Carrie, la vengeance : critique qui saigne

Simon Riaux | 3 octobre 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58
Simon Riaux | 3 octobre 2017 - MAJ : 09/03/2021 15:58

Avant d'être un chef d'œuvre de Brian De Palma, Carrie est le premier roman de Stephen King, publié en 1974. Comme toujours dès lors qu'il s'agit de régurgiter un classique adapté d'une œuvre littéraire, le remake qui nous intéresse aujourd'hui prétend non pas capitaliser sur le travail d'un prédécesseur pour faire de l'argent facile, mais bien proposer une transposition plus fidèle de l'œuvre originale. Les fans du maître de l'horreur se comptant par millions, l'enjeu commercial est réel d'autant plus que le film de 1976 n'avait ni les moyens ni l'ambition de coller au récit du King. Ses adorateurs doivent-ils se ruer sur Carrie, la vengeance pour s'émerveiller devant le flot menstruel de Chloë Grace Moretz ? Certainement pas.

TU CARRY ?

Carrie, la vengeance, la cuvée 2013 donc, n'a rien d'un retour aux sources. N'espérez pas y trouver la structure chorale et éclatée du livre, pas plus que le portrait saisissant d'un système à la dérive. Jamais la réalisatrice n'incarne ce qui faisait la valeur du texte, à savoir sa profonde ambiguité morale. Ainsi Snell devient-elle ici une sainte nitouche en mal de repentir quand l'écrivain soulignait ses penchants de dominatrice passive-agressive.

De même, Kimberly Peirce l'avait juré, cette fois, le final apocalyptique serait respecté. Il faudra se contenter d'une triplette d'effets pyrotechniques au rabais, un maquillage presque gore et deux trucages numériques réussis. On est à des lieux des 440 morts du roman et des torrents de flammes déversés sur la petite ville de Chamberlain.

 

Photo Chloë Grace MoretzCarrie carry pas

 

GROSSE CARIE

Le remake préfère singer De Palma, lui subtilisant des séquences entières, parfois des dialogues au mot près, sans jamais lui arriver la cheville. Les douches, le bal, l'accident de voiture, l'affutage de couteaux maternels... Peirce pioche sans inspiration ni vergogne chez son modèle, allant, dans un élan de bêtise et d'impuissance mêlées, jusqu'à singer son ultime plan. Ses rares idées originales se cantonnent à la présence envahissante de téléphones portables, sensés greffer un appendice de modernité à cette entreprise dont chaque séquence entérine la dimension mercantile.

 

 

photo, Chloë Grace MoretzChloë Grace Moretz et Julianne Moore ne peuvent pas grand chose

 

En revanche, on attendait avec bienveillance la performance de l'impertinente Chloë Grace Moretz. Hélas la Hit Girl de Kick Ass navigue à vue dans ce récit courtaud et alterne entre deux expressions faciales outrées. Plus encore que son jeu, c'est sa personne même qui décrédibilise ce projet opportuniste. Comme l'écrivait King, Carrie est « une grenouille bœuf parmi les cygnes », description qui ne colle pas vraiment ni au physique de l'actrice, ni à la manière dont le personnage est envisagé dans ce remake, plus proche en réalité d'un calimero hardcore que d'un quasimodo vénère.

 

Difficile de croire aux malheurs de cette mignonne aux cheveux sales, à qui il faudra moins de deux minutes pour se muer en reine du bal désirable, vamp rosâtre au parfum frelaté. Le même procédé simplificateur gommant les aspérités de tous les personnages, on assiste au ponçage en règle d'une merveille de malice et de finesse psychologique.

 

 

Affiche française

 

 

Résumé

Le bilan de cette nouvelle version est sans appel. Une énième fois, le résultat sent bon l'arnaque faisandée, la tentation de transformer des travaux matriciels en marques désincarnées. Naïvement, on espère que l'échec cuisant du film de Kimberly Peirce au box-office américain vaudra aux nombreux remakes que nous concoctent les studios de finir comme cette piteuse Carrie : enterrés bien profond sous une stèle fendue.

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commentaires
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17/10/2022 à 02:17

Je suis pas laide sans vouloir me vanter et j ai pourtant subi du harcèlement scolaire presque tout au long de ma vie surtout au collège lycée.dû a mes bonnes notes et ma personnalité neuroatypique.les belles filles aussi peuvent être malheureuses

parolenonneguative
25/07/2021 à 17:51

je trouve que ce film est très bien et qu'il faut parfois détacher le film du livre merci

Adam
04/10/2018 à 10:29

J'adore Chloe Grace Moretz et Julianne Moore mais le 1er adjectif qui m'est venu aprés visionnage de cette mouture 2013 c'est: INUTILE! Ce n'est pas un mauvais film mais il n'apporte strictement rien à l'original à part l'usage des téléphones portables.
Bref pour le coup ils auraient peut être du s'eloigner du bouquin pour faire du neuf.

Andarioch
04/10/2018 à 09:22

Le problème n'est pas de faire des remakes mais de les concevoir comme des oeuvres opportunistes confiées à des réal plus ou moins tacherons qui de toute façon n'ont aucun vrai contrôle artistique sur le film. Quand certains disent à juste titre qu'il y a eu d'excellents remakes (tiens, scarface par exemple) ils oublient de préciser qu'il s'agit de projets entièrement pris en main par des réalisateurs de talent qui ont, plus ou moins eut les coudées franches. Une autre époque.
Concernant Carrie nous avons juste une volonté peu ambitieuse de moderniser une histoire géniale qui fut un film culte. Aucune vision, aucun parti pris, juste un ripolinage. Et deux grandes actrices sous exploitées de plus.

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