His Dark Materials : À la croisée des mondes Saison 3 - critique qui mord la Poussière

Lino Cassinat | 2 janvier 2023
Lino Cassinat | 2 janvier 2023

Adaptée des romans jeunesse de Philip Pullman, His Dark Materials : À la croisée des mondes avait su nous convaincre le temps d'une belle saison 1, avant d'inexplicablement sombrer au cours d'une saison 2 brouillonne et confuse. Deux adjectifs qui s'appliquent à nouveau pour la fin des aventures de Dafne Keen, Amir Wilson, Ruth Wilson et James McAvoy au terme d'une ultime saison 3 qui vient confirmer un beau gâchis.

LE DAEMON DE L'ENNUI

On partait pourtant du bon pied. La saison 1, quoique non exempte de défauts, transportait grâce à son intrigue excitante et sa direction artistique soignée. Mais c'est comme si HBO et/ou la BBC avai(en)t démissionné(s) en cours de route. Peut-être à cause des audiences en nette régression, peut-être à cause de la pandémie qui a durement affecté le tournage d'une saison 2 confuse et ennuyeuse. On pouvait espérer naïvement qu'en s'attaquant à l'explosif troisième tome, His Dark Materials : À la croisée des mondes se reprenne, mais bien sûr ce n'est pas le cas et à l'inverse, comme trop pressée de conclure, elle livre une saison certes plus rythmée, mais aussi plus bordélique encore.

 

His Dark Materials : À la croisée des mondes : photo Cela n'a aucun sens, mais au moins ça fait des jolies couleurs

 

Tout commence avec Lord Asriel, venu libérer le roi Ogunwe. Qu'a fait le premier pendant son absence totale de la deuxième saison ? Qui est le second, et pour quoi se bat-il ? Aucune réponse. Les voilà donc frères d'armes alors qu'ils ne s'étaient jamais rencontrés avant, et le public doit juste l'accepter, puisqu'aucun effort de contextualisation ou de caractérisation ne sera jamais fait. Tout ici n'est que raccourci dans le scénario pour aboutir à des raccourcis dans le temps et se dépêcher d'arriver au gros discours avant la grosse bataille bourrée de CGI pour sauver l'humanité, la liberté, l'amour, la vie, les chatons et les grasses matinées. Car il en faut bien une, quand bien même on n'y comprendrait ni rien ni personne.

Accordons tout de même à His Dark Materials : À la croisée des mondes une belle constance technique : les effets spéciaux et les designs visuels/sonores sont toujours globalement de très bonne qualité, même si on note une sacrée baisse d'inspiration concernant le monde des morts et la rébellion. Le compositeur Lorne Balfe livre ici la meilleure partition qu'il n'ait jamais écrite, et elle est pour beaucoup dans le succès d'un ultime épisode très réussi, resserré sur une échelle intime qui, loin de rétrécir le drame, le rend au contraire aussi dévastateur qu'apothéotique.

 

His Dark Materials : À la croisée des mondes : photo, Dafne Keen, Amir WilsonQuand y'en a marre d'être là

 

UN ÉCLAIR PUIS LA NUIT

C'est loin de la pyrotechnie et des batailles rangées que His Dark Materials : À la croisée des mondes déploie sa véritable puissance émotionnelle, au creux d'une simple histoire d'amour impossible entre deux adolescents, bientôt contraints de quitter un Paradis perdu. Celui de leur propre bulle de savon, fragile et flottante dans un multivers régi par une implacable loi naturelle cosmique consacrant Will et Lyra en Roméo et Juliette interdimensionnels. Il n'y a plus de peste sur leurs deux maisons, mais il n'y a plus de joie non plus. Étrangement, il n'y en avait pas non plus dans celle du spectateur, qui a dû se fader sept épisodes précédents très inégaux avant d'en arriver enfin à ce bien trop tardif feu d'artifice final.

 

His Dark Materials : À la croisée des mondes : photo, James McAvoyUne montagne de charisme, même avec les mains dans les poches

 

Et il n'y en avait pas beaucoup non plus dans le cœur du casting, curieusement aux abonnés absents. C'est en particulier visible sur les visages d'Amir Wilson et surtout de Dafne Keen, qu'on a jamais vue aussi peu investie dans un rôle, pour lequel elle est de toute façon devenue manifestement trop âgée. Pendant ce temps, Ruth Wilson continue de mener son insaisissable personnage avec la délicatesse d'un Panzer dans un champ de tulipes, tandis que James McAvoy, en grand professionnel, y croit pour quatre sans convaincre. Seul le troublant Jamie Ward parvient à créer un léger frisson avec sa resucée inquiétante du pasteur de La Nuit du Chasseur, mais trop peu exploitée.

Plus triste encore, c'est la réalisation qui est pour de bon passée en mode minimum syndical du pilote automatique, incapable d'enrichir ou ne serait-ce que de souligner les maigres inflexions dramatiques du scénario avec les outils traditionnels de l'image. Quand on est trop flemmard au point de ne même pas se donner la peine de déplacer la caméra pour sortir du régime des plans moyens et faire des gros plans sur les visages au moment où Lyra est contrainte d'arracher une partie d'elle-même sur les rives du royaume des morts, c'est qu'il n'y a définitivement plus de cœur à l'ouvrage.

 

His Dark Materials : À la croisée des mondes : photo, Ruth WilsonMlle Coulter reste la plus grande déception de cette adaptation

 

ALPHA ET OMEGA-NUL

Les péripéties sont certes plus nombreuses, et les enjeux sont certes plus cruciaux que jamais, mais pourtant rien n'y fait : on attend que cela passe, surtout les quatre premiers épisodes. Et surtout on attend en vain que la série daigne se donner le minimum requis de cohérence pour que le spectateur puisse comprendre et intégrer l'univers, mais c'est peine perdue. Tout sort du chapeau et chaque épisode établit une nouvelle règle arbitraire, qui nous tombe dessus sans crier gare. Et surtout, il faudra se plier à la règle ultime des mauvais young adults : nos protagonistes progressent parce qu'ils sont spéciaux et que le monde tourne autour d'eux.

Comprendre que tout ce qu'ils entreprennent réussit et que le récit ne leur imposera jamais la moindre difficulté tenace. Traduction : nos deux morveux seront moins capables de déjouer tous les dangers par leur intelligence que par leur aptitude à faire éternuer leurs cerveaux à quiconque aurait la mauvaise idée de croiser leur chemin. Même encerclés par 500 soldats armés de M16, tout leur glisse dessus, et l'intégralité des opposants sont si bêtes et maladroits qu'ils feraient passer les Stormtroopers pour le FoxHound.

 

His Dark Materials : À la croisée des mondes : photoDu ! Du hast !

 

Que retenir de His Dark Materials : À la croisée des mondes, si ce n'est que la magistrale histoire de passage à l'âge adulte et la critique au vitriol du dogme religieux monothéiste a été réduite à un drama adolescent boutonneux pour le Bien et contre le Mal à peine meilleur que la moyenne ? Pas grand-chose, à part que Dieu ressemble au chanteur de Rammstein et que ce qui aurait pu et du être une grande série pour le jeune public n'a pas réussi à s'extirper du carcan étouffant d'un genre arrivé au bout de lui-même et qui aura bien du mal à retrouver ses lettres de noblesse après les méfaits des dix dernières années, Twilight et Hunger Games en tête.

La saison 3 de His Dark Materials : À la croisée des mondes est disponible en intégralité sur OCS.

 

Saison 3 : Affiche officielle

Résumé

Malgré sa direction artistique soignée et ses moyens conséquents, His Dark Materials : À la croisée des mondes est un énorme potentiel gâché. Elle devait élever le genre, mais en gommant toutes les aspérités de son matériau d'origine, elle contribue à l'enfermer dans son impasse créative et à nous faire désespérer de l'émergence d'une œuvre jeunesse qui n'infantilise pas son public en lui servant la soupe.

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Lecteurs

(2.6)

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commentaires
Bela Lugosi's dead
20/04/2024 à 02:22

Je m'arrête à l'épisode 6 de la première saison et pourtant je me suis accroché. On prend vraiment le spectateur pour un con. C'est creux. L'univers est intéressant mais développé de manière très simpliste. On se lasse, on s'ennuie. Personnages qui pourraient être attachants mais gâchés dans un flot de mièvrerie, de conflits abscons. Mal écrit, mal pensé. Un flop.

Fablond
20/09/2023 à 11:21

Je suis d'accord que la série à des defaults de narration, les sequences sont souvent rushé parce qu'il y a trop d'évènements à adapter du roman. Si l'on ce fait en tête on excuse beaucoup plus facilement les maladresse d'écritures et sequences accélérer. Concernant le jeu des acteurs ils sont en effets inégaux, mais là où je ne vous suis plus du tout c'est sur la performance de Ruth Wilson. Je trouve que c'est LE personnage de cette série.

Son évolution au fil des saisons est vraiment bien écrite, elle est constamment au bord de l'explosion et sa relation avec son singe, le seul deamon muet le met très bien en valeur. C'est un personnage qu'on voit évoluer grace à la performance de l'actice, plutot qu'à la faveur de dialogues lourdingues. On cherche constamment à savoir quels sont ses objectifs et la placer sur l'echiquier du bon/mauvais, allié/ennemis de Lyra.

Calimero
03/02/2023 à 15:10

C'est chaud de dire autant de bêtises. Jamais vu une critique aussi pitoyable, la saison 3 étant de loin la meilleure.

Tout les défauts souligné par cette critique sont inexistants, et sont mêmes des qualités a souligner (les acteurs qui sont absolument INCROYABLE par exemple, contrairement au bêtises qu'on peut lire ici).

Il parle de His Dark Material comme d'un mauvais Young Adult alors que c'est sûrement l'une des meilleures œuvres du genre jamais écrite.

"œuvre jeunesse qui n'infantilise pas son public en lui servant la soupe."
Si y a bien une œuvre qui n'infantilise pas son public c'est celle là.

Baj
02/02/2023 à 10:45

D'abord, je ne connaissais pas cette œuvre littéraire. C'est pourquoi je ne peux me prononcer sur la qualité de son adaptation. Cela dit, durant la première saison j'y ai vu une série qui semblait prometteuse. J'ai même été surpris par les effets spéciaux. Malheureusement, durant la deuxième saison, mon intérêt a diminué radicalement. Le manque de constances et de cohérences dans la psychologie des personnages m'ont agacé. Puis, commence les morts inutiles pour tenter de maintenir l'auditoire. Et toutes ces références avec la création et l'autorité sont intégrées à l'histoire de façon décousue et chaotique. Cela m'a donné l'impression que l'histoire changeait littéralement de cap. En fait, j'ai commencé à me dissocier de la série et à me questionner sur la profondeur réelle du message qu'on tente de nous faire ingérer. J'ai tout de même entrepris de poursuivre et de faire fis de ces irritants. La saison 3 fut alors plus légère à écouter dès lors que mes attentes étaient diminuées jusqu'à, cette conclusion. Comme j'ai mentionné, je n'avais aucune connaissance de l'histoire originale cependant, il m'aurait été préférable d'approfondir mes recherches outre que la note globale sur Rottentomatoe. Franchement, j'ai l'impression d'avoir gaspillé mon temps. Selon moi, la finale est insensée, quoique non prévisible. Je dois admettre que je ne suis pas un fan de fin dramatique, mais tout de même, il y a des films/séries qui si prêtent bien, pas dans ce cas-ci. Je n'ai pas saisi la nécessité de terminer ainsi. Au contraire, j'y ai ressenti qu'on m'imposait un sentiment aigre d'une finale exécuté par un auteur désireux de suivre une mode littéraire.

Zéphyr56
31/01/2023 à 13:56

Ennuyeuse, je regarde juste pck les livres sont passables... Casting pourri. Pas de transmission de sentiments. L'actrice principale ne reflète pas la lyra du livre... Et ça se voit. C'est une rebelle oui, mais à la gueule d'ange à la base qu'ils e fait son Caractère au fur et à mesure, dans la série ce n'est pas le cas. Elle n'inspire ni l'empathie ni quoi que ce soit. Pareille pour madame Coulter, qui représente le côté malin et charmeur. Elle tue au bout de 2 min.. C'est assez ennuyeux comme série.

Guillaume59
13/01/2023 à 16:08

J’avoue avoir eu un mal fou à entrer dans cette saison 3 et failli abandonner après l’épisode 2. C’est vrai que beaucoup de choses restent évasives et pas réellement expliquées pour les novices de la Saga littéraire. Dans l’avant dernier épisode dont on imaginerait l’épilogue, tout va trop vite que ça en devient un bordel monstre. La 1ere saison restera pour moi la meilleure et aura fait oublier le carnage de l’adaptation cinématographique. On aura bientôt le droit à la nouvelle adaptation de Narnia et ça promet aussi une belle déception.

Fanny
08/01/2023 à 11:42

J'ai beaucoup de mal à comprendre votre explication, pas claire selon moi. J'ai vraiment bien aimé His Dark Materials de mon côté, après effectivement l'épisode de la bataille finale n'est pas très clair sur tous les points mais j'en garde une bonne impression!

Laeti
05/01/2023 à 17:07

Pas du tout d'accord avec vous. J'ai trouvé la série d'une grande qualité sur tous les plans et surtout, extrêmement respectueuse de l'œuvre originale. Il n'y a qu'à aller rouvrir les livres pour retrouver certains dialogues, quasiment aux mots près.

Kirito99
04/01/2023 à 01:21

J'ai adoré les 3 saisons donc totalement pas d'accord avec votre avis qui comme d'habitude n'a aucune importance pour moi. Car vous êtes site de rageux qui n'aime rien et son jamais content et vous passer votre temps à descendre et critiquer les oeuvres car vous savez rien faire d'autre de votre vie. Je déteste votre site à toujour critiquer les oeuvres. Il y a certe des gens en accord avec vos avis mais sa sera jamais mon cas car bizarrement les choses que vous aimer pas moi je les aimes et les choses que vous aimer ben je les aimes pas et sa il y a une seule raison qui l'explique on a pas les mêmes goûts en matières de films et séries.

OdrN
03/01/2023 à 23:38

La saison 1 était en effet prometteuse, puis la seconde a été a festival de n'importe quoi. Cette saison l'est tout autant mais en plus on s’ennuie à mourir (certaines scènes sont longues, mais longues !), comme la moitié des personnages qui pour la plupart ne savent pas ce qu'ils font là. Toutes les choses importantes nous sont balancées au visage au trébuchet sans aucune explication. Quand au dernier épisode, il ressemble à un amas d'histoire secondaires qu'on aurait oublié de résoudre et qu'on balance comme ça en guise d'épilogue.

Globalement d'accord avec cette critique du coup sauf en ce qui concerne la "constance technique". Pour les daemons, peut-être mais pour le reste : entre les plans larges en images de synthèses flous et approximatifs et les honteuses maquettes de l'épisode 2 qu'on essais de faire passer pour des plans aériens, on est pas loin du foutage de tronche.

J'ai un souvenir assez vague du roman. Je me souviens qu'il était écrit sans grand talent même si l'histoire était intrigante, là c'est juste réalisé sans talent.

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