue, en miroir avec celui du premier épisode situé en 1968. On est en septembre 2003, à Jakarta, en Indonésie, et une scientifique experte en cordyceps vient constater que c'est la merde. A tel point qu'elle conseille immédiatement de passer la ville au napalm entre deux larmes. En 35 ans, la prophétie apocalyptique annoncée à la TV est arrivée. Les frissons de l'hypothèse laissent place à la terreur de la réalité, et de l'inévitabilité. En six minutes, The Last of Us (re)prend une couleur effroyablement anxiogène, surtout post-Covid.

Post-générique, un autre choix scénaristique devrait encore plus attirer l'attention : Joel, Tess et Ellie ne passent par cette foutue tour de Pise des enfers, aperçue à la fin du premier épisode comme pour annoncer la prochaine étape. C'est probablement frustrant puisque dans le jeu, c'était le premier rendez-vous avec la peur (et donc, les claqueurs). Mais c'est surtout un avertissement : la série n'est pas (juste) là pour copier-coller les séquences cultes du jeu.

 

The Last of Us : photoCe que toute personne ferait : ne pas y aller


têtes à claqueurs

Pas d'immeubles penchés, mais pas de problème : ce deuxième épisode contient tous les ingrédients de The Last of Us, avec la ville désertée (ou presque), les rues dévastées, les décors inondés et envahis par les plantes ; sans oublier les rendez-vous attendus de ces premiers pas hors de la zone de quarantaine (le musée de l'horreur, les claqueurs, le Capitole, et la mort de Tess).

Ça tombe bien, ce deuxième épisode est réalisé par Neil Druckmann lui-même, l'un des papas des jeux, qui fait ici ses premiers pas de réalisateur hors jeu vidéo (il a co-réalisé les deux The Last of Us, mais aussi Uncharted 4).

Le décor du hall immergé est un pur moment de plaisir à la The Last of Us, qui rappellera quelques souvenirs (possible que ce soit aussi bien TLOU1 que TLOU2 d'ailleurs). C'est loin de la direction artistique forcément plus froide et ordinaire du premier épisode, et c'est toute l'âme des jeux qui se retrouve dans ce lieu, entre les détails (la grenouille sur le piano, les plantes envahissantes) et les évidences (le cadavre oublié derrière un objet à déplacer), et entre l'émerveillement et la peur.

 

The Last of Us : photoLa nuit au musée

 

Ce n'est qu'un préambule, puisque vient ensuite le musée envahi par les champignons et les cadavres consumés par le temps, où rôdent quelques claqueurs. C'est le premier grand moment de la série, qui devait être à la hauteur puisque ces têtes de champignons aveugles sont les superstars des jeux – et probablement les ennemis les plus intéressants, entre les infectés très classiques et les gros infectés-boss tout aussi classiques.

A l'écran, ce sont des copies presque conformes. Le design, les bruits, les mouvements et la menace qu'ils représentent : tout est là pour recréer la petite angoisse des jeux. La mission des petits frissons est remplie, principalement grâce au jeu sur la transparence du décor, sur les silences et les bruits de respiration. Il y a même quelques (courts) délicieux moments, notamment lorsque Joel doit recharger son flingue, et que la caméra prend un malin plaisir à reserrer sur son visage pour laisser le claqueur hors-champ. Là, à cet instant, on retrouve le vrai beau frisson des jeux (et plus simplement : celui qu'on attend d'une telle série).

Malheureusement, c'est bien peu. La série The Last of Us n'est pas là pour faire véritablement peur, et la rencontre est pliée en quelques minutes et douilles. A voir si ce n'est qu'un avant-goût avant les choses sérieuses, ou si l'adaptation a simplement mis de côté la partie horrifique des jeux (parce que cette ville est sacrément vide tout de même). Oui, on connaît la réponse puisqu'on a vu toute la saison, mais on en reparlera plus tard, en temps voulu, patience.

 

The Last of Us : photoTic Claque Boom

 

le baiser de la mort

Sans surprise, Infected marque la fin de Tess, incarnée par l'excellente Anna Torv. L'actrice de Fringe et Mindhunter aura su faire vivre et exister ce personnage en à peine deux épisodes, et c'était tout sauf évident. L'un des risques de l'adaptation était de ne rien faire des PNJ, et Tess est la première preuve que les scénaristes se sont appliqués.

Il suffit d'une réplique ("Je ne t'ai jamais rien demandé, même pas d'avoir les mêmes sentiments que moi") pour un peu expliciter sa relation avec Joel, et donner à son sacrifice une couleur encore plus dramatique. C'est face à sa mort imminente que Tess croit en l'espoir d'Ellie, et c'est grâce à l'espoir désespéré de Tess que Joel continue à avancer, et d'y croire un peu à son tour. C'est le premier tournant majeur pour les personnages. L'épisode reprend absolument tout du jeu, mais s'en sort bien, principalement grâce à Anna Torv.

Néanmoins, au milieu de cette retranscription plus que fidèle, une image ressort : celle d'un infecté qui vient donner un baiser de la mort à Tess, et mélanger ses filaments avec elle. Une scène absolument troublante et terrifiante, qui montre à elle seule que la série The Last of Us explore un petit quelque chose de différent des jeux.

 

The Last of Us critique des claqueurs sachant claquer : photo, Bella RamseyUne enquête pour Fringe ça

 

Tout ça est bien sûr lié au choix controversé d'avoir modifié la nature de ces foutus champignons. Dans le jeu, ils se propagent avec des spores. Dans la série, ça passe par ces affreux filaments qui gigotent et sont reliés à un réseau immense. Tess explique à Ellie qu'il y a "de longues fibres comme des câbles, qui s'étendent sur des kilomètres" (conseil lecture : le passionnant La vie secrète des arbres, de Peter Wohlleben, qui explique très bien le réseau mycorhizien).

Neil Druckmann avait expliqué ce choix chez Collider : "Dans le jeu, il y avait des spores dans l'air, et les gens devaient porter des masques. On a décidé très tôt qu'on ne voulait pas ça dans la série. Au final, ça nous a amenés vers ces tentacules. Et en réfléchissant à comment ça passe d'un infecté à un autre, à la manière dont fonctionnent les champignons, ça pouvait devenir un réseau interconnecté. C'est devenu très effrayant de penser qu'ils travaillent tous contre nous de manière unifiée, qui est un concept que j'aime beaucoup et qui est développé dans la série".

 

The Last of Us : photo, Anna Torv, Pedro PascalMoment majeur pour Joel

 

Ces charmants filaments (qui rappellent quelques souvenirs de Resident Evil) avaient été aperçus dans le premier épisode, chez les voisins de Sarah, et dans le prologue de l'épisode 2, où la scientifique indonésienne les découvrait dans la bouche d'un cadavre. Mais la mort de Tess permet de les admirer longuement pour mieux trembler.

Un peu comme le baiser de Dracula, qui conjugue mort et érotisme, cette étreinte est fascinante parce que Tess semble hésiter entre la peur et l'acceptation, comme si son corps et son esprit luttaient. L'infection lui donne t-elle envie de succomber ? L'infecté reconnaît-il qu'elle est déjà à moitié dans leur camp ? Leurs deux corps sont-ils reprogrammés pour se connecter (Tess dit à Ellie que les infectés sont connectés de manière profonde) ?

 

The Last of Us : photoImpact dans 3, 2, 1...

 

Lorsque les filaments pénètrent sa bouche, que ses yeux vacillent mais que sa main continue à se battre, quelque chose de magique (et évidemment cauchemardesque) se passe à l'écran. L'auteur de ces lignes risque de se souvenir de cette image durant bien longtemps, pour la simple et bonne raison qu'elle dépasse la simple horreur et violence pour toucher du bout des doigts quelque chose d'inimaginable, d'incompréhensible et de totalement inconnu, avec une part de beauté profondément déroutante.

Ne reste plus qu'à espérer que c'est une première miette sur la longue route de la série The Last of Us, et que la série exploitera bien cette mythologie cauchemardesque.

The Last of Us est disponible sur Amazon Prime Video en France avec un nouvel épisode tous les lundis à partir du 16 janvier 2023

 

The Last of Us : Affiche française

 

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commentaires lecteurs votre commentaire !
The nth zombie story
28/01/2023 à 15:50

Jamais joué aux jeux vidéos mais envie de tester la série. Pour l'instant, on se retape les mêmes ficelles habituelles de toute histoire de zombies. L'apocalypse qui arrive avec le héros qui n'arrive pas à sauver quelqu'un de cher à ses yeux, les zombies qui contaminent par morsure, le sauveur immunisé potentiel futur vaccin, un des persos infectés et tout l'émotion de sa mort inéluctable, ce même perso qui se sacrifie, etc, etc....

En plus j'apprends que dans le jeu, il y avait une originalité par rapport aux histoires de zombies classiques avec une contamination par spores... Très dommage d'avoir supprimé ce qui aurait été l'une des seules originalités par rapport à la multitudes de scénarios vus et revus.

Pour l'instant aucune originalité mais j'admets beaucoup aimer "l'image" du post apocalypse, plus que dans twd. La reprise de pouvoir de la nature sur la civilisation notamment en ville est très bien rendue et presque bucolique. La balade en ville fait balade champêtre un peu dangereuse.

Blobby
25/01/2023 à 19:31

Je n'ai jamais joué à ces jeux, et je trouve les 2 premiers épisodes plutôt pas mal (mais je suis quand même bon public).
Il faudrait quand même m'expliquer pourquoi les personnages ne se précipitent pas pour emporter tout ce qui peuvent transporter lorsqu'ils se débarrassent du policier et surtout, lorsqu'ils arrivent au Capitole (c'est vrai, pourquoi s'encombrer d'une grenade ou deux lorsqu'on a des espèces de zombie aux fesses ?).
D'autre part, pourquoi traverser un bâtiment, pas si large que ça (le musée), alors qu'on peut en faire le tour ??? Il y a quand même plus de 2 chemins pour aller d'un point A à un point B dans une ville, même en ruine, sans avoir à traverser des bâtiments douteux...

Joey Joe Joe Junior Shabadoo
25/01/2023 à 10:34

Comme dit dans un autre commentaire, énormément de passages font très jeu vidéo. Dans l'ép 1 c'était la voiture de police qui les sépare de Tommy, ici ce sont les différents passages "bloqués" ou qui se referment derrière eux (quand ils entrent dans le dernier étage du musée).
Ca donne un côté vraiment trop "mécanique" au déroulement des événements.

Sinon, on sent le budget, les décors sont magnifiques.

Hâte de voir si l'épisode 3, bien teasé par EL, parvient à transcender tout ça !

Aspiring-models.com
24/01/2023 à 21:45

j'adore !la série est un peu différente du jeu

@Hasgarn
24/01/2023 à 19:27

Tu vas chercher loin. Pourquoi pas.

À mon avis c'est juste qu'il y a un suspens avec le zippo qui n'aurait pas pu exister avec une grenade. Et puis il y a le baiser.

C'est un choix scénaristique qui n'a pas grand chose à voir avec la logique. Ça donne une séquence un peu artificielle mais qui fonctionne quand même.

Dans la réalité, personne ne voudrait brûler vif. C'est extrêmement douloureux.

Skostiss
24/01/2023 à 17:39

Incroyable cette hype. Esthétique et thématiques 1000 fois exploitées. Tous ces papiers pour un divertissement bien convenu. En même temps, on est dans une époque qui fait des analyses de 12 pages sur un mec déguisé en chauve souris.
Relire Alan moore qui parle de notre naufrage culturel.

fredisdead
24/01/2023 à 15:11

Neil Druckman commence la réalisation à la fois dans un univers qu'il maitrise à la perfection mais également avec la pression d'une des séries les plus attendus par les geeks et pas mal d'autres.
Il est assez logique qu'il ait finalement cherché à faire plaisir aux fans de TLOU en multipliant les clins d'oeil.
Clairement on supposera qu'après avoir fait plaisir à ceux qui souhaitaient voir des moments du jeu à l'écran de manière quasiment iso, la suite devrait nous laisser quelques surprises.
D'ailleurs de manière assez logique cet épisode est plus court que le prochain qui va regonfler d'une vingtaine de minutes.

Hasgarn
24/01/2023 à 15:01

@ Pouet
Très bonne question.
Tout simplement, l'explosion de la grenade provoque un souffle qui projette du shrapnel.
Ce souffle éteint toute flamme qui permettrait à l'essence de s'allumer.
Et même avec un briquet, on n'enflamme pas si facilement tous les hydrocarbures : il faut chauffer le gasoil, ce sont les vapeurs d'essence qui s'enflamme etc.

Les films prennent souvent de gros raccourcis même si, on est d'accord, les hydrocarbures s'enflamment plus facilement que de l'eau ;)

captp
24/01/2023 à 11:24

Encore un peu tôt pour se faire un avis définitif mais pour l'instant je ne vois rien qui n'a déjà été vu et revu.
Une belle introduction et on retombe sur la routine du genre devenue ennuyeuse en 2023.
Reste un budget qui se voit et des acteurs parfaits mais en état ça va très vite me lasser.
J'attends l'épisode 3 dont notre camarade d EL m'a rendu curieux et qui pourrait changer la donne :)

Clandestino
24/01/2023 à 11:17

En tant que joueur et fan des deux jeux, c'est exactement ce que j'ai envie de voir à l'écran. Le compromis entre la fidélité à l’œuvre originale et la dimension exploratoire pour approfondir les personnages, ouvrir de nouvelles thématiques et surtout, convenir au genre cinématographique est parfaitement réussi.

Comme c'est bien dit, la série a réussi à donner un intérêt aux personnages secondaires, dont Tess, qui disparaît très tôt. En quelques répliques, elle fait parfaitement le trait d'union entre les deux caractères bourrus d'Ellie et Joel. Et on comprends que sa disparition va devoir obliger les deux personnages à être soudés, ce qui ne sera pas une mince affaire.

La scène du musée est excellente. Elle retranscrit la dimension survie, par le manque de munitions et la robustesse des ennemis. Joel et Tess ne sont pas des sur-humains, ce qui rend l'affrontement plus tendu.

Les références au jeu ne sont pas lourdes, et bien introduites.
La fin est également dérangeante et mêle différentes émotions.

Le seul petit regret, c'est peut-être le passage ou Tess va libérer l'accès d'une porte. La scène fait très jeu vidéo. C'est voulu mais ça nous ramène direct au jeu. C'est pas bien grave et ça donne juste envie de rallumer la console. Mais disons qu'il faudrait éviter de multiplier ces éléments pour ne pas donner une progression trop mécanique de la série et trop jeu vidéo pour le coup.

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