Destin : la saga Winx saison 2 - critique moldue sur Netflix

L'AUTRE MONDE AUSSI EST PETIT

Après une première saison de Destin : la saga Winx décevante – et même déconcertante sur de nombreux points –, la série ne parvient toujours pas à gagner en épaisseur, notamment en ce qui concerne sa toile de fond. L'Autre Monde est un pastiche aussi quelconque et étriqué qu'auparavant, la saison n'ayant dévoilé que quelques bribes de mythologie supplémentaires : un royaume des ombres entraperçu, un pouvoir surpuissant qui a du mal à prendre forme et une guerre ancestrale qui se termine dans une cour d'école.

Autrement dit, d'autres notions de fantasy convenues et maltraitées qui n'offrent que quelques lambeaux de chair en plus à ronger sur l'os.

Valtordu

Au-delà du manque d'originalité de la série, le plus frustrant est de ne jamais quitter les couloirs d'Alféa ou ses environs, alors même que la saison promettait un affrontement à plus grande échelle pouvant impliquer différents royaumes du monde magique, en particulier celui de la reine Luna et de la princesse Stella. En plus de sortir l'intrigue de sa léthargie, visiter Solaria, Erakylon, Andros ou n'importe quel autre lieu inventé aurait peut-être permis à la direction artistique d'être moins fade, de se diversifier et de prendre un réel parti-pris esthétique pour réveiller le public.

Plutôt que d'arborer des décors et paysages plus étoffés pour renouer avec la dimension fantastique de l'oeuvre, les épisodes préfèrent se murer dans un cadre triste et dépouillé qui trahit l'économie de moyens de la production. Même si la volonté du showrunner était de dépeindre un univers plus sombre et réaliste, cela n'empêchait pas de faire preuve d'un minimum d'inventivité pour se trouver une identité plus singulière et plonger dans autre chose qu'un verre d'eau.

Toujours le même environnement minimaliste

POUSSIÈRE DE FÉE

En plus du microcosme peu attrayant et immersif, le scénario n'apporte rien de plus consistant, quand bien même les enjeux semblaient enfin se muscler à la fin de la première saison. Pour rappel, tel Severus Rogue dans Harry Potter, Rosalind (nouvellement jouée par Miranda Richardson) a tué Farah Dowling et pris sa place de directrice d'Alféa, faisant ainsi planer une lourde menace sur l'Autre Monde. Mais les épisodes ont du mal à incarner la puissance et le danger qu'elle est censée représenter, étant donné que son soi-disant règne de la terreur se déroule presque entièrement hors champ et qu'elle use très peu de ses pouvoirs de l'esprit. 

Plus maladroitement encore, la saison tente de brouiller la frontière entre protagoniste(s) et antagoniste(s) et de renverser les dynamiques de pouvoir. Les épisodes cherchent à rendre plusieurs de ses personnages ambigus, qu'il s'agisse de Bloom, Rosalind, Beatrix ou Sebastien, qui passent péniblement et sans subtilité d'antihéros à antagoniste et inversement sans que cela enrichisse leur caractérisation ou force l'empathie.

Tout un potentiel dramatique saccagé par trop de retournements foireux

Toutes ces contorsions scénaristiques et autres révélations dégonflées s'ajoutent enfin à de nombreuses facilités d'écriture qui déjouent systématiquement le peu de tension qui arrive par moments à s'installer ou les noeuds scénaristiques qui promettaient d'être plus intéressants. L'action physique se contente quant à elle de quelques scènes de combat mal chorégraphiées où les Spécialistes font plus de roulades que de dégâts. 

En ce qui concerne la magie, elle passe principalement par des iris grossièrement colorés pendant cinq épisodes, la saison ayant gardé le peu de cartouches qu'elle avait en réserve pour les deux derniers. Leur générosité est cependant celle du père Fouettard avec des paires d'ailes au rabais et une séquence de transformation affligeante qui cristallise tout le grotesque de l'adaptation. Forcément, refaire au premier degré et en prises de vues réelles des transformations de Magical Girl, mais plus édulcorées, ne pouvait faire que grimacer à défaut d'émerveiller. En ce sens, il est sûrement préférable que le "grand" combat final ait duré moins de cinq minutes. 

Eh bah... on a hâte de voir l'Enchantix

TEEN CLUB

Destin : la saga Winx est une série décousue et déséquilibrée qui jongle entre ses histoires de fées et ses tranches de vie adolescentes sans grand intérêt non plus. En plus d'être une mauvaise série fantastique, c'est donc aussi un mauvais teen drama qui peine à s'intéresser à ses personnages et à les faire interagir faute de temps. Si Musa est mise davantage en avant, c'est toujours au détriment d'autres protagonistes, comme Stella, Sky, Dane ou Silva qui restent en retrait, se contentent d'une maigre sous-intrigue pour exister, sans que leur arc narratif s'embarrasse de finesse ou de nuance. 

Outre le jeu bancal de la moitié du casting, sans oublier les lignes de dialogue paresseuses et dégoulinantes de mièvrerie (un des rares brins d'ADN du dessin animé qui a été conservé), la saga Winx tente de mettre les pieds dans le plat en parlant de sexualité, qu'elle ne fait cependant qu'effleurer. Elle se voudrait même subversive avec sa scène de plan à trois qui filme des bisous en plan serré. Sacrément olé olé et pertinent tout ça.  

Non Musa, résiste 

Même si la distribution principale a été réduite par rapport à la série d'animation, elle reste surchargée et les quelques nouveaux personnages ont du mal à trouver leur place, à commencer par Grey qui n'est qu'un outil scénaristique pour s'intéresser (enfin) à Aicha, sans vraie consistance jusqu'ici. Il est cependant appréciable que les épisodes montrent enfin une dynamique de groupe entre les filles et les Spécialistes, même si là encore, l'intégration de Flora est brusquée et manque de naturel.

Sa douceur, sa naïveté et ses pouvoirs ayant été attribués à Terra, le personnage est donc radicalement différent de la série (au point où celle-ci flirte avec Riven !), et tant mieux. En revanche, sa nouvelle personnalité est tout aussi clichée – on parie qu'elle a un "Carpe Diem" tatoué quelque part – tandis qu'elle reste encore en retrait des autres, la série ayant probablement du mal à différencier ses pouvoirs de ceux de sa cousine. 

Floratée

Bloom de son côté reste une héroïne fade, plus insupportable qu'attachante, à laquelle ni le scénario ni le jeu d'Abigail Cowen ne rendent service. Sa quête d'identité manque de poids, sa puissance est encore trop factice et ses tourments (surtout les plus graves) sont balayés. C'était par contre la mieux habillée pour l'épisode du bal, et c'est déjà ça (non).

Si on pouvait penser que la saison 2 comblerait les lacunes de la première, la saison 3 (si elle est confirmée) aura fort à faire pour relever le niveau et retrouver un peu de magie et de fantastique, à défaut de féérie.

La saison 2 de Destin : la saga Winx est disponible en intégralité sur Netflix depuis le 16 septembre 2022