La Stratégie Ender : critique Starshit Troopers

Simon Riaux | 6 novembre 2013 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 6 novembre 2013 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Imaginez un instant que sorte sur plusieurs centaines d'écrans un film narrant la quête initiatique d'un enfant soldat, choisi parmi des milliers d'autres pour sa violence, ses talents de manipulateur et son sang froid. Représentez-vous une académie spatiale où les élus pré-pubères sont formés au massacre de masse et soumis à une compétition intense, tant physique que psychologique, dont le but est de former une élite de corps et d'esprit, des supers soldats, l'élite de la race humaine. Gardez à l'esprit que ces glabres couillons ont pour seul but de permettre à l'humanité d'exterminer purement et simplement une race extra-terrestre qui nous a attaqués un demi-siècle plus tôt, n'a pas donné signe de vie depuis et a le malheur de ressembler à de gros insectes dégoûtants. Ce serait complètement fou me direz-vous. Même les américains ne sont pas assez cramés du bulbe pour nous gratifier d'un blockbuster de SF crypto-fasciste aussi pontifiant. Et bien figurez-vous que si. Même que ça s'appelle La Stratégie Ender et que ça s'adresse aux spectateurs les plus jeunes.

Certaines œuvres, et ce quelle que soit l'inclinaison du spectateur, dépassent certaines limites avec une fausse candeur particulièrement désagréable. C'est le cas de celle qui nous intéresse ici. On passera rapidement sur le néant esthétique de la chose, son réalisateur Gavin Hood étant déjà coupable du premier stand alone dédié à Wolverine et n'ayant d'autres ambitions que de servir à ses maîtres la soupe tiède qu'ils lui ont commanditée. Amis du bon goût, de la direction artistique, du cadrage et de la profondeur de champ, passez votre chemin, il n'est nul espoir en ce lieu. Tout au plus peut-on dire que La Stratégie Ender parvient à faire passer la pilule de sa laideur grâce à un enrobage de mollesse qui confère au visionnage le confort minimum requis au cerveau du spectateur pour l'attendrir.

 

 

photo, Asa Butterfield

 

Ce n'est donc pas l'apparence du film qui dérange, mais bien ses multiples (et tristement cohérents) messages. On y apprend que la guerre préventive est un concept noble, alors que le jeune héros se voit promu pour avoir broyé à coup de rangers les côtes d'un de ses camarades de classe (certes un peu violent, roux et grassouillet). Mais le programme déroulé par Gavin Hood ne s'arrête pas là, puisque l'on découvrira que pour former un bon soldat, il faut non seulement le manipuler en permanence, tout en l'isolant affectivement, mais également veiller à ce qu'il soit lui-même un froid calculateur. Et le personnage principal de se voir récompensé à chaque fois qu'il se jouera vicieusement d'un de ses petits camarades, désigné par la mise en scène comme un être inférieur.

 

 

photo, Asa Butterfield, Harrison Ford

 

Parlons-en des petits camarades. On n'ira pas jusqu'à parler d'eugénisme (ah bah si, c'est fait !) mais on ne peut s'empêcher de ressentir un profond malaise en découvrant que pour survivre à l'aventure, mieux vaut éviter d'être en surpoids ou trop petit, de même être une femme ne jouera pas en votre faveur, puisque – c'est bien connu – vous souffrez d'une tendance à la compassion malvenue. Car dans La Stratégie Ender, s'inquiéter de son prochain, ça ne le fait pas trop. Dans ce monde où l'armée représente le summum de la réussite, on est vivement encouragé à sacrifier les troupes, à ne pas s'inquiéter outre mesure des pertes humaines pour peu que le but ultime, l'extermination de l'autre, soit atteint.

 

 

Photo Asa Butterfield, Hailee Steinfeld

 

Ce n'est pas son twist éventé qui sauvera l'entreprise de ses penchants idéologiques, tant il pourra être lu comme une forme de châtiment quasi-divin, ouvrant à son tour sur une réflexion à tout le moins nauséabonde. Le plus triste est sans doute de voir patauger dans ce marigot numérique un Harrison Ford exténué et un Ben Kingsley probablement désireux de faire plus grotesque que le Mandarin d'Iron Man 3. Sabordé dès sa discrète campagne promotionnelle, le film succède de quelques jours à Gravity et n'a heureusement aucune chance de hanter durablement nos mémoires.

 

 

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commentaires
O8
09/07/2017 à 16:59

@Olivier

Et si en fait, un film, une oeuvre, pouvait être perçue de différentes manières ? Et si les avis et sensibilités pouvaient co exister ? Et si ni toi ni le mec de la critique n'avait tort parce qu'on a aura tous notre avis et nos arguments ?

@les gens
Si vous supportez pas de voir/lire un avis différent vu votre sous peine de pensez "mais quel abruti il a rien compris", arrêtez de lire des critiques peut-être.

Olivier
09/07/2017 à 16:18

Le rédacteur de cette critique le laisse perplexe. Sans rire, il n'a rien compris au film où il devait faire autre chose en le regardant? Incroyable de ne pas comprendre à ce point le fond...

quoi ?
14/09/2015 à 03:51

Tout à fait d'accord avec mon voisin du dessus.
et j'espere que depuis le temps ce pitoyable critique a 2 balles a été viré.
ou s'est acheté un cerveau.

Donner des intentions à l'auteur...
18/01/2015 à 00:01

....Sans prendre en compte le bouquin?? Quelle prouesse, Mr le critique d'écran large! Et vous voulez un susucre pour votre macabre découverte??

Si visiblement, la mise en scène de Gavin atteint les abysses, on peut dire que ses contradicteurs atteignent les limbes ! Rarement vu une critique aussi imbécile !! Aussi puante de dédain et d'arrogance mal placé !
Vous avez le droit de critiquer le film sur la mise en forme, sur sa plastique, sur la façon de transmettre les idées (et je l'ai trouvé moi même assommant dans la forme)...mais ne pas voir que le film (et le bouquin) sont justement un brûlot contre cette méthode ?? Alors quoi, quand vous regardez le Starship trooper de Verhoeven, vous y voyez un film fascistes? Vous êtes allergiques au cynisme? Vous ne le comprenez pas??

Ma note n'est pas celle du film , c'est juste celle du critique qui bien besoin qu'on lui rappelle sa pitoyable nullité !

sylvain
25/12/2014 à 11:28

Un film qui représente les valeurs d'une certaine partie de la société américaine et qui promue la haine de l'autre
C'est ça qu'on donne à nos jeunes ? L'étranger est toujours un ennemi. L'autre toujours un adversaire

Lira
21/11/2014 à 15:59

Ce film est tout sauf un film d'action. Il a été pensé et réalisé plus comme une sorte de thriller psychologique. Malheureusement, en le regardant au premier degré comme le prouve cette critique, il est facile de ne voir que des ratés puis-ce que l'objectif du film n'était pas de parler de l'entrainement du pauvre Ender ou de l'extermination des Dorymorphes mais bel et bien de la manipulation des gradés sur les recrues ainsi que le principe de "frappe préventive".
Bien évidemment, en ne connaissant pas les "coutumes" américaines, il est difficile de voir ce que ce film pointe du doigt. C'est une critique. En aucun cas une apologie de quoi que ce soit. (de plus, l'eugénisme n'a rien à voir là dedans. Le chef des Scorpions est efficace, physiquement avantagé malgré sa taille et particulièrement intelligent. Il est juste trop hautain pour voir le potentiel des autres. A côté, un arabe, une fille extrêmement forte et un indien.. Ah et le "gros" => Oui, oui, ils sont tous là, du côté du héros... Vous avez réellement vu le film ?)

Pour ma part, j'ai trouvé ce film réellement attrayant. Alors oui, je n'ai pas vu Gravity... Cependant, La Stratégie d'Ender m'a éblouie tant sur le côté épuré des décors qui prouvent que l'on peut faire du beau sans gaspiller 10M de dollars en graphistes que sur la psychologie des personnages (et encore ce sont les "meilleurs" qui font les moins bonnes performances).

Le film dénonce ce que certaines personnes de pouvoir sont capable de faire pour arriver à leurs fins. Ender est encouragé à être violent, et ce, toujours plus. Pourtant, il continue de lutter contre ça et s'acharne toujours à penser plus et à mieux étudier.
De plus, il se retrouve isolé afin d'être plus facile à contrôler. Pour lutter contre ça, il s'entoure de personnes diverses qui le soutiennent et dévoilent tous leur potentiel.

Cependant, lorsque l'on est manipulé depuis son plus jeune âge, il est très difficile de faire la différence entre ce que l'on pense et ce que l'on nous a appris à penser. C'est une idée particulièrement développée dans le film. Le but n'est donc pas de montrer une guerre ni même la "noblesse" de la destruction préventive mais bien de les critiquer et de les montrer du doigt !

C'est extrêmement plaisant de découvrir de nos jours un film qui ne prend pas le spectateur pour un idiot ! Et c'est agréable ! Tout n'est pas dit, tout n'est pas expliqué pour faciliter l'abrutissement du spectateur !

J'ai été ravie que, pour une fois, un film ne me prenne pas pour une idiote. La viande broyée n'a pas le même gout qu'un steak.

Alors oui ! Si vous voulez vous péter les yeux dans des décors ultra travaillés ou voir un film d'action : passez votre chemin.
Allumez votre cerveau, activez votre esprit critique et laissez vous emporter par les dizaines de sujets abordés par ce film. Ne vous contentez pas d’avaler les dires des personnages : décryptez ce qu'ils signifient.

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