Critique : Turf

Patrick Antona | 12 février 2013
Patrick Antona | 12 février 2013

Après la série de comédies plus ou moins insipides que Fabien Onteniente (les Camping, Jet Set, Disco) a enchainé ses dernières années, mais qui ont néanmoins cartonné au box-office, on était en droit de se demander si le réalisateur auteur à ses débuts des prometteurs Tom est tout seul ou Grève Party pouvait néanmoins se reprendre et livrer un film sympathique qui puisse ne pas faire rimer populaire et  vulgaire pour une fois. Si Turf réussit bien à éviter ce large écueil, le fait d'évoquer les fantômes d'Yves Robert (pour le côté film de bande) et de Gilles Grangier (ça, c'est pour le côté hippique) ne garantit en rien du succès d'une entreprise à laquelle il aurait fallu plus de substance et qui finit par s'échouer sur les rivages de la platitude la plus crasse.

Reprenant sa formule du loser qui se rebiffe pour pouvoir se payer sa place au soleil, ici ce n'est pas Franck Dubosc mais le quarté Édouard Baer/Alain Chabat/Lucien Jean-Baptiste/Philippe Duquesne, Onteniente applique la recette éprouvée de mettre en situation sa brochette de comédiens connus sous l'angle de français moyens qui en bavent, qui vont alterner succès et déconvenues dans leur quête, se fâcher et se réconcilier jusqu'au triomphe final. Mais à ce canevas ultra basique, le réalisateur n'apporte rien de neuf qui ne puisse à un moment ou à un autre faire hausser le sourcil du spectateur, pas même un gag mémorable à se mettre sous la dent. Et donc de faire répéter à Edouard Baer (pourtant bon dans ses atours de vieux beau sur le retour) le même gimmick du hénissement à un point que cela devient gênant, ou d'appeler à la rescousse Marthe Villalonga, encore une fois maman protectrice. Rien n'y fait, on n'y croit pas une seconde ! Et que dire des comédiennes, qui de la plantureuse Héléna Noguerra ou de la charmante Vahina Giocante se trouvent  réduites à de simples utilités, alors qu'elles auraient du apporter du piment à un récit bien trop ronronnant. Et la catastrophe n'est pas loin quand Onteniente feint de renouer avec ses vieux démons, celui de l'exhibition du luxe bling bling à la Jet Set 2 qui, par ses temps de vaches maigres, relève de la faute de goût. Seule éclaircie au tableau, source de gag involontaire d'ailleurs : le paradoxe Gérard Depardieu, promu nouveau salopard du cinéma français, qui porte avec efficacité le costume et le rictus de l'arnaqueur, le rapprochant d'autant plus de sa condition de nouveau russe !

Turf ne redorera donc pas le blason de son réalisateur, la faute à une écriture paresseuse et des caractères insuffisament étoffés, comme nombre de comédies françaises sorties sur les écrans ces derniers mois. Reste un film correctement réalisé et quelques envolées lyriques d'Edouard Baer à se mettre sous la dent, mais l'échec du film est symptomatique d'un système où des producteurs tentent un pari en s'appuyant uniquement sur un casting bankable et en titillant la veine populiste du public, et en oubliant l'essentiel, un bon scénario !

Résumé

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