Critique : Il était une fois en Anatolie

Simon Riaux | 21 mai 2011
Simon Riaux | 21 mai 2011
Nuri Bilge Ceylan est ce qu'il convient d'appeler un formaliste à tendance contemplative. La lecture de cet adjectif provoque généralement une saine réaction de défiance : contemplatif joli ou contemplatif chiant ? Le metteur en scène turque a la particularité d'avoir appartenu à la première catégorie, avant de faire un saut du côté de la neurasthénie avec Les Trois singes. On était donc curieux de savoir à quel sauce il allait cuisiner ce Once upon a time in Anatolia. Après visionnage, il est évident que le réalisateur a définitivement choisi son camp, peut-être pas celui que l'on espérait.

Si vous gardez un souvenir douloureux des interminables plans d'ensemble de son précédent film, autant vous prévenir d'emblée, ils sont beaucoup plus nombreux ici, et gagnent notablement en longueur (du moins dans le ressenti du spectateur, on ne poussera pas le vice jusqu'à les chronométrer). Il faudra également supporter les innombrables plans de nuit, totalement sous-exposés, où l'on distingue péniblement les phares d'un cortège de véhicules, sans parler de ces séquences de dialogues qui font la part belle à des images aussi fixes que rigides.

Ce dispositif pourrait attiser l'intérêt, pour peu qu'il soit au service d'un scénario, d'une intrigue, d'une quelconque progression qui éveille notre esprit. Manque de bol, Nuri se désintéresse visiblement tout à fait de ce qu'il raconte. Pour preuve, une multiplication de tunnels dialogués au fur et à mesure que s'égrènent les minutes, qui accomplit l'exploit de nous désintéresser de la pseudo enquête principale, mais également de tous les enjeux annexes que les verbiages des personnages brassent à longueur de temps.

Alors que s'achève le film sur les bruitages peu ragoûtant d'une autopsie à l'ancienne, on pousse un soupir de réel agacement. Car tout n'était pas à jeter dans les 157 minutes infligées par Ceylan. Le bougre dirige très bien ses comédiens, qui s'en tirent malgré le vide de certaines séquences, mais surtout, le metteur en scène fait un usage proche de la perfection de sa photographie. Ce n'est pas franchement nouveau, tous ses précédents films jouissaient de cette qualité, mais on se désole de la voir prendre dans l'oeuvre de son auteur une place démesurée, clairement au détriment des autres paramètres qui participent à faire d'un bel objet, un film.

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