Lupin partie 2 : critique d'une aiguille trop creuse sur Netflix

Simon Riaux | 11 juin 2021 - MAJ : 14/06/2021 11:49
Simon Riaux | 11 juin 2021 - MAJ : 14/06/2021 11:49

Il y a quelques mois, les premiers épisodes de Lupin - Dans l'ombre d'Arsène s’imposaient comme le plus éclatant succès français sur la plateforme Netflix. Revendiquant quelques 70 millions de visionnages à l’international, le N rouge a décidé de diffuser rapidement la seconde moitié de la première saison, histoire de surfer sur l’enthousiasme de ses abonnés. Après des débuts pétaradants, qui portaient la marque du réalisateur Louis Leterrier, cette nouvelle fournée retrouve-t-elle le tempo enlevé et le panache qui séduisirent les spectateurs ? 

VOL À L’ARRACHIÉE 

Nous retrouvons donc Assane Diop là où nous l’avions laissé, aux abords d’Etretat, alors que son fils vient tout juste d’être enlevé par un sous-fifre de son pire ennemi. Dans les romans de Maurice Leblanc, le gentleman cambrioleur a bien eu affaire à la parentalité et aura même connu un kidnapping infantile particulièrement tragique, dans des conditions néanmoins bien différentes de celles relatées par Netflix, et à l’issue beaucoup plus tragique. 

Qu’importe, il s’agit une nouvelle fois, sur le papier, de tisser une vaste toile d’échos à l’œuvre originelle, une intention louable, mais qui trouve ici ses limites. En effet, si la série a instantanément trouvé ses marques dans le décor de l’Île-de-France, elle patouille bien plus quand elle veut insuffler un peu d’action dans les plaines normandes. Non seulement la pure adrénaline sied mal à l’ensemble, mais elle parasite les épisodes 6 et 7, en prolongeant stérilement une sous-intrigue dont l’issue et les modalités provoquent une relative indifférence. 

Ajoutons à cela que ni la caméra ni Omar Sy ne semblent à l’aise dans la tension pure ou l’action brute, et que l’entame de cette deuxième moitié de saison en souffre. Non seulement on ne croit jamais aux pseudos-twists qui émaillent les tentatives de Lupin de sauver son fils, mais le comédien lui-même paraît se désintéresser de la question, comme lors du cliffhanger de l’épisode 6, où il ne se donne même plus la peine de faire semblant d’y croire.

 

photo, Omar SyLa classe pas du tout à Vegas

 

DIAMANTS SUR SVOD 

Il faudra attendre le mitan de l’épisode 8 pour que le récit retrouve des couleurs, et joue enfin des pistes disposées ici et là, concernant les rapports humains et amoureux ambigus qu’Assane entretient avec les deux femmes de sa vie. Claire et Juliette, respectivement les lointains échos de Clarisse et de la Cagliostro, reviennent donc sur le devant de la scène à la faveur d’une intrigue autour de leur triangle (pas si amoureux) plus cruelle et perverse qu’il n’y paraît. 

Le personnage d’Arsène Lupin est peut-être connu sous l’appellation gentleman cambrioleur, mais le héros de Leblanc n’a jamais été un protagoniste unidimensionnel. Capable d’ourdir des intrigues, revanches ou pièges redoutables, l’exercice de son art n’est pas sans quelques détours moraux toujours discutables, voire d’authentiques moments de cruauté.

Et quand le scénario embrasse enfin cette dimension, la série gagne beaucoup en intensité, renouant avec l’atmosphère stimulante et divertissante de ses débuts. Assane, pour parvenir à ses fins, n'hésite plus à manipuler franchement ses proches, quitte à ternir dans le coeur du public son image de prince de la cambriole mû par un désir de réhabilitation. Ces nuances complexifient le personnage, et elles sont d'autant plus bienvenues que le montage les accompagne avec malice.

 

photo, Clotilde Hesme, Omar SyUne relation plus complexe qu'il n'y paraît

 

Sans réinventer la poudre, mais en cherchant constamment à injecter une énergie ludique à la narration, les épisodes se structurent ainsi autour de révélations, tantôt bien trouvées, tantôt attendues, mais toujours amenées avec une électricité immersive. Un plaisir de l'arnaque indiscutablement superficiel, mais à l'évidence communicatif.

Une évolution d'autant plus appréciable que si le charme d'Omar Sy fonctionne à plein quand il est sollicité, le voir en user de manière plus retorse renouvelle intelligemment notre intérêt pour le personnage. Clotilde Hesme, quant à elle, demeure un des atouts maîtres. Pas toujours aidé par un texte rédigé à la tronçonneuse et une dramaturgie qui veut avancer à toute berzingue, elle injecte néanmoins de la nuance et de l'humanité dans un personnage qui bénéficie de quelques-uns des noeuds dramatiques les plus intéressants de la série.

 

photo, Soufiane GuerrabUn sidekick jamais à la hauteur des attentes

 

LES VIEUX DANS LES YEUX

Le premier tronçon de cette saison introductive avait été confié aux bons soins de Louis Leterrier et Marcela Said. Le premier avait fait montre de son art de l'épate et de la narration par l'action, quand la seconde était parvenue à jouer efficacement de plusieurs lignes temporelles et arcs narratifs, pour aboutir à une semi-conclusion plutôt jubilatoire.

Pour ces cinq nouveaux épisodes, la mise en scène est confiée aux bons soins d'Hugo Gélin et Ludovic Bernard. Aucun des deux ne démérite, et on leur sait même gré d'emballer quelques plaisantes séquences au coeur de Paris, sans sombrer dans le syndrome de la carte postale.

 

photo, Antoine Gouy, Omar SyLupin et Milou

 

Malheureusement, on les sent plus contraints, ou peut-être moins bien servis par le scénario, plus volontiers fonctionnel que celui de la première moitié, préférant gérer les acquis que les renouveler. Le résultat n'est jamais indigne et à nouveau, la série jouit d'un filmage et d'une approche nettement plus dynamique que le tout-venant de la production hexagonale. Mais pour une paire de séquences rafraîchissantes, dont une amusante filature assistée, il faut aussi en passer par quelques percées humoristiques ratées, ainsi qu'une gestion de l'action physique plus qu'inégale. On pense notamment à une confrontation entre Leonard (Adama Niane), Lupin et un homme de Pellegrini, qui offrait bien des pistes de filmage, mais s'avère captée avec une grande pauvreté.

Le résultat n'est jamais indigne, ni franchement déplaisant, et se révèle de plus en plus immersif au fur et à mesure que l'histoire rassemble ses différents acteurs et met en place son dernier acte. Mais en l'état, on sent bien que Lupin souffre de quelques notables carences. Aucune n'entache définitivement le visionnage, ou ne laisse espérer qu'une prochaine saison ne saurait pas bâtir sur ces fondations. Mais pour devenir autre chose qu'un divertissement honnête correctement troussé, Lupin devra rapidement muscler sa narration, renouveler ses enjeux et se hisser, au moins en ambitions, à la hauteur de la légende.

Lupin Partie 2 est disponible en intégralité sur Netflix depuis le 11 juin 2021 en France

 

photo

Résumé

Cette seconde moitié de première saison se casse un peu les dents sur la résolution d'une sous-intrigue pas franchement passionnante, avant de redonner des couleurs, de l'électricité et de la complexité à son héros. L'ensemble demeure plaisant, mais n'a malheureusement plus la vivacité insufflée initialement par Louis Leterrier.

Autre avis Alexandre Janowiak
Malgré une reprise bancale, la Partie 2 de Lupin parvient à retrouver un bel élan et surtout à se jouer de ses spectateurs avec une certaine malice.
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Lecteurs

(2.6)

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commentaires
Miami81
10/08/2021 à 23:41

Je suis à priori le seul à préférer cette deuxième partie à la première. Plus dynamique, plus enlevée, on entre vraiment dans le cœur du récit sans intrigue secondaire inutile. La réalisation est plus nerveuse notamment lors du premier épisode et plus recherchée sur le dernier avec un petit plan séquence réussi, un concert assez majestueux bien synchronisé avec l action et un final à la blues brother sympathique avec une référence à la série d origine. Non franchement, cette deuxième partie m a réconcilié avec la série.

Al68
04/07/2021 à 16:47

Quelques soucis de raccords
Vitre de l'audi brisée par le policier qui se délivre et étonnement neuve une fois Raoul sauvé et mis à l'intérieur.
1995 pendant le vol du violon on voit dans la rue une Austin mini millésime 2010...
On pourrait s'attendre à mieux

G
26/06/2021 à 12:28

Stéréotypes de l’homme blanc raciste à gerber !! 20 mn et je n’en pouvais déjà plus . N allez pas en Normandie ils sont tous racistes !! Pathétique !

Anajim
18/06/2021 à 16:23

Quelle déception cette deuxième saison, on croirait regarder une série B, scénario mal ficelé, acteurs médiocres et aucun pour rattraper le coup, ne lancer pas la saison 3 svp ce serait faire honte à l’originale

Tyrion33
16/06/2021 à 21:24

J ai lu que l on avait qualifié lupin aussi bon que la série Sherlock !!! Allo quoi ?!!! C est une hérésie !!!

Telliac
16/06/2021 à 12:30

Autant j'avais été emballé par la première partie, qui avait du rythme, de l'inventivité, savait moderniser le propos sans (trop) sombrer dans la caricature et réussissait à éviter tous les travers des séries TF1, autant cette deuxième partie y sombre pleinement jusqu'à en devenir pénible.
La palme revient à l'épisode de la reprise qui n'est qu'une succession de faux-raccords où chacun des personnages semble relever un pari des choix les plus débiles.
La nuit qui tombe soudainement sur le manoir abandonné depuis la fin des productions Hammer, dans lequel Lupin se déplace avec une discrétion exemplaire à l'aide d'une lampe torche surpuissante trouvée miraculeusement dans le coffre d'une voiture volée, alors que le méchant sous-terminator bénéficie d'un éclairage suffisant pour viser (forcément comme un manche) avec son vieux fusil (les tueurs à gage ont moins de chance en loot que les gentlemen-cambrioleurs, faut croire....). Pour enchaîner avec le combat en corps à (faux-ra)corps le plus mal monté de l'histoire des scènes d'action...
Un arrêt dans un bar en province (seul endroit assez plouc pour pouvoir y trouver un téléphone à pièces) peuplé de vieux blancs racistes à béret (La représentation des diversités n'est pas encore étendue aux peuplades primitives bouseuses qui ont le droit à être représentées dans les clichés les plus désolants) . Une évasion par des chiottes de station-service qui prouve à l'évidence que les policiers ont un QI inférieur à zéro....
Pellegrini qui ne semble même plus vouloir faire semblant de chercher un semblant d'épaisseur à son personnage de pourri intégral et qui confie le détournement de fonds le plus inepte et le plus inutile au monde : à quoi sert ce ressort scénaristique qui ne sera finalement pas exploité, ainsi que ce personnage de geek, version mâle de la Lisbeth Sanders de millénium, recruté en deux secondes parce qu'il pique des Lupins dans une bibliothèque ?
Même soufflé retombé pour la pseudo-romance avec Juliette, qui perd entre les deux parties toute l'ambiguïté potentielle de son personnage pour devenir une simple cruche manipulée par tous les mâles de son entourage pour.... ben non, pour rien, juste pour lui expliquer que l'autre mâle est un menteur manipulateur (c'est celui qui dit qui y est)....
C'est vraiment dommage, la première partie et Lupin méritaient tellement mieux que cette partie 2 sans âme ni souffle....

déçu. divertissement honnête mais pas inoubiable
15/06/2021 à 14:23

ayant apprécié les aventures d'Arsène Lupin écrite par Maurice Leblanc, j'ai toujours considéré Arsène comme quelqu’un de malin. J'ai trouvé qu'Assane sur l'ensemble des épisodes commettait bourde sur bourde. Il semble connaître la technologie mais ne l'emploie pas bien. il se laisse filer comme un bleu. la course poursuite qui ne rime à rien.
dans le château, il marque sur du verre cassé alors que 2" auparavant il l’éclaire avec sa lampe de poche. La bagarre das ce même lieu n'est pas crédible tout comme le fait qu'Assane croit que son fils est toujours dans le coffre de la voiture. Mais on entend le fils crier depuis le premier.. comment a fait le kidnappeur pour l'y remettre? bizarre.

dans l'épisode 5 il y a un faux raccord. Hubert Pellegrini. quitte l'interview avec son micro cravate on le voit de dos s'avancer vers la porte et l'instant d'après dans le couloir il n'y a plus de micro.

certains scènes sont quand mème mieux ficelés que d'autres.
l'ensemble de la saison 2 est sympa à regarder pour passer une ou deux soirées tranquille sans se prendre la tête mais ce n'est pas inoubliable.

.

Francis Bacon
14/06/2021 à 18:57

J'ai vu hier, en effet on peut reprocher de très grosses ficelles, la plupart des twists sont absurdes (ex : la poursuite, Assane a perdu de vue la voiture du kidnappeur mais par hasard il arrive sur la place du village où est le mec, on pourrait faire 1 liste très longue des incohérences) , des facilités d'écriture (1 poursuite en voiture, tiens si on mettait 1 voie ferrée avec un train qui arrive, ce serait du jamais vu). Comme funkyben, j'ai été choqué par 1 épisode où dans le village tout le monde est raciste, c'est très exagéré et pas crédible.

Pourtant ça se regarde, ça va vite et pour peu qu'on se pose pas de questions (comment il sait où chercher ? par ex) ça va. J'avoue ne pas trop savoir pquoi ça m'a assez plu en fait (Omar Sy, le rythme, quelques beaux plans de Paris)

Je ne trouve pas par contre que les defauts évidents de la partie 2 soient absents de la partie 1, je ne vois pas 1 diff flagrante de qualité entre les 2 parties.

Kips
13/06/2021 à 22:58

Au début de la saison 1 j'étais vraiment pas convaincu. Petit a petit j'y ai pris gout et on peut dire que la saison 1 était pas si mal.
Mais la saison 2 on est effectivement à un autre niveau.
Absurdité sur absurdité, je me suis forcé a finir de regarder mais je me demande si ça en valait vraiment la peine.
Pour faire simple, la saison 2 est vraiment bas de gamme, même un gamin de 8 ans se rendrait compte que les intrigues et les coups du soit disant lupin ne tiendraient pas 2 minutes dans la réalité.

Arnaud (le vrai)
13/06/2021 à 17:22

Quelle 2ème partie décevante … et pourtant j’avais adoré la première partie au point de me mater les 5 épisodes à la suite en une soirée

Mais la 2ème partie n’est clairement pas à la hauteur. Après 2 épisodes vraiment pas ouf et limite ridicule, on a deux épisodes pas trop mal puis 1 dernier épisode complètement raté

SPOILER
Tout, absolument tout ce qui se passe dans le théâtre du Châtelet se ramasse
Les aveux donnés bien volontiers quand bien même ça se voit à 10milliards de km que c’est enregistré (et d’ailleurs en France ce genre d’aveux enregistrés n’a aucune valeur, encore plus quand ils sont donnés sous la contrainte), la poursuite dans le théâtre ne rime à rien (dois je vraiment parler du garde qui laisse tranquillement un mec recherché pour meurtre avancer vers lui et mettre la main sur son pistolet pour sois-disant enlever la sécurité …), Assane qui se déplace ensuite tranquillement quand 200 flics le cherchent dans le théâtre (comment même est-il sorti de la scène ? Depuis on coupe le courant hop on s’échappe alors qu’une 20aine de mecs de la BRI t’encercle)

FIN SPOILER

Je pourrais continuer des heures là dessus mais au final on est face à un énorme ratage qui frustre vraiment, encore plus comme je l’ai dit alors que j’ai adoré la première partie …


Et Omar, je t’aime beaucoup mais t’es clairement pas doué pour jouer les émotions et la tristesse …

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