Baki Hanma : critique d'un anime qui fout les pieds où il veut sur Netflix

JL Techer | 4 octobre 2021 - MAJ : 04/10/2021 15:23
JL Techer | 4 octobre 2021 - MAJ : 04/10/2021 15:23

Avec Baki Hanma, qui arrive en France sur Netflix, l'anime d'arts martiaux Baki gagne un nom de famille, mais ne s'éloigne pas pour autant de sa recette déjà éprouvée. Lointaine héritière de Hokuto no Ken et de Hajime No Ippol'oeuvre de Keisuke Itagaki divise par son style graphique et sa violence à la limite du gore. Avec cette saison 3 (ou saison 1 de Baki Hanma), qui n'est pas un reboot mais bien une suite, la série confirme son statut de meilleur choix pour les passionnés de sports de combat. Cependant, il s'agit plus d'une victoire aux points, plutôt que par K.O.

LA bagarre !

Amaigri, victime d’un poison qui ronge son corps depuis des semaines, Baki se meurt à petit feu. Pourtant, Retsu Kaioh, maitre du Kenpo chinois, l’a inscrit au Grand Tournoi du Raitai, compétition secrète qui oppose les plus grands artistes martiaux du monde. L’issue de son premier combat face à Kaioh Li (Sea King Li en version US), le maitre de la technique de la main empoisonnée ne fait donc aucun doute. Ce n’est pas un combat, mais une mise à mort.

Sous les yeux de Yujiro "L’Ogre" Hanma, son père biologique, et accessoirement titulaire du titre de "l'homme le plus fort du monde", il s’effondre au bout de quelques secondes de combat. Kaioh Li sera vainqueur, cela ne fait aucun doute. Baki gît au sol, le regard vide, le corps couvert de sang. Il ne lui reste plus assez de force pour survivre. Voyant ses derniers instants arriver, Kozue, celle dont Baki est épris, se précipite vers lui.

 

photoUne sacrée angine

Le rêve de Baki de pouvoir un jour terrasser son père s’envole à mesure qu’il perd connaissance. Kozue se penche au-dessus de lui, ses larmes coulent sur ses joues, elle sait qu’il est perdu. Ces mêmes larmes de désespoir tombent sur le visage émacié du jeune homme. Quelques instants plus tard, il se redresse, de manière inexplicable le voilà de nouveau sur pied. Kaioh Li s’apprête à lui donner le coup de grâce, mais il esquive avec l'agilité d’un félin. Retsu Kaioh hurle que le poison est neutralisé. Baki est de retour. Son adversaire va mordre la poussière... 

Les os craquent, le sang se répand. Li est K.O. Le public exulte. Yujiro jubile à l'idée de voir en son fils un adversaire à sa mesure. Baki sait qu'il est allé par-delà ses propres limites et qu'il s'approche peu à peu de son but : devenir suffisamment fort pour vaincre l'Ogre. Le guerrier peut enfin se reposer, et il étreint celle grâce à qui (peut-être ?) il a survécu au pire des poisons pour revenir à la vie.

Le combat du héros contre Kaioh Li représente à merveille l’anime Baki. Violence, corps martyrisés et meurtris, gore et émotion, grâce à ce cocktail explosif, Netflix parvient à tenir en haleine le public tout au long des deux premières saisons de la série. Suivre le héros dans sa quête de puissance est à la fois fascinant et jubilatoire. Malgré les faiblesses de son scénario, et un aspect visuel qui en rebutera certains, les saisons 1 et 2 de la série méritent l’attention de tous ceux et celles qui ont un minimum d'attrait pour les arts martiaux. Mais cette "nouvelle" itération, Baki Hanma, parvient-elle à rivaliser avec les sommets des deux premières saisons  ?

 

photoDe la bagarre, et de l'amour

 

Le Fils de l'Ogre

Bien que Netflix affiche "Baki Hanma, saison 1", qu'on ne s'y trompe pas, il s'agit bel et bien de la suite directe des deux premières saisons de Baki. Tant au niveau de l'animation (toujours très solide) que du chara-design, le public sera en terrain connu. Les fans ne seront pas dépaysés, et les nouveaux venus seront... surpris.

La surprise viendra principalement de l'aspect visuel de l'anime, on ne peut plus clivant. L'auteur, Keisuke Itagaki, offre un travail sur les corps qui confine à une forme d'érotisme. Muscles hypertrophiés, épaules démesurées, morphologies hors normes, sa galerie de combattants ne peut que marquer les rétines et les esprits. Kaoru Hanayama est un colosse de deux mètres presque aussi large que haut. Baki a le corps d'un dieu grec couvert de lacérations. Quant à Yujiro Hanma, il tient son surnom "Ogre" du fait que les muscles de son dos forment le visage d'un démon. Ces corps tiennent plus du domaine du fantasme que de celui du réalisme. 

 

photoL'Ogre a des yeux dans le dos

 

L'érotisation de ces corps, amas de muscles et de blessures, est bien présente dans le manga de Itagaki, cependant elle prend une tout autre dimension dans la série animée. Les characters designers Fujio Suzuki et Shinjg Ishikawa ont véritablement transcendé le matériau de départ pour rendre l'ensemble encore plus impactant visuellement. Il n'y a qu'à prendre pour exemple le design du héros. De personnage au design assez commun dans le manga, au visage presque poupon, il devient un héros aux traits marqués et abimés par des années d'entrainement au-delà des limites humaines.

Le fossé est tel entre le manga et l'anime qu'il n'est pas sans rappeler celui existant entre le manga Saint Seiya et sa version animée, sublimée par le travail magistral de Shingo Araki. Le passage d'un support à l'autre a fait le plus grand bien à Baki, tant au niveau graphique que scénaristique. Les personnages ont en effet gagné en charisme, et le scénario en clarté, un tour de force dans le cas du manga d'Itagaki. Disons-le sans détour : les séries Netflix Baki et Baki Hanma sont bien supérieures à leur format papier. 

Et pourtant, rien n'était gagné d'avance. Si porter un manga sur écran est toujours compliqué, toucher à Baki a dû être le supplice de Tantale. Dans sa version papier, l'oeuvre se compose de pas moins de cinq séries de mangas, pour un total de plus de 80 tomes, sans compter ses spin-offs. De plus, le héros a déjà vu ses exploits adaptés dans un OAV (Original Animation Video) et une série d'animation en 2001 sur TV Tokyo. La série Netflix quant à elle, se concentre sur la seconde série de mangas, intitulée Hanma Baki, d'où l'adoption de ce nouveau titre.

 

photoPas de Kaiju à l'horizon, mais un combat mental 

 

Malgré un scénario téléphoné, le Baki de Netflix parvient à être une série passionnante. Sa saison 1 surprend par la brutalité de ses affrontements et par l'évolution de son héros, qui passe dans la douleur du stade de jeune lycéen avide de baston, à artiste martial accompli. Mais c'est véritablement dans sa saison 2 que Baki prend son envol. On parle là du personnage, mais aussi de la série. Cette saison qui relate les événements du Grand tournoi du Raitai est une masterclass du récit d'arts martiaux. Chaque personnage y bénéficie d'un background solide (mention spéciale à Alai Jr, le fils de Mohammed Ali), et chaque combat est un vrai shoot d'adrénaline.

Malheureusement, cette saison 3/saison 1 (on s'y perd) a beau attribuer un patronyme à Baki, elle ne parvient pas à atteindre les sommets des précédentes. Le rythme y est moins bien maitrisé, et avec seulement trois véritables combats pour 12 épisodes, la soif de sang et d'os brisés du public n'est pas satisfaite. La désagréable impression d'avoir affaire à une saison de remplissage en attendant un retour en fanfare ne quitte pas le spectateur lors du visionnage de la saison. Même l'affrontement tant attendu entre Biscuit Oliva et Baki déçoit...

De plus, quand bien même la série s'appelle maintenant "Baki Hanma", le héros n'aura jamais été aussi absent. Après le grand tournoi d'arts martiaux, c'est à un huis clos carcéral que l'on a à faire, et les personnages centraux en sont Biscuit Oliva et le mystérieux Numéro 2, au détriment de Baki. La rivalité entre ces deux colosses est certes distrayante, mais difficile de ne pas rester sur sa faim, quand on voyait poindre à l'horizon de la saison 2 l'affrontement entre Baki et son père. Un parricide qui décidément se fait attendre... 

 

photoCe slip léopard de toute beauté

 

L'héritier du Hokuto (de cuisine)

Avec son jeune héros, qui va de combat en combat afin de devenir plus fort et d'enfin affronter le mal ultime (son propre père), Baki déroule une structure scénaristique très classique. Il conserve ainsi l'héritage des shonen classiques (manga pour garçons).et s'inscrit parmi les héritiers de Hajime no Ippo, ou même de Dragon Ball. La première saison de la série Neflix en particulier, avec son tournoi secret d'arts martiaux, ramène aux grandes heures du Budokai Tenkaichi du manga d'Akira Toriyama.

Mais la véritable influence de la série est à trouver du côté d'un autre titre culte. Ces corps de dieux grecs qui luttent dans des pugilats sanglants, voire gore, avec ces litres de sang versé à chaque coup porté rappelleront des souvenirs à ceux qui ont connu Hokuto no Ken (Ken Le Survivant). Le côté outrancier de Baki fait clairement référence au manga culte de Buronson et Tetsuo Hara. Histoires de famille (Baki aura fort à faire avec son demi-frère Jack, comme Kenshiro avec Raoh), quête de vengeance, adversaires toujours plus forts et sadiques... Les points communs entre les deux oeuvres ne manquent pas. 

photoHokuto no Ken : du sang, des muscles et des problèmes familiaux 

 

Malgré toutes ces ressemblances, Baki n'est absolument pas un Hokuto no Ken au rabais. La série a sa propre identité, et parvient à marquer les esprits grâce à une mise en scène très crue des actes de violence, et à l'iconisation érotique de chacun des combattants que nous évoquions plus tôt. De plus, la série bénéficie d'un certain humour, là où Ken gardait en permanence un sérieux imperturbable derrière ses épais sourcils. 

La première saison en particulier baigne dans une atmosphère lycéenne propice aux situations comiques. Le test d'effort de Baki fait fortement penser à Kimengumi (le collège fou, fou, fou au pays du béret-baguette). Mais cela ne s'arrête pas là. Dorian qui retombe en enfance, Kaioh Jaku qui supplie ses adversaires de s'allier à lui, la relation intime de Biscuit Oliva... La série se paye même le luxe de se moquer gentiment et de rendre hommage au cultissime Akira, dans une séquence grand-guignolesque où Oliva explique la source de sa force. Baki ne manque jamais l'occasion de faire sourire, cela contribue à lui conférer une personnalité uniqueet à contrebalancer sa violence visuelle. 

On peut voir dans la volonté de Baki de tuer son père une motivation oedipienne très psychanalytique. Si le héros a besoin de vaincre son paternel pour enfin atteindre la liberté et l'âge adulte, Baki, la série, a franchi cette étape avec brio. En ayant digéré ses influences et en parvenant à s'en affranchir pour se forger sa propre personnalité, l'anime a réussi à devenir un poids lourd du catalogue anime de Netflix. Un divertissement de choix dont on attend le plat de résistance avec impatience, après le trop léger hors-d'oeuvre Baki Hanma. 

Les saisons 1 et 2 de Baki, et la saison 1 de Baki Hanma sont disponibles en intégralité sur Netflix.

 

Affiche officielle

Résumé

En récupérant un patronyme, Baki Hanma n'a pas pour autant encore gagné son statut d'incontournable. Bien que cette saison 3 déçoive par un manque de surprise, mais n'en est pas moins divertissante. Il reste que Baki est une série de choix pour tous les amateurs de baston débridée, et on recommande chaudement le visionnage de ses deux premières saisons. En attendant la suite, on pourra toujours se consoler en allant voir la concurrence, et en particulier Kengan Ashura, lointain cousin de Baki, avec un grain de folie en moins. 

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commentaires
Rag
09/03/2022 à 11:23

L'animation est démentielle, les combats toujours aussi bons (même si y a moins ce côté "analyse des arts martiaux" qu'on pouvait voir avant) mais...

Après avoir passé 1 saison à nous montrer à quel point Oliva était fort (à travers Numéro 2 qui sert de faire valoir), je trouve que le combat final, bien que très intense, est trop court, limite un peu expédié. Ca aurait mérité au moins 1 épisode de plus, avec du flashback et tutti quanti.

Giorno Giovanna
06/10/2021 à 07:20

C'est sympa mais sans plus, ça manque énormément de rythme, c'est mou, et le héros à le charisme d'une moule, bref arrive pas à la cheville d'un kengan ashura oul à y a du combat à chaque épisodes et pour le brin de folie..revoyez votre définition.

Jojoblack93
05/10/2021 à 16:40

La saison est vraiment horrible.
J'ai perdu du temps

Russian
05/10/2021 à 07:49

Dire que le format papier est moins bien que le format animé...heu non... Lisez le manga et vous verrez. Les dessins et le découpage sont très bien réalisés, on est happé par l'histoire très rapidement. Surtout la partie son of ogre d'ailleurs.

JL Techer
04/10/2021 à 19:21

@Xmar
La comparaison avec Hajime no Ippo n'est pas un hasard. La mise en scène des combats de Baki doit beaucoup au "Patron" Ippo. L'utilisation des gros plans sur les visages déformés par les impacts, ces effets de "vents" (je suis sûr que vous voyez ce que je veux dire) pour renforcer l'impression de vitesse des coups, les ralentis si iconiques de Ippo que l'on retrouve dans Baki...

Certes, Baki et Ippo ne partagent pas les mêmes motivations mais dans la forme, ils ont des points communs. D'ailleurs, George Morikawa (auteur de HNI) et Keisuke Itagaki sont assez proches, et n'hésitent pas à se consulter l'un l'autre, et Morikawa s'est même fendu d'une illustration en mode "face à face" entre Baki et Ippo pour les 20 ans de Baki. ( https://i.redd.it/xok19z1tif441.png ).

Par ailleurs, une simple recherche Baki vs Ippo sur les réseaux vous montrera qu'il s'agit d'un vrai sujet, débattu depuis des années entre les assidus des deux séries (sans parler des AMV Ippo vs Baki réalisés par les fans des deux sagas) ☺

Nyctalop
04/10/2021 à 18:55

J'ai bien aimé mais ça ne décolle vraiment jamais. Par contre ça m'a fait découvrir Kengan ashura et j'ai trouvé que c'était le niveau au dessus.

Sheitan62
04/10/2021 à 17:43

C'est dommage que ça parle beaucoup ça raconte les histoire du passer ect.... Pas beaucoup de combat ces agaçant même

Xmar
04/10/2021 à 17:20

Aucun mais alors strictement aucun point de comparaison avec hajime no ippo.
C'est une bourde de l'auteur de cet article, c'est pas possible autrement.

Xmar
04/10/2021 à 17:18

Je ne vois strictement aucun rapport avec hajimi no ippo, mais alors vraiment aucun.
Et po

JL Techer
04/10/2021 à 14:01

@Heden,
Hokuto no Ken et Baki partagent de très nombreux points communs. Outre ce travail sur les corps et les musculatures (presque du muscle porn parfois !), leur traitement narratif est très semblable. En prenant pour point de départ des tropes assez simples (la quête de vengeance est tout de même vue et revue), les deux séries parviennent à sublimer cela en conférant énormément de charges émotionelles à leurs héros. Dans les deux séries, les combats sont mis en scène de manière très crue. Les corps se déforment sous l'effet des coups de façon totalement exagérée, et le gore est aussi très présent dans les deux oeuvres.
Ce n'est d'ailleurs pas par hasard que le réalisateur de la série Netflix Baki est Toshiki Hirano, qui a aussi réalisé Shin Kyuseishu Densetsu Hokuto no Ken Raoh/Kenshiro den (la légende de Kenshiro) en 2007.
Il est clair que la rivalité entre Baki et Yujiro, si elle est pensée comme une rivalité martiale par Baki, se doit d'être un combat à mort. Il ne pourra en rester qu'un comme dirait l'autre ;)
Les références à Hajime no Hippo et Dragon ne sont pas là gratuitement. Ce sont deux grands noms du shonen, dont la philosophie du combat, et leurs arcs structurés autour de championnats ont clairement eu une influence sur le travail d'Itagaki.
Evidemment, Ippo Makunouchi et Goku (On aurait pu aussi citer Ashita no joe) n'ont pas grand chose en commun avec Baki en termes de caractère, ces deux personnages qui sont apparu au début des années 80 étant beaucoup plus "joviaux" que Baki, mais leur soif de combattre, cette obsessios à vouloir devenir toujours plus fort, a presque défini le style du shonen Nekketsu moderne. Style dont Baki et Kensgan Ashura (et Tough !) sont deux fiers représentants.

Et en effet, je partage votre point de vue sur cette saison 3 en deça des attentes, qui manque de grands affrontements, et qui semble un peu être le ventre mou de la série, en attendant une suite que l'on souhaite beaucoup plus nerveuse.

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