Parlement saison 2 : critique adoptée à l'unanimité sur France.tv

Matthias Mertz | 13 mai 2022
Matthias Mertz | 13 mai 2022

C'est le retour de Parlement, la satire politique franco-germano-belge sur le parlement européen écrite par Noé Debre, réalisée par Émilie Noblet et Jérémie Sein, et diffusée sur France.tv. Au menu, de nouveaux imbroglios politiques auxquels on ne comprend rien (mais dont on rit tout de même), des jeunes issus de Sciences Po dont les dents rayent le parquet, et peut-être quelques nouvelles des énergumènes parmi les plus étranges à décider de l'avenir de notre continent.

Baron noir et blanc bonnet

La première saison de Parlement nous introduisait au jeune Samy, incarné par Xavier Lacaille, fraîchement devenu assistant parlementaire. Malgré son côté un peu gauche, il espérait survivre au parlement européen grâce à son bagout et son charme, mais aussi grâce à ses récents alliés : Rose, une collègue britannique au service d'une députée conservatrice durant l'épisode du Brexit, ou encore Torsten, un électron libre issu de l'autre côté du Rhin.

Cette deuxième saison reprend largement ce postulat. Si Samy est désormais un peu plus au courant du fonctionnement complexe du Parlement (au moins assez pour faire illusion en tout cas), il officie désormais auprès d'une nouvelle députée, Valentine, plus ambitieuse, et moins bienveillante que le sympathique Michel. Ensemble, ils portent le projet du Blue Deal, un effet de manche repris dans les médias qui devient le cheval de bataille de leur ascension professionnelle, malgré les difficultés à le faire signer.

 
Parlement : photo, Georgia Scalliet, William NadylamUn peu longues et prévisibles, mais pas dénuées d'intérêt, ces négociations

 

Cette deuxième saison est un raffinement léger de la formule qui avait abouti à la première. Plus de négociations féroces autour d’un pompeux projet de Blue Deal, plus de personnages secondaires, mais toujours la même ambition réalisée de rendre intrigant un sujet en apparence aussi barbant que le parlement européen. C'est chose faite, en partie grâce à un tournage désormais à Strasbourg qui s'offre le luxe de sortir des annexes du Parlement.

Toutefois, la série paye le prix d'une formule presque similaire. On notera que les longues négociations se révèlent parfois plutôt convenues dans leur dénouement comme leurs péripéties, et les alliances comme les trahisons de ces députés à la solde d'autres intérêts sont désormais plus facilement identifiables après une première saison qui avait usé des mêmes ressorts.


Parlement : photo, Xavier LacailleSamy est résolument plus gris moralement que dans la première saison

 

Sept au parlement

On retrouve un casting presque identique à la saison précédente (à l'exception du personnage d'Ingeborg) et enrichi de quelques nouvelles têtes, parmi lesquelles la glaçante Valentine (incarnée par Georgia Scalliet), ou encore Lydia (Anaïs Parello), vision fantasmagorique de la jeune gauchiste végane de votre oncle le plus raciste.

Si le personnage de Valentine a une capacité passionnante à être une poigne de fer dans un gant de velours (particulièrement lorsqu'il faut charmer de vieux députés et leur faire donner la patte), le personnage de Lydia laisse sur sa faim. D'abord, car il est une caricature brouillonne, mais surtout, car sa présence ne se justifie que pour mettre Samy, dont le taux d'abnégation est en chute libre, face à ses contradictions.

Lydia apparaît alors comme un cheveu sur la soupe après chacune des décisions carriéristes de Samy pour le sanctionner et permettre au scénario de réaliser un jeu de ping-pong durant les négociations. Qui plus est, la conclusion de l'arc narratif du personnage apparaît comme peu cohérente, après des retournements successifs sans queue ni tête au vu de la morale de la jeune femme.


Parlement : photo, Georgia Scalliet, William NadylamEamon est toujours un personnage absolument fascinant

 

À l'inverse du personnage de Lydia, certains nouveaux venus écopent d'un développement satisfaisant, à commencer par le Martin Kraft de Johann von Bülow, capable d'osciller entre machiavélisme et bienveillance paternelle. Le personnage de Bertrand, incarné par un Fred Blin manifestement habité par Philippe Katerine, achève de rendre savoureuses les péripéties à l'intérieur du bureau du Président du parlement européen en ouvrant la boîte de Pandore des fantasmes liés à la fonction.

On notera également, à propos des vétérans de la série, que l'hilarant Torsten, incarné par Lucas Englander, continue de nous surprendre dans des situations loufoques malgré une présence plus faible à l'écran, souvent réduite à des Deus Ex Machina improbables. Quant à Rose, devenue lobbyiste après la sortie de l'Europe de l'Angleterre, on regrettera, malgré le talent comique indéniable de son interprète, Liz Kingsman, son développement si prévisible et si pauvre.

 
Parlement : photo, William Nadylam, Philippe DuquesneDeux salles, deux ambiances

 

Charlie Specklin

Si Parlement s'enfonce dans un récit résolument plus politique et plus féroce pour cette deuxième saison, que les amateurs de comédie se rassurent, la série n'a rien perdu de sa superbe lorsqu'il s'agit de faire travailler les zygomatiques. Elle parvient d'ailleurs à mobiliser quelques classiques, à commencer par des discussions rappelant l'interrogatoire de La Grande Vadrouille, une référence ahurissante au Chevalier inexistant d'Italo Calvino, ou encore des poursuites dans les couloirs du parlement dans un style très Arrête-moi si tu peux.

Il faut à ce sujet souligner l'impact des personnages de Bertrand, Michel et Martin, dont les séquences communes sont hilarantes, et bien insérées dans le récit. L'alternance entre les négociations intenses et les moments d'ennui à la The Office dans le bureau de la présidence permettent à la série de souffler le chaud et le froid sans jamais ralentir.

 
Parlement : photo, Philippe DuquesneÉlu comme le plus drôle et adorable à l'unanimité, en assemblée plénière

 

Enfin, si Parlement peut se targuer de faire intervenir des personnages et des acteurs de nationalités, d'âge, et de langues différentes pour notre plus grand plaisir de polyphone, la série ne survit pas à un visionnage en version française. Elle en est consciente, puisqu'une rapide séquence au début de certains épisodes recommande vivement le visionnage en version originale avec sous-titres. S'il semble difficile de faire autrement pour une série aussi polyglotte, c'est dommage, compte tenu de son potentiel pédagogique qui aurait pu donner envie de la confronter à nos chères têtes blondes.

Parlement est disponible en intégrale sur france.tv depuis le 9 mai 2022

 

Parlement : photo

Résumé

Loin des Baron Noir ou House of Cards, Parlement continue de joyeusement mettre en scène la politique européenne dans tout son grotesque, mais aussi son humanité. Son casting solaire parvient à rendre frais une recette déjà vue, attention toutefois aux erreurs d'écriture de certains personnages, qui auraient mérité mieux.

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commentaires
Chris11
15/05/2022 à 09:58

Je viens d'essayer la S1, je n'accroche pas du tout. Trop... absurde pour moi.
Mais TheOffice et HeroCorp m'avaient fait le même effet au premier abord, avant d'y retourner la bave aux lèvres quelques mois après. Alors je réessaierai plus tard.

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