For All Mankind saison 3 : critique de la meilleure série que vous ne regardez pas sur Apple TV+

A life odyssey

For All Mankind a prouvé que son système narratif, faisant un bond de dix ans en dix ans entre chaque saison, était un risque payant avec son incroyable saison 2. D'un côté, cela a permis d'avancer plus rapidement dans le récit et donc d'éviter les sempiternelles sous-intrigues redondantes ou moins inspirées trop longtemps. Mais plus encore, alors que la série commençait avec une modification minime de l'Histoire (les Soviétiques ont marché sur la Lune en premier), ses bonds en avant lui ont donné la possibilité de montrer à quel point cette simple différence entre notre univers et le sien pouvait avoir des conséquences majeures.

D'où une saison 3 s'ouvrant en 1992 et où la Guerre froide est loin d'être terminée. Où les Soviétiques et Américains sont d'ores et déjà en train de s'affronter pour conquérir Mars, où une femme est candidate à la présidence des États-Unis, où le tourisme spatial vit de beaux jours, où des avancées technologiques majeures ont été opérées par les entreprises de milliardaires (simili Elon Musk ou Jeff Bezos) à l'aide des découvertes faites sur la Lune, où le complotisme fait déjà des ravages. Bref, en à peine deux saisons, For All Mankind s'est ouvert des perspectives complètement folles et compte bien les rendre encore plus dingues au fil des saisons.

En route vers..

C'est justement ce qui rend la série Apple TV+ captivante : la façon dont les scénaristes, et particulièrement les deux showrunners Ben Nedivi et Matt Wolpert (Ronald D. Moore ayant laissé le gros du travail au duo), rattrapent notre univers (technologiquement, socialement, économiquement...) à travers les intrigues. Et pourquoi ? Pour mieux le dépasser à terme et transformer la simple uchronie spatiale en véritable oeuvre de science-fiction unique et à part entière.

Car avec un plan scénaristique prévue sur sept saisons et une saison 3 teasant une quatrième saison prête à nous plonger dans les années 2000, For All Mankind devrait pouvoir complètement exploser notre avenir lors de ses saisons 6 et 7, a priori prévues pour se dérouler entre 2033 et 2053 (si la trame actuelle est suivie jusqu'au bout). Il y a donc une sensation d'immensité permanente lorsqu'on regarde For All Mankind. D'abord grâce à son ambition sérielle rare sur le petit écran (aucune série ne fait autant confiance à ses spectateurs pour sauter de dix ans entre chaque saison), mais aussi à travers le spectacle proposé par l'intrigue en elle-même.

... la planète rouge

the martian chronicles

Avec sa course vers Mars, la saison 3 de For All Mankind est, en effet, un terrain d'action cosmique absolument démentiel, probablement l'un des plus impressionnants du moment, petit et grand écran confondu. Parce qu'évidemment, la conquête spatiale n'a rien d'une partie de plaisir. Et si la course à la Lune et à son appropriation avait déjà été le déclencheur de nombreux malheurs et dangers, ce n'était rien en comparaison de ce qui attendait les personnages avec la planète rouge.

Avec plus de concurrence (une bataille à trois voire plus), plus de distance à parcourir et plus de guerres internes (les personnages étant désormais bien installés), cette saison 3 montre un peu plus la petitesse de l'humain face à l'hostilité de l'espace. En résulte quelques moments de bravoures hallucinants entre un mariage se transformant en pure catastrophe (genre de Poséidon dans l'espace), un sauvetage en pleine conquête, un double amarsissage plein de tension ou encore un accident explosif sur le sol martien.

Autant dire que For All Mankind offre un spectacle dingue tout au long des dix épisodes de sa troisième saison, et avec une tenue visuelle toujours aussi impressionnante (même si certains effets spéciaux semblent un peu moins aboutis que les saisons précédentes).

Affronter l'inconnu

Et dans le même temps, For All Mankind continue surtout à être une grande série intime sur le destin d'une petite troupe d'hommes et de femmes. C'est la grande force de la série après trois saisons : la manière dont elle parvient à allier les éléments micros et macros, les récits intimes et publics, les conséquences personnelles et professionnelles. Alors oui, il faut être honnête et avouer que les deux derniers épisodes de cette saison 3 flirtent parfois avec le soap opera, et que quelques sous-intrigues (notamment tout ce qui tourne autour de Danny Stevens, Karen Baldwin et Ed Baldwin) manquent grandement d'intérêt.

Pour autant, les petites stries concernant certains arcs individuels n'enlèvent pas la puissance d'autres destins. Encore une fois, même si elle est plus en retrait malgré son rôle, Ellen Wilson (Jodi Balfour) bénéficie d'un traitement passionnant. D'autant plus dans les derniers instants de l'épisode 9 où tout son monde pourrait s'écrouler (l'avenir nous le dira) et où le progressisme affiché de cette variation de notre univers semble, finalement, loin d'être totalement acquis.

Un combat quotidien

Et il en est de même pour les derniers instants de quelques figures emblématiques (la série ne craint toujours pas de faire des morts) ou l'arrivée de nouveaux visages immédiatement fascinants (un simili Seul sur Mars inattendu)... Ainsi, For All Mankind réussit à être à la fois une fresque colossale et spectaculaire aux infinies possibilités, et un drame bouleversant sur les minuscules tragédies quotidiennes de l'humain. Sublime.

Les saisons 1, 2 et 3 de For All Mankind sont disponibles en intégralité sur Apple TV+